Question écrite n° 12002 :
Souveraineté et autonomie alimentaire de la Guadeloupe

17e Législature

Question de : M. Olivier Serva
Guadeloupe (1re circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Olivier Serva interroge Mme la ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour renforcer l'autonomie et la souveraineté alimentaire de la Guadeloupe, dans un contexte marqué par une forte dépendance aux importations et de transition écologique urgente. En effet, la Guadeloupe présente un taux de dépendance alimentaire estimé à 82 %. La majeure partie des financements du programme européen POSEI reste orientée vers les filières d'exportation, notamment la banane et la canne à sucre, qui mobilisent à elles seules plus de 60 % des aides agricoles. À l'inverse, seuls 10 à 15 % de ces aides sont alloués à la diversification des productions vivrières locales. Cette répartition déséquilibrée limite fortement les capacités de production intérieure et rend le territoire extrêmement vulnérable aux moindres perturbations extérieures, comme l'a récemment illustrée la grève des dockers au port du Havre, provoquant pénuries et rayons vides dans les supermarchés antillais. De plus, l'écart de prix des denrées alimentaires entre la Guadeloupe et l'Hexagone est considérable. Il atteint jusqu'à 42 % sur certains produits de base, contribuant au surcoût de la vie dans l'archipel et pénalisant lourdement le pouvoir d'achat des ménages Guadeloupéens. Dans le même temps, les filières vivrières locales peinent à se développer, confrontées à la concurrence internationale féroce de produits importés à bas coût, à laquelle s'ajoutent les aléas climatiques récurrents et l'inflation persistante du prix des intrants agricoles. Faute de stratégie claire et de valorisation des productions locales, la consommation alimentaire s'est progressivement alignée sur les habitudes hexagonales, favorisant les produits transformés, congelés ou sucrés, au détriment des légumineuses, tubercules et fruits frais du terroir. En conséquence, les déséquilibres nutritionnels se sont accentués, avec une augmentation notable des pathologies liées à l'alimentation, telles que le diabète, l'hypertension ou encore l'obésité. Par ailleurs, les filières d'élevage et de pêche, pourtant essentielles pour atteindre une sécurité alimentaire durable, sont insuffisamment soutenues et manquent vivement d'accompagnement stratégique. La pêche côtière artisanale souffre de la raréfaction des ressources halieutiques, du vieillissement de ses flottes et d'un manque d'attractivité. Quant à l'élevage local, il ne couvre qu'une infime partie des besoins du territoire, alors qu'il pourrait constituer un axe majeur de relocalisation de l'alimentation. Le modèle agricole actuel, hérité d'une logique coloniale d'exportation, montre aujourd'hui ses limites. Il perpétue une spécialisation orientée vers la rentabilité à court terme plutôt que vers une alimentation saine, durable, accessible et résiliente pour la population locale. Ce modèle, désormais obsolète, freine la mise en œuvre des circuits courts, de la transition agroécologique et plus largement de l'adaptation environnementale que nécessite l'époque. Dans ce contexte et à la lumière des constats clairs tenus dans le rapport d'information de la délégation aux outre-mer sur l'autonomie alimentaire, datant de juillet 2023, il souhaite savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement entend mettre en œuvre pour réorienter les aides agricoles (européennes et nationales) vers la production vivrière locale et la diversification agricole, afin de réduire la dépendance alimentaire du territoire et d'accroître son autosuffisance ; comment le Gouvernement prévoit de soutenir activement la transition agroécologique en Guadeloupe et le développement des circuits courts, notamment via la valorisation de l'agriculture de petite échelle bioéconomique et agroécologique (dite APEBA), identifiée par les experts comme un levier stratégique pour la souveraineté alimentaire ultramarine ; quels engagements sont prévus à moyen et long terme pour inscrire la Guadeloupe dans une trajectoire de souveraineté alimentaire réelle, en tenant compte de son héritage historique et des contraintes spécifiques de ce territoire insulaire.

Données clés

Auteur : M. Olivier Serva

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Agriculture, agro-alimentaire et souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture, agro-alimentaire et souveraineté alimentaire

Date :
Question publiée le 23 décembre 2025

partager