Prise en charge des frais kilométriques des infirmières/infirmiers en ruralité
Question de :
Mme Marie Pochon
Drôme (3e circonscription) - Écologiste et Social
Mme Marie Pochon interroge M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur la prise en charge des frais kilométriques des infirmières et infirmiers en milieu rural. Les professionnels de santé exerçant en milieu rural, et plus particulièrement les infirmiers et infirmières, font face à des défis considérables liés à la pénibilité de leur métier et à leur mobilité. En effet, ces professionnels assurent des soins à domicile sur de longues distances, souvent dans des zones peu denses ou difficiles d'accès, ce qui engendre des frais kilométriques importants ainsi que des temps passés sur la route et non en consultation, qui sont peu pris en compte. Ces longs déplacements sont toutefois indispensables pour garantir l'accès aux soins, dans les territoires ruraux, de certains habitants parfois très isolés pour qui la venue d'infirmiers à domicile est tout simplement essentielle. Encore aujourd'hui, du fait du manque d'accès aux soins, l'espérance de vie des habitants des territoires ruraux est de deux ans plus courte que la moyenne. Au pôle sanitaire et médico-social de Curnier par exemple, les aides à domicile et personnels infirmiers sont amenés à parcourir en moyenne 90 km/jour et jusqu'à 200 km/jour pendant les week-ends. Par ailleurs, les infirmières et infirmiers bénéficient d'une enveloppe limitée en ce qui concerne le remboursement de ces frais. Ce système ne permet pas de garantir un remboursement suffisant pour couvrir l'intégralité des déplacements nécessaires à l'exercice de leur profession. Cette enveloppe, par exemple à La-Chapelle-en-Vercors ou dans le Royans, est fréquemment épuisée pour les infirmiers opérant dans le secteur dès le milieu de matinée, contraignant ceux-ci à assumer par eux-mêmes des frais de déplacement importants pour continuer à assurer leurs tournées et l'accès aux soins de toutes et tous, ou à privilégier des déplacements les moins éloignés aux dépens des personnes vivant dans les villages isolés. En outre, la profession d'infirmière et d'infirmier est particulièrement marquée par la rotation importante des professionnels en raison de la pénibilité du travail et des conditions d'exercice. Il faut se rendre compte : la moyenne de la durée d'exercice du métier d'infirmier à domicile dans la Drôme est de cinq ans. Face à cette situation, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement envisage pour garantir aux infirmières et infirmiers en milieu rural le fait que chacun de leur kilomètre soit pris en charge, considérant l'importance des temps de déplacements sur des routes parfois montagneuses ou sinueuses, impactant le nombre d'actes qu'ils et elles peuvent effectuer, créant un déséquilibre entre professionnels en milieu urbain et rural ; et ainsi garantir l'accès aux soins pour tous les compatriotes, quel que soit leur code postal.
Réponse en séance, et publiée le 19 février 2025
PRISE EN CHARGE DES FRAIS DE DÉPLACEMENT DES INFIRMIERS
Mme la présidente . La parole est à Mme Marie Pochon, pour exposer sa question, no 142, relative à la prise en charge des frais de déplacement des infirmiers.
Mme Marie Pochon . Dans les territoires ruraux, les professionnels de santé, plus particulièrement les infirmiers, assurent des soins à domicile sur de longues distances, ce qui engendre des frais kilométriques importants. Le temps passé sur la route est autant de temps qui n'est pas consacré aux consultations, ce qui est peu pris en compte. Ces professionnels jouent pourtant un rôle indispensable pour garantir l'accès aux soins de certains habitants très isolés. Pour ceux-ci, la venue des infirmiers à domicile est essentielle. Aujourd'hui encore, du fait du manque d'accès aux soins, l'espérance de vie des habitants des territoires ruraux est de deux ans inférieure à la moyenne nationale.
Les aides à domicile du pôle sanitaire et médico-social de Curnier, par exemple, sont amenées à parcourir 90 kilomètres par jour en moyenne, et jusqu'à 200 kilomètres par jour pendant les week-ends.
Les infirmiers ne bénéficient que d'une enveloppe limitée pour le remboursement de leurs frais : le système ne garantit pas un remboursement suffisant pour couvrir l'intégralité des déplacements nécessaires à l'exercice de leur profession. Par exemple, pour les infirmiers qui exercent dans le secteur de La Chapelle-en-Vercors ou dans le Royans, cette enveloppe est fréquemment épuisée dès le milieu de la matinée. Ils sont donc contraints soit d'assumer par eux-mêmes des frais de déplacement importants pour continuer à assurer leur tournée et l'accès aux soins de toutes et tous, soit de privilégier les déplacements les moins longs, aux dépens des personnes qui vivent dans des villages plus isolés.
Il faut se rendre compte des effets de ces difficultés : dans mon département, la Drôme, la durée d'exercice du métier d'infirmier à domicile est de cinq ans en moyenne.
Face à cette situation, quelles mesures le gouvernement envisage-t-il pour garantir aux infirmières et infirmiers exerçant en milieu rural la prise en charge de chacun de leurs kilomètres ? Il faut prendre en considération les temps de déplacement sur des routes parfois montagneuses ou sinueuses, qui réduisent le nombre d'actes effectuables et créent un déséquilibre entre les professionnels qui exercent en milieu urbain et ceux qui exercent en milieu rural. Il s'agit de garantir l'accès aux soins pour tous nos compatriotes, quel que soit leur code postal.
Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre chargée du travail et de l’emploi.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi . Vous avez raison de rappeler combien les infirmières et infirmiers libéraux constituent la pierre angulaire de l'accès aux soins pour un certain nombre de nos concitoyens. L'assurance maladie prend en charge les frais de déplacement par le versement d'une indemnité forfaitaire de déplacement et d'indemnités kilométriques qui s'ajoutent à la valeur propre de l'acte réalisé. Ces indemnités sont importantes puisqu'elles représentent aujourd'hui 18 % des montants globaux facturés par les infirmiers libéraux à l'assurance maladie. Après des négociations avec les représentants de la profession, les indemnités forfaitaires de déplacement ont été revalorisées de 10 % en janvier 2024 pour tenir compte de l'inflation.
Par ailleurs, depuis 2021, des accords locaux peuvent être négociés entre les représentants locaux des infirmiers et les caisses locales d'assurance maladie. Tel a été le cas de la Drôme : un accord y a été signé en 2022 par les caisses locales et l'ensemble des syndicats représentatifs de la profession d'infirmier.
Voilà ce que nous faisons aujourd'hui. Je conçois que la situation est très largement perfectible. Il y a sans doute des voies d'amélioration.
Mme la présidente . La parole est à Mme Marie Pochon.
Mme Marie Pochon . Je vous remercie pour votre réponse. Députée d'un territoire rural – je ne suis certainement pas la seule –, je serais très intéressée par un travail avec le gouvernement sur la question de la prise en charge des frais kilométriques. Le système actuel, assez inégalitaire, défavorise les infirmiers qui exercent en zone rurale. Il faut leur permettre d'assumer le coût des distances qu'ils ont à parcourir. En effet, de plus en plus de nos concitoyens ne peuvent plus bénéficier de soins à domicile parce qu'ils habitent trop loin des centres-bourgs.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre . Cela concerne aussi les aides à domicile.
Mme Marie Pochon. Oui.
Auteur : Mme Marie Pochon
Type de question : Question orale
Rubrique : Professions de santé
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 février 2025