Question orale n° 126 :
Éducation affective et sexuelle

17e Législature

Question de : M. Roger Chudeau
Loir-et-Cher (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Roger Chudeau interroge Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur son intention de publier prochainement le programme d'« éducation à la vie affective et sexuelle ». Mme Genetet, ancienne ministre de l'éducation nationale, déclarait lors de la passation de pouvoir : « l'école est malade ». Chacun sait l'état préoccupant du système éducatif français. Et pourtant, dans ce contexte, Mme la ministre estime que la priorité revient à la publication du programme d'éducation à la vie affective et sexuelle applicable de la maternelle à la terminale. Quelles sont exactement ses priorités pour redresser le système éducatif ? M. le député considére qu'il est certes utile et nécessaire de dispenser aux élèves, à partir du CM2 ou du collège, une information préventive visant à les prémunir des risques et des dangers que comporte la vie sexuelle : MST, viols, mutilations, pornographie notamment. Mais il conteste qu'il soit de la responsabilité de l'État d'assurer l'éducation sexuelle des enfants. Ceci relève selon M. le député de la sphère privée, intime, et de la fonction éducatrice de la famille. De plus, cette « éducation » serait dispensée, comme aujourd'hui, par des associations qui n'ont ni la compétence scientifique, ni le savoir-faire pédagogique, ni la légitimité institutionnelle requise pour assurer cette délicate mission de service public. M. le député estime qu'une information de cette nature ne peut être assurée que par des professionnels (médecins, infirmières, psychologues) des ministères de l'éducation ou de la santé, ou par des professeurs, ou des CPE dument formés et qualifiés à cette fin. Il considére aussi qu'une information de cette nature ne peut être diffusée auprès d'enfants trop jeunes pour la recevoir utilement. Il lui demandons donc si elle va rectifier dans ce sens le programme élaboré par le Conseil supérieur des programmes et modifier dans ce sens l'article L. 312-16 du code de l'éducation.

Réponse en séance, et publiée le 5 février 2025

ÉDUCATION SEXUELLE
M. le président . La parole est à M. Roger Chudeau, pour exposer sa question, no 126, relative à l'éducation sexuelle.

M. Roger Chudeau . Ma question porte sur la publication prochaine du programme relatif à l'éducation, à la vie affective relationnelle et sexuelle.

Madame Genetet, brièvement ministre de l'éducation nationale, déclarait à Mme Borne, lors de la passation de pouvoir : « L'école est malade. » Chacun sait en effet dans quel état préoccupant se trouve notre système éducatif. Le niveau moyen de nos élèves est médiocre : 50 % des élèves entrant en sixième ne maîtrisent pas la lecture fluide ; 25 % des jeunes de 17 ans éprouvent des difficultés de lecture aux journées défense et citoyenneté ; le niveau de culture générale de nos lycéens s'effondre ; 50 % des bacheliers échouent en première année d'études supérieures ; les diplômes sont dévalorisés ; l'autorité des maîtres est quotidiennement contestée, y compris par des élèves et des parents sous emprise islamiste ; la fonction enseignante connaît une grave désaffection – les concours de recrutement du premier degré et du Capes, le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré, ne permettent plus le recrutement, ni quantitatif ni qualitatif, indispensable au renouvellement du corps enseignant.

Pourtant, dans un tel contexte, le ministère de l'éducation nationale estime que la priorité revient à la publication du programme d'éducation à la vie affective et sexuelle, applicable de la maternelle à la terminale. Quelles sont donc exactement ses priorités pour redresser notre système éducatif ?

Il est certes utile et même nécessaire de dispenser aux élèves à partir du CM2 ou du collège une information préventive visant à les prémunir des risques, voire des dangers, que comporte la vie sexuelle – maladies sexuellement transmissibles, viols, mutilations, pornographie notamment. Mais je conteste qu'il soit de la responsabilité de l'État d'assurer l'éducation sexuelle des enfants. Celle-ci relève, selon nous, de la sphère privée, intime, de la fonction éducative de la famille.

De plus, cette « éducation » serait dispensée, comme aujourd'hui, par des associations qui n'ont ni la compétence scientifique, ni le savoir-faire pédagogique, ni la légitimité institutionnelle requis pour assurer cette délicate mission de service public.

Nous estimons qu’une information de cette nature ne peut être assurée que par des professionnels des ministères de l’éducation ou de la santé – médecins, infirmières, psychologues –, par des professeurs, ou par des conseillers principaux d'éducation (CPE) dûment formés et qualifiés à cette fin.

Nous considérons également qu’une information de cette nature ne peut être diffusée auprès d’enfants trop jeunes pour la recevoir utilement.

Nous vous demandons donc de rectifier dans ce sens le programme élaboré par le Conseil supérieur des programmes, et de modifier en ce sens l’article L. 312-16 du code de l’éducation.

M. le président . La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi . Je tiens à excuser l'absence de Mme Élisabeth Borne, en déplacement avec le président de la République à l'occasion de la Journée mondiale contre le cancer. L'enseignement supérieur et la recherche sont en effet des acteurs mobilisés contre cette maladie.

Vous posez une question essentielle, dont je vous remercie. L'éducation à la vie affective et sexuelle n'est ni un gadget ni un caprice. C'est une nécessité – avis que nous partageons avec les membres du Conseil supérieur de l'éducation qui ont adopté ce programme à l'unanimité, faut-il le rappeler, le 30 janvier dernier.

Quand un enfant est victime de violences sexuelles toutes les trois minutes, quand un enfant sur trois est exposé à la pornographie à un très jeune âge, vous l'avez rappelé, soit avant 12 ans, l'école ne peut détourner le regard. On connaît également la prévalence, dans chaque classe, d'enfants victimes de violences sexuelles intrafamiliales.

Aussi cet enseignement ne concurrencera-t-il pas les savoirs fondamentaux mais les renforcera : un élève en insécurité est un élève qui va mal et qui par conséquent apprend mal ou n'apprend pas. Soyons clairs : il ne s'agit absolument pas de remplacer les familles qui sont en première ligne sur ces questions mais de donner aux élèves les outils pour se protéger mais aussi pour respecter les autres ; il s'agit d'éduquer, d'expliquer avec des mots adaptés à chaque âge ce que sont le consentement, le respect, l'égalité entre les filles et les garçons ainsi que les limites à apporter quant à son propre corps vis-à-vis des adultes ; il s'agit enfin de lutter contre le harcèlement, les violences, les stéréotypes qui, nous le savons tous, se développent dès le plus jeune âge.

Pour ce qui est des contenus, ils seront encadrés et progressifs, adaptés à l'âge et à la maturité des élèves. À l'école primaire, il ne sera ainsi absolument pas question de sexualité. On parlera de relations, d'émotions, de limites – on dira par exemple que ça n'est pas OK quand un adulte vous touche les cheveux alors que vous ne le souhaitez pas. Au collège et au lycée, en revanche, on abordera les sujets avec sérieux et responsabilité pour informer, prévenir et protéger. Les professeurs concernés y seront formés, des personnels médicaux et éducatifs pourront les accompagner et toutes les associations intervenantes seront agréées et encadrées.

M. le président . Merci de bien vouloir conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre . Nous voulons des élèves sereins, protégés et épanouis. C'est le rôle de l'école.

Données clés

Auteur : M. Roger Chudeau

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 janvier 2025

partager