Non-respect des engagements de l'État en Martinique pour le versement des aides
Question de :
Mme Béatrice Bellay
Martinique (3e circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Béatrice Bellay appelle l'attention de M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer, sur la situation grave de non-respect des engagements pris par l'État vis-à-vis de la collectivité territoriale de Martinique quant à la compensation financière des dépenses obligatoires liées aux allocations de solidarité (APA, PCH, RSA) et à l'absence de versement d'une dotation d'amorçage lors de la création de la collectivité territoriale de Martinique (CTM) en 2015. Alors que la collectivité territoriale de Martinique se trouve confrontée à une baisse continue des dotations de l'État, les charges qui lui incombent sont en constante augmentation et notamment le versement des prestations sociales dont le nombre de bénéficiaires ne cesse de progresser en Martinique et qui pèse lourdement sur le budget de la CTM en raison de la réduction de la part remboursée par l'État malgré les engagements de remboursement « à l'euro près » pris lors du transfert de compétences issu de la loi de décentralisation. En 2023, ces dépenses s'élevaient pour la CTM à 317 millions d'euros, dont 150 millions demeurant non compensés, grevant gravement le budget de la collectivité et menaçant le financement des infrastructures essentielles, telles que les écoles, les crèches et les routes. Pour rappel, avec 27,4 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté (contre 14 % en hexagone), le niveau de dépenses sociales en Martinique est bien plus élevé que celui des collectivités hexagonales. En outre, lors de la création de la CTM en 2015, la collectivité n'a perçu aucune dotation d'amorçage, contrairement à ce qui a été pratiqué pour d'autres régions et notamment lors de la création de la collectivité territoriale de Guyane (CTG) à la même date. Mme la députée dénonce cette situation manifeste de rupture d'égalité et demande à M. le ministre de lui préciser les mesures immédiates que le Gouvernement entend prendre pour corriger cette inégalité républicaine qui risque, à terme, de porter durablement préjudice aux Martiniquaises et aux Martiniquais, déjà fortement exposés aux insécurités multiples dont la vie chère. Il s'agit d'une rupture d'égalité des droits manifeste entre l'hexagone et la population martiniquaise, où le taux de pauvreté est nettement supérieur (46 % en Martinique contre 14 % en hexagone). Elle lui demande de lui préciser quelles mesures immédiates le Gouvernement entend prendre pour corriger cette inégalité républicaine qui risque à terme, de porter durablement préjudice aux Martiniquaises et aux Martiniquais, déjà fortement exposés aux insécurités multiples dont la vie chère et ainsi donner à l'État l'occasion de respecter ses obligations devant la loi.
Réponse publiée le 4 mars 2025
Les transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales obéissent à un principe de neutralité budgétaire : ils doivent être accompagnés de l'attribution de ressources équivalentes aux charges transférées, évaluées à la date du transfert, conformément à l'article 72-2 de la Constitution. Cette compensation est intégrale et garantie au moment du transfert de compétences, ce qui a bien été le cas pour le département de Martinique dont la collectivité territoriale de Martinique (CTM) est l'héritière. La collectivité bénéficie, par ailleurs, de financements de l'Etat qui concourent à sa capacité d'action. Ainsi, en 2023, 157,4 M€ lui ont notamment été versés par l'Etat au titre de la fraction de TVA reversée aux régions, 144,4 M€ au titre de la dotation globale de fonctionnement des départements, ou 44,3 M€ de dotation globale de décentralisation. Entre 2020 et 2024, les différents concours de l'Etat ainsi que la fiscalité reversée, ont ainsi progressé malgré la baisse de 3 % de la population en Martinique. La situation du territoire martiniquais justifie, pour la CTM, le bénéfice des mécanismes de péréquation entre collectivités : elle est l'une des six collectivités à compétence régionale à bénéficier du fonds de solidarité régional. Elle bénéficie également du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux. Concernant la demande en faveur d'une dotation d'amorçage au titre de la mise en place de la CTM, les fusions ou évolutions institutionnelles de cette nature ont plutôt vocation à se traduire par des économies d'échelle et par une optimisation des moyens dédiés aux fonctions supports. Les économies induites signifieront des marges de manoeuvre budgétaires pour la collectivité. En complément, pour mémoire, la collectivité territoriale de Guyane n'a pas, selon le même raisonnement, bénéficié d'une dotation d'amorçage lors de sa création en 2015. Conscient des atouts et des besoins de la Martinique, l'Etat lui apporte un soutien important. Avec un montant de 1 453 € par habitant de dotations de l'Etat pour l'exercice des compétences départementales et régionales, la Martinique en est le premier territoire ultramarin bénéficiaire, la moyenne des DROM étant à 1251 € par habitant. La CTM bénéficie ainsi d'un niveau de dotation par habitant près de trois fois supérieur à celui des habitants de l'hexagone.
Auteur : Mme Béatrice Bellay
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Outre-mer
Ministère répondant : Outre-mer
Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 4 mars 2025