Situation du commissariat de Bailleul et celle de la gendarmerie de Renescure
Question de :
M. Jean-Pierre Bataille
Nord (15e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Jean-Pierre Bataille attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur deux problématiques liées aux forces de l'ordre en Flandre intérieure : la diminution des moyens du commissariat de Bailleul, en raison de la mutualisation en zone police avec Armentières, et le retard préoccupant dans l'installation de la brigade de gendarmerie à Renescure, malgré les importants investissements réalisés. Depuis la mise en place de cette mutualisation en 2016, Bailleul, qui ne dispose que d'une police municipale, constate une diminution significative des effectifs et des moyens alloués à son commissariat. Celui-ci, autrefois opérationnel 24h/24, a été réduit à un simple bureau de police aux horaires administratifs, ne laissant que 4 enquêteurs sur place, contre 55 auparavant. Avec seulement 2 véhicules de police pour couvrir une zone de 89 km2, les délais d'intervention se sont drastiquement allongés et la présence policière est devenue sporadique. De plus, sur une zone de compétence aussi vaste, la situation sécuritaire se fragilise, la section anticriminalité et les enquêteurs spécialisés dans la lutte contre les stupéfiants peinent à répondre efficacement à la hausse de la délinquance et des violences. Face à la montée du sentiment d'insécurité, M. le député interroge M. le ministre sur la possibilité de redoter Bailleul d'un commissariat de plein exercice avec des moyens adaptés. Un rapport de la Cour des comptes du 13 janvier 2025 recommande le passage en zone gendarmerie de 76 circonscriptions en milieu rural ou périurbain. Cependant, Bailleul, attachée à la police nationale, ne souhaite pas ce changement. Un tel passage nécessiterait des investissements importants pour loger les gendarmes, ce que la ville ne peut financer et aurait des répercussions sur Hazebrouck, qui serait également contrainte de changer de zone. Par ailleurs, l'installation d'une brigade de gendarmerie à Renescure, annoncée fin 2023 par l'ancien ministre de l'intérieur, M. Darmanin, est toujours en attente. Prévue pour mars 2024 avec un effectif de 10 gendarmes, elle n'a pas encore vu le jour, malgré les 21 000 euros investis par la commune pour réaménager une salle des fêtes de plus de 100 m2 (cloisons, portes et installations électriques et informatiques ayant été mises aux normes). La gendarmerie, qui paye déjà un loyer et a équipé les lieux (bureaux, armoires d'armes, radios), n'a, à ce jour, instauré aucune permanence (2 à 3 matinées prévues initialement par semaine). Par ailleurs, le projet plus ambitieux de la mise en place d'une brigade permanente (avec logements et locaux administratifs) est également au point mort, malgré les démarches déjà entreprises par la commune et ses partenaires. Compte tenu de ces éléments, il lui demande des précisions sur les délais et les mesures nécessaires pour rendre opérationnelle la brigade de gendarmerie provisoire puis permanente à Renescure, afin que les investissements réalisés ne restent pas vains.
Réponse en séance, et publiée le 5 février 2025
FORCES DE L'ORDRE EN FLANDRE INTÉRIEURE
M. le président . La parole est à M. Jean-Pierre Bataille, pour exposer sa question, no 121, relative aux forces de l'ordre en Flandre intérieure.
M. Jean-Pierre Bataille . La sécurité de nos concitoyens est un enjeu majeur, et je sais combien le gouvernement y est attentif. Néanmoins, en Flandre intérieure, dans ma circonscription, la quinzième du Nord, située entre Lille et Dunkerque, les évolutions intervenues récemment dans l’organisation des forces de l’ordre ont suscité, sur le terrain, des interrogations légitimes.
Deux dossiers méritent une attention particulière : à Bailleul, ville de 15 000 habitants, les moyens ont été fortement réduits à la suite de la mutualisation du commissariat, en 2016, avec celui d'Armentières ; à Renescure, l'installation de la brigade de gendarmerie se fait toujours attendre, malgré les investissements engagés.
La ville de Bailleul, très attachée à la police nationale, a vu son commissariat perdre une grande partie de ses effectifs et de ses capacités d’action : on y compte seulement quatre enquêteurs, contre cinquante-cinq auparavant ; un bureau ouvert aux horaires administratifs a remplacé une présence vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; il n'y a plus que deux véhicules, pour couvrir 89 kilomètres carrés. Résultat : les délais d’intervention s’allongent considérablement. Quant aux unités spécialisées, notamment la section anticriminalité et les unités dédiées à la lutte contre les stupéfiants, elles rencontrent de réelles difficultés pour assurer pleinement leurs missions.
Face à cette situation, quelles solutions le ministère de l'intérieur envisage-t-il pour renforcer la présence policière à Bailleul et garantir des moyens adaptés aux besoins du territoire ?
Par ailleurs, la Cour des comptes préconise le passage en zone gendarmerie de plusieurs circonscriptions rurales et périurbaines. Quelle est la position du gouvernement sur cette recommandation ? Si cette orientation était retenue, elle impliquerait des investissements importants, difficiles à assumer pour la commune, et aurait probablement un impact sur la ville voisine, Hazebrouck, chef-lieu de la circonscription.
L'installation à Renescure d'une brigade de gendarmerie provisoire a été annoncée à la fin de l'année 2023 par M. Darmanin, prédécesseur du ministre en exercice. L'effectif prévu était de dix gendarmes et, dès mars 2024, une permanence devait être assurée deux à trois matinées par semaine. Or la brigade n’est toujours pas opérationnelle. Pourtant, la commune a investi des sommes significatives et mis à la disposition de la gendarmerie un local mis aux normes et équipé. La gendarmerie paie d'ailleurs un loyer pour un espace inoccupé !
Le ministère de l'intérieur peut-il préciser où en est ce projet ? Quand la brigade pourra-t-elle effectivement être mise en service ? Qu’en est-il de la brigade permanente qui devait suivre ? Ce deuxième projet semble à l’arrêt, malgré les démarches déjà entreprises par la commune et ses partenaires.
Lors de l'audience solennelle de rentrée du tribunal judiciaire de Dunkerque, il y a quelques jours, Mme la procureure de la République a qualifié 2024 d'année du dépassement, compte tenu de l'important accroissement du nombre de faits criminels. Dans les territoires ruraux, la sécurité est un besoin impératif.
M. le président . La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur . Je vous fais part de la réponse très précise préparée par les services du ministère de l'intérieur. Je suppose que, sur un point, elle ne vous satisfera pas.
La circonscription de police nationale de Lille dispose de 2 025 agents. La direction interdépartementale de la police nationale dispose de 5 494 agents – cet effectif a augmenté, puisqu'il était de 5 385 agents à la fin de l'année 2016. Il convient de souligner que tous ces policiers, notamment ceux qui appartiennent aux unités départementales et interdépartementales, relèvent d'un commandement unique. Ils peuvent être déployés en renfort en tout lieu du département.
S'agissant de la ville de Bailleul, la question est de savoir s'il faut y créer un commissariat de plein exercice. Par honnêteté intellectuelle, je dois vous dire que tel n'est pas le projet. En effet, la ville n'est pas isolée : elle relève de la division de police d'Armentières-Bailleul, au sein d'une circonscription de police dotée – je l'ai dit – de plus de 2 000 agents et d'une direction interdépartementale dotée de plus de 5 000 policiers.
Au moins une des patrouilles de police secours de la division est engagée en permanence à Bailleul, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. En outre, des équipages du groupe de sécurité de proximité et de la brigade anticriminalité y patrouillent. La commune dispose aussi, en cas de besoin, d'un potentiel d'intervention rapide de trente équipages présents, là aussi vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, dans la circonscription de police. En 2024, le délai moyen d'intervention desdites patrouilles à Bailleul à la suite d'un appel au 17 était de onze minutes.
Les moyens sont donc importants, et l'engagement des policiers porte ses fruits. En 2024, dans la circonscription de police nationale de Lille, les atteintes aux biens ont diminué de 3 % et les violences physiques ont connu une légère baisse, de 0,6 %. À Bailleul même, le taux d'élucidation en matière de délinquance générale a sensiblement progressé, passant de 33 % en 2022 à 37 % en 2024 – ce qui n'est pas négligeable.
S'agissant de la répartition des zones de compétence entre la police et la gendarmerie, j'ai pris connaissance avec intérêt du rapport de la Cour des comptes que vous avez évoqué. Le ministre d'État et moi-même sommes attachés à ce que toute évolution éventuelle dans ce domaine associe très étroitement les élus locaux, repose sur un constat partagé et apporte une amélioration significative – il n'est pas utile de changer un dispositif qui fonctionne.
Dans le cadre du plan de création de 239 nouvelles brigades de gendarmerie, 80 brigades ont été créées en 2024 et 159 doivent encore l'être dans les prochaines années. Dans le Nord, la brigade fixe de Zuydcoote, dotée d'un effectif de dix-huit gendarmes, a été créée le 1er mai.
Parmi les unités restant à créer, la brigade fixe de Renescure fait partie des projets identifiés comme prioritaires, compte tenu des engagements immobiliers que vous avez évoqués. Les locaux provisoires de cette unité seront effectivement installés dans un bâtiment rénové par la commune, que la gendarmerie a pris à bail à compter d'avril 2024. À ce stade, ces locaux ne sont utilisés que quelques jours par semaine. Pour ce qui est des locaux définitifs, le projet immobilier est à l'étude et a vocation à aboutir d'ici à 2028. En tout cas, la détermination du ministère de l'intérieur est totale, l'objectif étant une installation aussi rapide que possible de la brigade à Renescure. (M. Jean-Pierre Bataille fait signe qu'il souhaite intervenir.)
M. le président . Je regrette, monsieur Bataille, le temps de parole est épuisé.
Auteur : M. Jean-Pierre Bataille
Type de question : Question orale
Rubrique : Police
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 janvier 2025