Colère des agriculteurs et nécessité de règlement d'urgence des dossiers FEADER
Question de :
M. Éric Michoux
Saône-et-Loire (4e circonscription) - UDR
M. Éric Michoux appelle l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la colère des agriculteurs. Plusieurs manifestations ont déjà eu lieu dans les régions de France, notamment à Dijon, pour dénoncer les retards de traitement des dossiers liés au versement du Fonds européen agricole pour le développement rural. En Bourgogne, 3 444 dossiers sont en attente d'attribution de financements européens via la région, rien que pour la Bourgogne. Force est de constater que plusieurs promesses gouvernementales, en lien avec les dernières manifestations, n'ont pas été tenues. La grande simplification des normes agricoles n'a pas eu lieu. Les agriculteurs français continuent d'avoir des revenus qui stagnent ou diminuent, condamnés à une concurrence extraterritoriale inéquitable, à des accords commerciaux déloyaux, à une détérioration des conditions de retraite, etc. À ceci s'ajoutent des épisodes climatiques extrêmes qui ravagent les récoltes et des crises sanitaires mettant en péril les ovins et les volailles. L'avenir de la profession est menacé. Il souhaite savoir si le Gouvernement peut se mobiliser à remplir leurs obligations envers les agriculteurs. Il souhaite connaître le calendrier parlementaire visant à enfin légiférer sur la situation des paysans afin d'assurer à la France une souveraineté alimentaire.
Réponse publiée le 21 janvier 2025
La loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), et notamment son article 78 modifié par l'ordonnance n° 2022-68 du 26 janvier 2022 a confié aux régions qui le souhaitaient la gestion des aides non surfaciques du second pilier de la politique agricole commune (PAC). La région Bourgogne-Franche-Comté est donc, en tant qu'autorité de gestion régionale, responsable de la bonne gestion des dossiers concernés, et il en est de même pour les dossiers qui relèvent de la programmation 2014-2022, au cours de laquelle la région était également autorité de gestion du fonds européen agricole pour le développement rural. Depuis l'automne 2021, les services de l'État, en administration centrale comme dans les territoires, ont travaillé en lien étroit avec ceux des régions pour que le transfert de compétences prévu se réalise dans les meilleures conditions. À ce jour, la situation peut être qualifiée de normale dans la plupart des régions. Les difficultés rencontrées par la région Bourgogne-Franche-Comté dans la prise en charge des dossiers font l'objet d'une attention particulière des services de l'État. Ainsi, le préfet de région a demandé aux directions départementale des territoires (DDT) de reprendre, dès juin 2023, l'instruction de 211 dossiers du dispositif plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles de la programmation 2014-2022, répartis sur l'ensemble des départements de la région. Par la suite, face à ses difficultés persistantes, la région a demandé un appui supplémentaire de l'État, demande relayée par les professionnels. Cela a abouti à la reprise par l'État de près de 600 dossiers supplémentaires qui a nécessité un renforcement des effectifs des DDT. Il s'agit d'une intervention exceptionnelle de l'État en réponse à la détresse des agriculteurs en attente de paiement. Par ailleurs, pour les agriculteurs ayant besoin d'un appui en termes de trésorerie supplémentaire, le Gouvernement a mis en place deux types d'aide sous forme de prêts, distribués par les banques qui souhaitent participer au dispositif. Une première aide vise à accompagner les agriculteurs qui traversent des difficultés conjoncturelles, du fait d'aléas climatiques ou sanitaires. Elle prendra la forme des prêts de moyen terme (deux à trois ans). Grâce à un effort partagé entre la banque prêteuse et l'État, le coût de ce prêt diminuera significativement pour les agriculteurs, pour atteindre des taux d'intérêt maximums de 1,75 % pour un prêt de 24 mois et 2,35 % pour un prêt de 36 mois. Une bonification supplémentaire sera octroyée aux jeunes installés depuis moins de cinq ans. Le montant de ce prêt sera plafonné à 50 000 euros (€) par exploitation. Seront éligibles à cette aide les agriculteurs ayant perdu au moins 20 % de leur chiffre d'affaires en 2024 par rapport à leur moyenne historique de référence, et qui ont activé au moins 60 % du montant de leur épargne de précaution, pour ceux qui en détiennent une. Les agriculteurs ne détenant pas d'épargne de précaution seront bien éligibles au dispositif, sous réserve du respect du critère de perte de chiffre d'affaires. Les premiers prêts seront délivrés par les banques d'ici la fin de l'année 2024. Une seconde aide permettra de soutenir les agriculteurs qui traversent des difficultés plus structurelles du fait, par exemple, de l'impact du changement climatique. Celle-ci prendra la forme de prêts de consolidation à long terme (maximum douze ans), octroyés par les établissements bancaires, adossés à une garantie publique. Cette garantie sera déployée par Bpifrance à travers un dispositif nouvellement créé dédié aux agriculteurs, dont le pourcentage de couverture sera de 70 % du montant du prêt, et dont le coût sera remboursé par l'État. Le montant de ce prêt sera plafonné à 200 000 €. Ce nouveau dispositif de garantie doté par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sera opérationnel début 2025. Ainsi, grâce à cette garantie, l'État facilitera l'accès au crédit pour les agriculteurs faisant face à des situations difficiles. En complément, chaque banque s'engagera à faire un effort sur les conditions financières pour en minimiser le coût pour le bénéficiaire. Seront éligibles à cette aide structurelle les agriculteurs dont le taux d'endettement global est supérieur à 50 %, ou dont le rapport excédent brut d'exploitation/chiffre d'affaires est inférieur à 25 %. Afin de mesurer le bon déploiement des deux dispositifs mis en place, le comité des financeurs publics sous l'égide du préfet assurera un suivi régulier en lien avec les établissements bancaires. Par ailleurs, de manière générale, le paiement des aides de la PAC, assuré par les services de l'État, constitue une contribution majeure au résultat des exploitations, à leur rentabilité et à leur pérennité. À cet égard, le versement du solde des aides de la PAC 2024 a été versé sur le compte des agriculteurs à partir du 4 décembre 2024. Il concerne les aides découplées (aide de base au revenu, aide redistributive complémentaire au revenu, écorégime et aide complémentaire au revenu pour les jeunes agriculteurs), une partie des aides couplées animales (aides ovines et caprines, aide aux petits ruminants en Corse), ainsi que l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN). Le solde de la prime aux petits ruminants dans les départements d'outre-mer et les avances de l'aide au développement et au maintien de cheptel allaitant (ADMCA), de la prime à l'abattage des bovins (PAB), ainsi que des aides Mayotte (aide de base et majorations) ont été également versés. Ce versement du solde représentent un montant total de plus de 2 milliards d'euros. Compte-tenu des avances déjà versées depuis mi-octobre 2024, ces paiements portent le montant total alloué aux exploitants agricoles à 7,02 milliards d'euros au titre de la campagne PAC 2024 ; ils concernent à ce jour 99,6 % des bénéficiaires. Les prochains versements, en particulier le solde de l'aide bovine et les aides couplées végétales, s'étaleront sur le 1er trimestre 2025, comme chaque année. Enfin, la souveraineté alimentaire constitue une préoccupation constante de ce Gouvernement : les autorités françaises travaillent à renforcer celle-ci, tant au niveau national qu'au niveau européen, et portent également cet objectif dans les échanges internationaux. Par ailleurs, en sus des mesures prises depuis la crise du covid-19 et de celles prises dans le contexte de la guerre en Ukraine (notamment, l'élaboration d'un plan de résilience agricole et agroalimentaire, ainsi que le lancement de plans de souveraineté pour plusieurs filières (protéines végétales, élevage, fruits et légumes…), le projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture, dont l'examen sera repris début 2025, vise justement à renforcer la souveraineté alimentaire de la France. Ainsi, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour apporter des réponses concrètes, précises et opérationnelles aux difficultés que rencontrent les exploitations agricoles.
Auteur : M. Éric Michoux
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 21 janvier 2025