Question de : M. Sylvain Carrière
Hérault (8e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Sylvain Carrière interroge Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques sur le traitement des épaves de bateau dans les canaux gérés par les Voies navigables de France (VNF). Récemment, le club de rames de Frontignan, « Muscat Rames », a interpellé M. le député sur les nombreuses épaves de bateau, au moins huit, présentes dans le canal du Rhône à Sète. Celles-ci perturbent les activités du club nautique mais ont surtout un impact sur la santé du cours d'eau et sa biodiversité avec les fuites de matériaux (peinture, huiles et métaux lourds) et ce sans parler des risques sanitaires sur l'homme. En effet, l'Hérault est très touché par la recrudescence du moustique tigre, aedes albopictus, qui est porteur de maladies, et ces épaves en partie émergées peuvent devenir des gîtes permettant la reproduction du moustique. Et ce sans parler des risques sur la santé des crustacés, ce qui impacte directement la filière conchylicole, déjà aux prises avec les norovirus. La gestion des épaves de bateau abandonnées est une compétence qui n'est pas simple à gérer tant elle fait intervenir une multitude d'acteurs : les usagers, VNF, l'éventuel propriétaire, le tribunal, la préfecture et les communes concernées. En effet, dans le cas où une épave est trouvée, c'est à VNF de contacter le propriétaire qui doit s'occuper de l'enlèvement du recyclage du bateau. Mais de nombreux bateaux abandonnés ne possèdent aucun moyen d'identification ou des propriétaires décédés. S'ensuit alors une longue procédure qui vise à déterminer à qui appartient le bateau, à qui appartient la responsabilité de le déplacer, c'est-à-dire qui va payer pour effectuer le nettoyage. La durée de cette procédure dépend de la dangerosité de l'épave. Plus elle est factrice de risques avérés sur la navigation, à forts enjeux économiques (transport par péniches), plus elle sera enlevée rapidement. Des associations existent afin de prendre en charge les bateaux épaves enlevés et de les traiter pour les recycler au maximum ; cependant, elles n'agissent qu'une fois le bateau sorti de l'eau, ce qui est de la compétence de VNF mandaté par la préfecture. Vient alors se poser la question du budget et des moyens alloués pour l'accomplissement de ces tâches, malheureusement bien trop longues pour la logistique nécessaire à l'enlèvement des épaves et le danger qu'elles représentent. Ces contraintes nuisent fortement à l'enlèvement des épaves. La longueur des procédures, l'inadéquation entre les moyens et la recrudescence du phénomène d'abandon des bateaux ainsi qu'une non-connaissance fine de l'impact environnemental de ces épaves sur les cours d'eau sont donc des obstacles à leur propreté. À l'heure où les politiques publiques sont à une purification des principales rivières du pays, comme la Seine pour les jeux Olympiques 2024, des mesures fortes s'imposent sur l'ensemble des cours d'eau. Ainsi, il lui demande ce qu'elle compte engager dans ce sens, afin de réduire drastiquement le nombre de bateaux épaves dans les cours d'eau gérés par les VNF et rétablir ainsi un équilibre entre les hommes et la nature dans les rivières, fleuves et canaux français.

Réponse publiée le 29 juillet 2025

La situation des épaves de bateaux sur les canaux confiés aux gestionnaires des voies d'eau, dont Voies Navigables de France (VNF) ou la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), est un sujet qui renvoie, sur le terrain, à différentes réalités pratiques et qui ne peuvent être traitées de façon unique et uniforme. De manière générale, sauf à commettre notamment une voie de fait, les gestionnaires des voies d'eau ne peuvent se substituer librement au propriétaire privé sans avoir été, préalablement, autorisé à agir. De surcroit, en tant qu'établissements publics, les opérateurs ne peuvent agir que dans les limites strictes de leur principe de spécialité. En particulier, ce sont, par exemple, le maire de la commune concernée et le service départemental d'incendie et de secours qui sont compétents en matière de secours d'urgence et de sauvetage de bateaux échoués. Ce n'est en conséquence qu'en dernier recours, que les gestionnaires de la voie d'eau peuvent mobiliser la procédure prévue à l'article L. 1127-3 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P). Dans ce cadre, le préfet compétent prend un arrêté constatant l'abandon du bateau ou engin flottant sur le domaine public fluvial et transférant sa propriété, donc sa responsabilité au gestionnaire de la voie d'eau qui procède - à ses frais - à son déchirage, ce qui induit une charge notamment budgétaire importante pour ces gestionnaires. Par ailleurs, une décision du Conseil Constitutionnel du 6 juin 2025 déclare conforme à la Constitution, avec réserve, les dispositions de l'article L. 1127-3 du CG3P suscité. Le Conseil considère que le dispositif ne méconnaît pas le droit de propriété avec une réserve quant à la méconnaissance du principe de l'inviolabilité du domicile. Il énonce que ces dispositions ne sauraient "être interprétées comme autorisant le gestionnaire du domaine public fluvial à procéder à la destruction d'un tel bien sans tenir compte de la situation personnelle ou familiale de l'occupant, lorsqu'il apparaît que ce dernier y a établi son domicile.". Enfin, le décret n° 2023-1144 du 6 décembre 2023 relatif à la gestion des déchets de navires et de bateaux de plaisance ou de sport et à la responsabilité élargie de leurs producteurs prévoit que les fabricants doivent participer financièrement à la destruction de ces bateaux. Le code de l'environnement, précise que l'épave ainsi définie constitue un bien meuble abandonné et donc un déchet. Ces différents outils permettent d'obtenir des résultats, même si les délais sont longs, les coûts importants, avec une complexité technique parfois associée, et un nombre d'épaves important. En complément, afin de guider les propriétaires, il existe depuis 2009 l'Association pour la plaisance éco-responsable qui est un éco-organisme national, chargé de la responsabilité élargie des producteurs de bateaux et agréé par le ministère chargé de la transition écologique pour gérer la déconstruction et le recyclage des bateaux de plaisance et de sport.

Données clés

Auteur : M. Sylvain Carrière

Type de question : Question écrite

Rubrique : Cours d'eau, étangs et lacs

Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques

Ministère répondant : Transports

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 29 juillet 2025

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