Question de : M. Alexandre Loubet
Moselle (7e circonscription) - Rassemblement National

M. Alexandre Loubet appelle l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur le fait qu'il n'a jamais été répondu aux demandes de clarification, maintes fois répétées par le sénateur honoraire de la Moselle Jean-Louis Masson, concernant le régime dit du « bois bourgeois » en vigueur dans les communes de l'ancien comté de Dabo. Ce droit séculaire autorise les descendants mâles de chaque famille historiquement implantée dans le comté à percevoir chaque année un lot de sapins ou de résineux provenant des forêts domaniales. Ce droit tire son origine des ordonnances forestières des comtes de Linange, dont celle de 1613 qui codifie en 23 articles les droits d'usage. Ces droits ont été confirmés en 1905 par la cour d'appel de Colmar puis par la cour d'appel de Leipzig. Dans la mesure où seuls les descendants masculins peuvent hériter de ce droit dit « bois bourgeois », il lui demande s'il n'y a pas là une violation du principe constitutionnel d'égalité entre les hommes et les femmes.

Réponse publiée le 1er juillet 2025

Les droits d'usage forestiers sont une survivance du droit féodal : les seigneurs avaient accordé sur leurs terres, par contrat, des droits à des communautés d'habitants, à certaines conditions. Ils constituent une exception au droit de propriété. Cette exception fait l'objet d'une interprétation restrictive, sans laquelle la situation du titulaire du droit de propriété serait insécurisée. L'article L. 241-2 du code forestier prévoit que ne sont admis à exercer un droit d'usage quelconque, dans les bois et forêts de l'État, que ceux dont les droits étaient le 31 juillet 1827 reconnus fondés soit par des actes du Gouvernement, soit par des jugements ou arrêts définitifs ou reconnus comme tels. Le code forestier exclut, depuis 1827, toute possibilité de reconnaître de nouveaux droits d'usage dans les bois et forêts de l'État. Il y a lieu de penser que le régime de droit « au bois bourgeois » répond aux conditions précitées et, en conséquence, doit être considéré comme un droit d'usage au sens de l'article susmentionné. En tout état de cause, les droits d'usage doivent respecter le cadre juridique dans lequel ils s'inscrivent, en particulier le bloc de constitutionnalité et les dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces textes prohibent toute discrimination fondée sur le sexe pour les droits qu'ils reconnaissent et pour leur jouissance. En cas de différence de traitement entre les hommes et les femmes, les organes chargés du contrôle du respect des textes doivent notamment s'assurer que cette différence est objectivement justifiée, qu'elle répond à un intérêt général et qu'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et l'objectif visé. Dans le cas d'espèce, si le droit d'usage a pu être justifié par un intérêt général (repeuplement de territoires) lors de son octroi, la différence de traitement entre hommes et femmes qu'il institue ne saurait désormais être regardée comme une justification raisonnable ou objective. Dans le cas d'espèce, si le droit d'usage a pu être justifié par un intérêt général (repeuplement de territoires) lors de son octroi, la différence de traitement entre hommes et femmes qu'il institue ne saurait désormais être regardée comme une justification raisonnable ou objective. Le Gouvernement est pleinement investi pour l'égalité entre les femmes et les hommes et va étudier les voies et moyens de faire évoluer ce régime manifestement contraire aux principes constitutionnels. Plusieurs options sont déjà à l'étude en ce sens et devront être partagées avec les acteurs locaux.

Données clés

Auteur : M. Alexandre Loubet

Type de question : Question écrite

Rubrique : Bois et forêts

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 1er juillet 2025

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