Il ne faut pas ouvrir la boîte de Pandore de l'article 55 de la loi SRU
Question de :
M. Ugo Bernalicis
Nord (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Ugo Bernalicis alerte Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine sur la dangerosité d'une éventuelle inclusion des logements locatifs intermédiaires (ci-après dénommés « LLI ») à destination des classes moyennes dans la part obligatoire de logements sociaux que doivent compter les communes en vertu de l'article 55 de la loi solidarité et renouvellement urbain (ci-après dénommée « loi SRU »). L'article 55 de la loi SRU impose aux communes de plus de 3 500 habitants et aux intercommunalités de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants de disposer d'un nombre minimum de logements sociaux, proportionnel à leur parc de résidences principales, de 25 % ou 20 % selon certains critères. Parallèlement, ce dispositif soumet les communes ne satisfaisant pas cet objectif à un prélèvement sur leurs ressources fiscales et leur impose de s'engager dans un plan de rattrapage. Le périmètre de la « loi SRU » touche aujourd'hui 2 100 communes en France. M. le député sait qu'une part des logements sociaux en France est occupée par des foyers qui ne sont pas en mesure de se loger dans le parc privé du fait des prix des loyers, mais dont les ressources dépassent les plafonds leur permettant de se loger dans le parc social et versent donc un surloyer de solidarité. Pour autant, M. le député craint que ce phénomène soit utilisé pour justifier l'inclusion des LLI dans la part des logements sociaux des communes, comme cela a pu être relevé dans plusieurs médias. À ce titre, il rappelle que des acteurs importants du logement social tels que l'Union sociale pour l'habitat, la Fondation Abbé Pierre ou l'association Ville et banlieue rejettent cette éventuelle mesure au motif qu'elle ne permettra pas de régler le retard pris pour la construction de logement social et qu'elle renforcera davantage la ségrégation territoriale. Par ailleurs, il est à noter que seuls 3 % des 2,6 millions de personnes en attente d'un logement social sont éligibles au LLI au regard du niveau de revenu requis. M. le député réitère que l'instauration de cette mesure profiterait davantage aux communes qui n'ont pas respecté la « loi SRU », prônant ainsi une logique de non-respect d'une loi dont l'objectif était d'endiguer les dynamiques ségrégatives sur le territoire national. La Fondation Abbé Pierre rappelle à ce titre dans son rapport de 2023 que 64 % des communes ne respectent pas les objectifs imposés pour la période 2020-2023. M. le député alerte donc Mme la ministre sur les conséquences qu'une telle mesure pourrait avoir et l'appelle à ne pas engager le Gouvernement dans une dynamique de fragilisation de la « loi SRU » à l'heure où la France vit une crise du logement sans précédent comme le démontre le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre sur l'état du mal logement en France. Il souhaite connaître ses intentions à ce sujet.
Réponse publiée le 18 mars 2025
Les obligations de production de logements sociaux constituent le cœur de l'article 55 de la loi SRU et demeurent un pilier fondamental des politiques du logement et de la mixité sociale portées par le Gouvernement. Depuis plus de vingt ans, ce dispositif participe pleinement à la démarche de développement d'une offre sociale répartie équitablement sur l'ensemble des territoires où le besoin est avéré, renforçant d'ailleurs leur attractivité. Ces obligations imposent aux communes de plus de 3 500 habitants (1 500 dans l'unité urbaine de Paris) comprises dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et/ou une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, une part de logements locatifs sociaux représentant 20 % à 25 % de résidences principales, selon le niveau de tension sur la demande de logement social du territoire. Ne sont pas intégrés à cette définition les logements intermédiaires, notamment le logement locatif intermédiaire dit « institutionnel » visé à l'article 279-0 bis A du code général des impôts. En effet, si le logement locatif intermédiaire constitue un produit abordable qui participe directement à l'accès au logement des classes moyennes, il n'est pas assimilé au segment social au sens des obligations de la loi SRU. Le Gouvernement est attaché au développement du logement locatif intermédiaire, qui doit permettre d'ouvrir le parcours résidentiel des ménages logés dans le parc social. Néanmoins, ce développement ne doit pas se faire au détriment de l'offre locative social, à destination des ménages les plus modestes. Le gouvernement n'entend donc pas remettre en cause l'équilibre générale du dispositif SRU, modifié en 2022 dans le cadre de la loi dite 3DS. Les dernières évolutions, qui vont dans le sens d'un dialogue plus apaisé entre d'État et les communes, devront être évalués sur une période triennale pleine avant de rouvrir des débats structurants sur le dispositif.
Auteur : M. Ugo Bernalicis
Type de question : Question écrite
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Logement et rénovation urbaine
Ministère répondant : Logement
Dates :
Question publiée le 22 octobre 2024
Réponse publiée le 18 mars 2025