Question écrite n° 122 :
Reconnaissance et indemnisation des pupilles de la Nation et des orphelins

17e Législature

Question de : Mme Sylvie Ferrer
Hautes-Pyrénées (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Mme Sylvie Ferrer attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants sur le fait qu'un certain nombre de pupilles de la Nation et orphelins de guerre sont exclus des décrets n° 2000-657 et n° 2004-751 et de la loi n° 2022-229, n'étant pas victimes d'un des conflits reconnus par ces textes. En effet, ces dispositions prévoient de nombreux droits dont une indemnisation, en guise de réparations reconnues par l'État aux enfants dont un parent est victime des déportations dans le cadre de la Shoah, victime de violences et de déportations durant l'occupation ou les combats de la seconde Guerre Mondiale, ainsi qu'aux enfants de harkis. Pour autant, si l'on se penche sur la loi du 27 juillet 1917 portée par Georges Clémenceau, l'État reconnaît une dette et des droits aux enfants dont les parents sont morts en combattant et en défendant la France. Le décret n° 2000-657, dans son esprit, répare bel et bien une injustice subie par une partie de la population en instaurant une indemnisation, mais le fait qu'elle soit conditionnée à certaines victimes, excluant une part importante des pupilles de la Nation, crée une ségrégation, poursuivie par le décret n° 2004-751 et la loi n° 2022-229. Si la poursuite de l'élargissement des réparations est nécessaire, il est absolument injuste et inconcevable de créer une échelle de douleur subie par les pupilles de la Nation exclues de ces conditions. La Fédération nationale autonome des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre compte 700 membres victimes de la Seconde Guerre mondiale, exclus des dispositifs actuels et qui ont souffert des traumatismes psychologiques et des difficultés engendrées par la guerre tout au long de leur vie. En ce sens, ils revendiquent leur droit à recevoir des réparations de la part de l'État. Il est urgent, au vu de la moyenne d'âge de 83 ans ces membres, de réparer l'injustice commise et de rembourser la dette qu'à l'État à leur égard. Dans l'esprit de la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 visant reconnaître leurs droits aux harkis et à leur descendance, il est nécessaire de réparer l'injustice subie par les pupilles de la Nation et les orphelins de guerre. En conséquence, il apparaît comme nécessaire l'organisation d'un recensement aux niveaux départementaux et nationaux, dans l'objectif de respecter un engagement clair : tous les orphelins et victimes de guerres doivent être pris en charge. Elle demande la création d'un nouveau décret ou d'une loi, pour réparation des préjudices subis par la perte de leur père ou (et) mère « Mort(s) pour la France », reconnus comme tels par le Gouvernement et ne plus être exclus de la loi instaurée en 1917 par Georges Clémenceau. Elle souhaite connaître les perspectives à ce sujet.

Réponse publiée le 3 décembre 2024

La France reconnaît solennellement le sacrifice de toutes celles et de tous ceux qui ont donné leur vie pour elle. Le dispositif prévu pour les pupilles de la Nation et orphelins de guerre, mis en place à partir de 1916 et codifié dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), est fondé sur l'expression de la solidarité de la Nation à l'égard des enfants dont les parents sont morts pour la France, qu'ils soient morts en combattant pour elle ou victimes civiles des combats, des bombardements ou des exécutions d'otages. Cette solidarité est concrète : l'adoption par la Nation oblige la puissance publique avec une prise en charge et un accompagnement pendant la minorité et les études. En 2023, l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) a réalisé 7 987 interventions pour des pupilles de moins de 21 ans ou en études, mobilisant plus de 5,1 millions d'euros. Une priorité est donnée à l'accompagnement des pupilles mineurs dont le nombre a augmenté depuis 2015, passant de 200 à plus de 1 000 pupilles de moins de 21 ans. Tous les orphelins de guerre et pupilles de la Nation demeurent néanmoins ressortissants de l'ONaCVG et peuvent, à ce titre, bénéficier de l'assistance de cet établissement public, dispensée sous la forme d'aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées. En 2023, l'ONaCVG a agréé 1 636 dossiers de demande d'aide financière de pupilles majeurs, pour un montant de plus d'un million d'euros. En 2024, les crédits d'aide sociale de l'ONaCVG consacrés aux pupilles de la Nation et orphelins de guerre majeurs ont augmenté de quatre millions d'euros. S'agissant de l'indemnisation mise en place par les décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale, celle-ci est plus particulièrement destinée aux victimes de la barbarie nazie. Cette dernière renvoie à une douleur tout à fait spécifique. En effet, c'est fondamentalement le caractère insoutenable d'extrême barbarie propre à ces disparitions spécifiques à la Seconde Guerre mondiale, le traumatisme dépassant le strict cadre d'un conflit entre États, ainsi que la complicité du régime de l'État français installé à Vichy, comme l'a rappelé le Président de la République, Jacques Chirac, qui sont à l'origine de ce dispositif réservé aux enfants dont les parents, résistants ou ayant fait l'objet de persécutions antisémites ou raciales, sont décédés en déportation ou ont été exécutés dans les circonstances définies aux articles L. 342-3 et L. 343-5 du CPMIVG. Ce dispositif, qui traduit une certaine responsabilité de l'État français, doit rester fidèle à sa justification essentielle qui est de consacrer solennellement le souvenir des victimes de la barbarie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. Le maintien de cette spécificité a donc été décidé pour ne pas porter atteinte à la cohérence de ces décrets. Quant à l'indemnisation prévue par le décret n° 2022-393 du 18 mars 2022, en application de la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les Harkis, elle consacre le droit à réparation des préjudices subis par les Harkis et leurs familles, du fait de l'indignité de leurs conditions d'accueil en France, après l'indépendance de l'Algérie. Elle est donc sans lien avec la question des pupilles de la Nation et des orphelins de guerre.

Données clés

Auteur : Mme Sylvie Ferrer

Type de question : Question écrite

Rubrique : Anciens combattants et victimes de guerre

Ministère interrogé : Armées et anciens combattants (MD)

Ministère répondant : Armées et anciens combattants (MD)

Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 3 décembre 2024

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