Prendre en compte les années blanches pour les doctorants
Question de :
M. Rodrigo Arenas
Paris (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Rodrigo Arenas appelle l'attention de M. le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les modalités de calcul de la pension de retraite des doctorants et postdoctorants ayant été rémunérés par des libéralités en France et à l'étranger. Les personnes qui ont poursuivi une carrière dans l'enseignement sont déjà très touchées par une perte très importante de pouvoir d'achat à la suite de plusieurs années de gel du point d'indice des fonctionnaires et d'une stagnation de leurs rémunérations malgré l'ancienneté et risquent désormais de subir les conséquences de la réforme des retraites. C'est une situation absolument inacceptable à laquelle il faut remédier rapidement car c'est l'un des facteurs qui contribue à la diminution du nombre de docteurs depuis 2009. La réforme des retraites mise en place pour septembre 2023 contribue là encore à une défiance vis-à-vis de la carrière de chercheurs et enseignants-chercheurs en raison de l'allongement de la durée de cotisation. Malgré le discours gouvernemental sur le fait que cette réforme « ne change rien » pour les travailleurs qui partaient déjà à la retraite après 62 ans, il est évident que l'ensemble des mesures ont pour effet de décaler l'âge de départ de tous et d'infliger une décote supplémentaire comme à l'ensemble des personnes diplomées. Mais au-delà de ces problèmes liés à la nouvelle réforme, M. le député tenait à interpeller Mme la ministre au sujet des activités scientifiques financées par des « libéralités », c'est-à-dire des bourses n'ouvrant aucun droit à la retraite et les séjours postodoctoraux à l'étranger. Ces deux types d'activités représentent autant d'années blanches dans le calcul des pensions de retraite des scientifiques. Ce sont autant de périodes travaillées (pouvant aller jusqu'à plus de 10 ans pour certains) qui ne sont pas comptées dans le calcul des annuités, ce qui contribue à diminuer la pension de retraite des enseignants-chercheurs mais également de toutes les personnes qui ont été rémunérées lorsqu'elles étaient doctorantes ou post-doctorantes. Un certain nombre de scientifiques à bac+8 ou +10 vont ainsi avoir des pensions de retraites d'un montant équivalent au Smic ou presque. Ceci concerne également des personnes qui, après leur thèse et leurs années de stages postdoctoraux ont quitté le monde de la recherche pour effectuer d'autres carrières. Aussi, il lui demande s'il a prévu un amendement des modes de calculs du montant des droits pour les doctorants et postdoctorants ayant été rémunérés par des libéralités en France et à l'étranger afin de leur verser une pension de retraite digne et à un âge convenable.
Réponse publiée le 27 mai 2025
Dans le cadre du chantier « Jeunes chercheurs » lancé en 2007, diverses actions en direction des doctorants et post-doctorants ont été mises en œuvre, notamment par la circulaire du 20 octobre 2006 relative à la résorption des libéralités. Ainsi, la préparation du doctorat a été reconnue comme expérience professionnelle par l'article L. 612-7 du code de l'éducation dans sa version issue de la loi n° 2006-450 du 18 avril 2006 de programme pour la recherche. En complément, le Gouvernement a souhaité renforcer le cadre juridique de leur recrutement en établissant un cadre contractuel unique, plus protecteur que les dispositifs précédents, notamment en matière sociale. Ainsi, l'article L. 412-2 du code de la recherche et le décret n° 2009-464 du 23 avril 2009 permettent de recruter des étudiants inscrits en vue de la préparation d'un doctorat, par un « contrat doctoral », ouvrant droit à la protection sociale de droit commun. En outre, l'article L. 412-4 du code de la recherche, créé par la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 et le décret n° 2021-1450 du 4 novembre 2021, permettent désormais le recrutement, par un contrat de droit public dénommé « contrat post doctoral », de chercheurs titulaires du diplôme de doctorat. La création de ce statut ainsi que des contrats de chaire de professeur junior par le décret n° 2021-1710 du 17 décembre 2021 valorisent l'existence des post-doctorants, et sont des étapes clés dans la reconnaissance de leurs droits. Toutefois, aucune disposition juridique ne permet aujourd'hui d'ouvrir à titre rétroactif le bénéfice d'un régime de protection sociale à de jeunes chercheurs rémunérés par libéralités avant l'entrée en vigueur de ces décrets. En effet, notre système de retraite repose sur le principe de la contributivité, qui implique que les droits à pension sont normalement acquis en contrepartie de cotisations prélevées sur le revenu d'activité. Les dérogations à ce principe permettant pour des assurés la prise en compte de périodes ne donnant pas lieu à cotisation sont limitativement prévues par la loi (service national, périodes d'invalidité, etc.) et ne peuvent s'appliquer en l'espèce. En revanche, concernant la période d'accomplissement du doctorat, et pour ceux qui auraient effectivement obtenu un tel diplôme, une demande de rachat de trimestres peut être envisagée en vertu de l'article L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale, applicable aux agents relevant du régime général et du régime des pensions civiles de l'État (en application de l'article L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraites). Ce rachat est rendu possible pour les années d'études accomplies dans un établissement français ou d'un État membre de l'Union européenne ainsi que dans les établissements de l'étranger hors États membres de l'Union européenne dispensant alors une formation initiale d'enseignement supérieur débouchant sur la délivrance d'un diplôme de doctorat reconnu en France, et conférant les mêmes droits et prérogatives que le diplôme de doctorat délivré par les établissements d'enseignement supérieur français.
Auteur : M. Rodrigo Arenas
Type de question : Question écrite
Rubrique : Ruralité
Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Enseignement supérieur et recherche (MD)
Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 27 mai 2025