Explosion du trafic de drogue dans les villes de taille moyenne
Question de :
Mme Marie-France Lorho
Vaucluse (4e circonscription) - Rassemblement National
Mme Marie-France Lorho interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les effets de l'explosion du trafic de drogue, notamment dans les villes de taille moyenne. Dans l'analyse de la « Géographie de la délinquance à l'échelle communale en 2023 », le service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) a fait état de l'essor alarmant du trafic de stupéfiants, notamment dans les villes de taille moyenne. Mme la députée s'inquiète des effets de l'essor d'un tel trafic : dans sa circonscription de Vaucluse, la ville d'Orange serait ainsi la ville moyenne qui a subi la plus forte explosion du trafic de drogue depuis 2017 (+ 575 %). Mme la députée regrette l'insuffisance des moyens dont bénéficient les services de police pour lutter contre un tel fléau. Elle lui demande quelles dispositions il compte mettre en œuvre pour endiguer cette accélération massive du trafic de stupéfiants et quels moyens il entend déployer pour que les services de police puissent être aptes à le freiner.
Réponse en séance, et publiée le 5 février 2025
TRAFIC DE DROGUE
M. le président . La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, no 127, relative au trafic de drogue.
Mme Marie-France Lorho . Le trafic de drogue n’est plus l’apanage des grandes villes. Face à la saturation des métropoles, les trafiquants de drogue ont trouvé de nouveaux débouchés à leur commerce : depuis quelques années, les villes de taille moyenne connaissent une inflation particulièrement inquiétante des trafics, qui engendre une insécurité et des violences dues aux règlements de compte qui les accompagnent.
De l’apparition de points de deal, qui deviennent des zones de non-droit, à la création de planques contenant de la drogue et des armes particulièrement dangereuses, les effets d’un tel essor du trafic sont une menace insupportable pour le quotidien des Français. Cette progression les affecte d’ailleurs tout particulièrement, puisqu’elle encourage l’ouverture du marché à de nouveaux consommateurs : le dernier rapport de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, publié en janvier 2025, rend ainsi compte d'une montée inquiétante de la consommation de substances illicites parmi les adultes.
Cette expansion du trafic de drogue est un fléau, auquel les petites villes et les cités de taille moyenne n’ont pas toujours les moyens de répondre. En Vaucluse, dans ma circonscription, Orange serait, d'après Le JDD – Le Journal du dimanche –, la ville moyenne ayant subi la plus forte explosion du trafic de drogue depuis 2017. La circonscription voisine, Carpentras notamment, n’est pas épargnée.
Il nous faut répondre à cette progression rapide du trafic. Nos services de police, que je félicite par ailleurs pour leur travail de lutte acharnée contre ce fléau, doivent bénéficier d’un renforcement considérable de leurs moyens. Eu égard aux nouveaux artifices qu'utilisent les trafiquants, notamment des messageries cryptées souvent hors d’atteinte des forces de l’ordre, il est urgent de repenser les mesures de notre défense.
Quelles dispositions comptez-vous prendre pour endiguer cette accélération massive du trafic de stupéfiants et quels moyens comptez-vous déployer pour que les services de police soient aptes à le freiner ?
M. le président . La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur . La question que vous posez est désormais fondamentale pour notre société et pour nos compatriotes. Tout le monde a pris conscience de l'ampleur du narcotrafic et de ses conséquences ; à l'exception de ceux qui font preuve de mauvaise foi, il y a maintenant une forme de consensus pour considérer qu'il s'agit d'un fléau dont l'enjeu est national, à tel point que sur le fondement du rapport très complet rédigé par les sénateurs Étienne Blanc et Jérôme Durain, une proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic a été déposée au Sénat, qui l'a examinée la semaine dernière et la votera cet après-midi.
Elle permettra de donner à nos services de police des moyens techniques d'enquête de très haut niveau – de nature comparable à ceux employés pour lutter contre le terrorisme. Elle contient, outre la création d'un nouveau parquet national, d'autres mesures importantes dont il est peu question, comme la réforme du statut des repentis, dont l'utilité peut être considérable.
Cette réponse générale, qui montre à quel point le gouvernement est mobilisé pour lutter contre le fléau du narcotrafic, doit être complétée par un point sur la situation de votre territoire. Vous avez rappelé que les communes de votre département sont la cible de ces trafics, mais il faut préciser que plus de 220 policiers œuvrent en filière judiciaire dans le Vaucluse ; au-delà, la direction interdépartementale de la police nationale du Vaucluse s'appuie sur plus de 700 policiers, contre 598 – à périmètre égal – fin 2016.
En 2024, nos forces ont mené dans le Vaucluse 794 opérations visant au démantèlement de points de deal. Le résultat est net : leur nombre a baissé de près de moitié, de 43 % dans tout le département et de 80 % à Orange, où il n'en reste plus qu'un, contre cinq auparavant. Quelque 400 kilos de drogues ont été saisis dans le département et les efforts se poursuivent.
Il ne faut rien lâcher, évidemment. Un chiffre est parfois évoqué : une augmentation de 575 %, qui correspond au nombre d'individus mis en cause à Orange pour trafic de stupéfiants, soit 16 en 2017 et 108 en 2023. Il faut souligner que les données en matière d'infractions à la législation sur les stupéfiants témoignent avant tout d'un travail d'initiative, et donc en réalité de l'engagement accru, positif et puissant, de la police nationale.
Cela dit, il ne faut pas s'arrêter là. Il est parfaitement légitime d'aller encore plus loin en mobilisant les services concernés mais aussi en prenant en compte les consommateurs : l'ensemble de la population doit prendre conscience de l'existence de ce fléau mais aussi se rendre compte que le simple fait de consommer constitue en soi une forme « d'appel d'air » pour ce marché des stupéfiants, qui est un marché mondial n'épargnant aucun de nos territoires. Gageons que les moyens juridiques qui seront mis à disposition de nos services de police pour les enquêtes, renforcés par les effectifs et le travail du quotidien, nous permettront de mener une lutte sans merci contre ce phénomène, singulièrement dans votre département.
M. le président . La parole est à Mme Marie-France Lorho.
Mme Marie-France Lorho . Je vous remercie pour votre réponse. Peut-être pourrions-nous aussi augmenter les peines pour les trafiquants,…
M. François-Noël Buffet, ministre . Oui, bien sûr !
Mme Marie-France Lorho . …et introduire des peines planchers pour les jeunes qui chouffent en bas des cités.
Auteur : Mme Marie-France Lorho
Type de question : Question orale
Rubrique : Drogue
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 janvier 2025