Question écrite n° 1431 :
Mise en place d'un service public de la petite enfance

17e Législature

Question de : M. Rodrigo Arenas
Paris (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

M. Rodrigo Arenas interroge M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes sur l'aggravation des inégalités économiques entre les femmes et les hommes largement causée par un système de la petite enfance défaillant. En partenariat avec le Crédit municipal de Paris, l'Observatoire de l'émancipation économique des femmes, rattaché à la Fondation des femmes, dresse dans son dernier rapport une analyse des facteurs de court, moyen et long termes pour expliquer les inégalités économiques femmes-hommes en France. Il est aujourd'hui crucial de questionner le manque de solutions de garde pour instaurer de nouveaux rapports plus équilibrés. Car c'est bien la défection de l'État dans l'offre de places qui participe de la structuration des inégalités professionnelles et donc des inégalités économiques. Selon le Haut Conseil de l'enfance, il faudrait ouvrir 230 000 places de crèches d'ici à 5 ans pour répondre aux « besoins immédiats ». Il existe dans la société une injonction silencieuse qui est faite aux femmes de prendre quasi intégralement en charge l'éducation de leur enfant. Elles sont incitées à adapter leur carrière professionnelle en faisant par exemple le choix d'une activité plus proche de leur domicile et du lieu de garde, ou encore à préférer des entreprises plus souples mais moins rémunératrices. On constate aussi que lors de l'année suivant la naissance d'un enfant, 47 % d'entre elles réduisent ou arrêtent leur activité professionnelle pour s'en occuper, contre 6 % des pères, et qu'elles prennent deux fois plus souvent des congés pour enfant malade. Afin d'endiguer cette assignation à résidence, il est urgent de donner des moyens adaptés à la petite enfance. Les annonces faites par Mme la Première ministre le 1er juin 2023 en direction du secteur semblent témoigner d'un début de prise de conscience, ce qui s'avérait nécessaire après 6 ans d'errements et d'absence de résultats des gouvernements successifs. Pour autant, au-delà des effets d'annonce, le Gouvernement a omis de traiter le problème à sa racine. Sa volonté de créer 100 000 places de crèches d'ici à 2027 a logiquement été jugée inatteignable par les professionnels du secteur, alors même qu'il n'est pas à la hauteur des enjeux. Tant que les métiers de la petite enfance ne seront pas sujets à de véritables revalorisations salariales et à une amélioration des conditions de travail, ils resteront désertés et limiteront la création de places. Peut-être serait-il bon de rappeler que la moitié des établissements manquent de personnel et que cette situation participe de la dégradation de l'accueil des jeunes, comme en témoigne le rapport de l'IGAS qui parle de « maltraitance institutionnelle ». Par ailleurs, le choix de l'accueil individuel au détriment du collectif, souvent fait par défaut, n'est pas la solution au manque de places en crèche. Sans compter que l'accueil en collectivité reste plus abordable et mieux adapté au développement de l'enfant. Enfin, une offre de garde plus adaptée aux mères éloignées de l'emploi, en grande partie des mères élevant seules leurs enfants ou à l'inverse, des mères de familles nombreuses ou dont les horaires de travail sont atypiques, serait la bienvenue. À ce titre, les 10 millions d'euros prévus pour les crèches labélisés AVIP semblent largement insuffisants. Ces difficultés que rencontrent les mères sont le symptôme d'une société patriarcale qui ne reconnaît pas le travail de celles qui affrontent une charge mentale toujours plus assommante et aliénante. En 2023, ce sont encore les mères qui supportent presque intégralement les coûts de la parentalité. S'attaquer frontalement au manque de places de crèches revient à limiter une des causes des inégalités entre les femmes et les hommes et donc à agir de fait sur les conséquences que l'on connaît tous : sexisme, misogynie, rapports de domination et de possession qui mènent trop souvent au pire. Il lui demande quand le Gouvernement envisagera sérieusement la mise en place d'un service public de la petite enfance à la hauteur de la détresse de nombreuses mères, car oui, en 2023, ce sont toujours elles que la parentalité pénalise, tout en engageant des revalorisations salariales décentes pour l'ensemble du personnel de la petite enfance.

Réponse publiée le 11 mars 2025

La loi pour le plein emploi du 18 décembre 2023 a créé un nouveau service public de la petite enfance, qui occupe un rôle central dans la lutte contre les inégalités de genre. Il assure un accueil adapté aux enfants en situation de handicap, en précarité, ou issus de familles monoparentales ou socialement isolées, parce qu'il offre des solutions souples et inclusives. Les communes assureront désormais un rôle de pilotage local de cette politique, ce qui améliore la coordination entre les acteurs de la petite enfance et garantit une prise en charge adaptée aux besoins des territoires. Le Gouvernement apporte à ce dispositif un financement inédit de 1,5 milliard d'euros supplémentaires d'ici 2027, ainsi qu'un accompagnement en ingénierie pour les porteurs de projets, en particulier dans les petites communes. Avec l'accès prolongé aux aides pour les familles monoparentales et une augmentation du crédit d'impôt pour les frais de garde, il facilite la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle et soutient une insertion durable pour les familles. Le Gouvernement a entrepris une refonte ambitieuse de la politique d'accueil du jeune enfant, conformément aux engagements pris durant la campagne présidentielle de 2022. Cette réforme vise avant tout à accroître le nombre de places d'accueil pour offrir une solution accessible et adaptée aux besoins de toutes les familles, avec une attention particulière pour les 150 000 parents, en majorité des mères, qui se retrouvent dans l'impossibilité de prendre ou reprendre un emploi faute de structures disponibles et adaptées, pour alléger la charge mentale et les contraintes qui pèsent sur les mères. Cette politique contribue également à réduire les inégalités économiques et professionnelles entre les sexes car elle permet aux femmes de maintenir ou de développer leur activité professionnelle. Depuis juillet 2024, une revalorisation pérenne de 100 euros nets mensuels minimum pour les agents travaillant dans les crèches publiques a été instaurée. En parallèle, un "bonus attractivité" financé aux deux tiers par la caisse d'allocations familiales (environ 475 euros par place en crèche par an) est versé aux collectivités ayant voté cette revalorisation, à condition que leur établissement soit financé par la prestation de service unique. Ce bonus est accessible dès juillet 2024 pour les communes ayant délibéré entre le 2 juillet et le 31 décembre 2024 et, pour l'année suivante, entre le 2 janvier et le 1er juillet 2025. Le service public de la petite enfance a pour objectif de répondre aux besoins spécifiques des mères éloignées de l'emploi, en particulier celles vivant des situations de précarité, comme les mères célibataires, les familles nombreuses ou celles ayant des horaires de travail atypiques. Il vise à lutter contre les inégalités sociales et territoriales, en assurant une équité financière aux familles. Cela passe par l'adaptation des coûts d'accueil en fonction des revenus des familles, afin de garantir un accès au service sans que le prix soit un frein. De plus, l'organisation de l'offre de garde doit être adaptée aux spécificités des territoires, en renforçant le maillage territorial et en harmonisant les services à différents niveaux locaux. L'objectif est de rendre l'offre accessible au plus grand nombre, en l'intégrant dans une politique d'aménagement du territoire qui répond aux besoins des familles. Une autre priorité est de simplifier les démarches administratives pour les parents grâce à la mise en place des guichets uniques et de processus de conventionnement des professionnels avec les collectivités pour éviter aux familles de multiplier les démarches et rendre plus fluides les processus administratifs. La création d'un service public de la petite enfance représente une avancée essentielle pour répondre aux défis actuels liés à la garde des jeunes enfants et à l'égalité des genres. Il ambitionne de structurer l'offre de garde de manière à la rendre accessible à tous, tout en réduisant les inégalités économiques et sociales, notamment celles qui pèsent sur les mères, souvent confrontées à une double charge de travail domestique et professionnelle. Ce service public constitue un point de départ pour des politiques plus larges et plus inclusives en faveur de l'accueil des jeunes enfants. En effet, en travaillant de concert avec les collectivités locales et les associations, le Gouvernement cerne les besoins locaux, notamment pour les familles en situation de précarité ou celles ayant des horaires de travail atypiques, pour mettre en place des solutions innovantes pour garantir un accueil de qualité pour tous les enfants, dans le respect de leur rythme et de leurs besoins fondamentaux. Le service public de la petite enfance vise ainsi à gommer les inégalités existantes et constitue un socle solide pour des politiques publiques futures centrées sur l'égalité des chances pour les enfants et leurs parents. C'est un levier pour faire progresser la justice sociale, en particulier pour les mères, qui offre un meilleur accès aux services de garde et allège la charge économique et psychologique qu'elles rencontrent souvent dans l'accès aux modes de garde.

Données clés

Auteur : M. Rodrigo Arenas

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enfants

Ministère interrogé : Solidarités, autonomie et égalité entre femmes et hommes

Ministère répondant : Travail, santé, solidarités et familles

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 11 mars 2025

partager