Question écrite n° 1573 :
Mesures contre le vol de cuivre perturbant les infrastructures

17e Législature

Question de : M. Emeric Salmon
Haute-Saône (2e circonscription) - Rassemblement National

M. Emeric Salmon attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les mesures pouvant être renforcées concernant le vol des câbles de cuivre. Partout et ce depuis plusieurs années, le phénomène connaît une recrudescence. Dans la circonscription de M. le député, un nouveau vol de câbles a été recensé, à Courchaton et Vellechevreux, en Haute-Saône. Dans la nuit du 11 au 12 décembre 2023, des individus ont dérobé près d'un kilomètre deux cents de cuivre, dans des regards appartenant à l'opérateur Orange. Ces vols viennent fortement perturber les réseaux de télécommunications mais aussi, lorsqu'il est touché, le trafic SNCF, entraînant l'immobilité de milliers de Français. Il est à noter que le groupe Orange a signalé une augmentation de deux fois plus de vols par rapport à l'année précédente. Les mesures actuellement en place semblent insuffisantes pour endiguer ce phénomène, d'autant plus que le prix du cuivre a connu une augmentation significative au cours des cinq dernières années, incitant davantage aux délits. Des mesures existent pourtant pour contrer le phénomène. Pour exemple, la SNCF a mis en place des contre-mesures, telles que l'utilisation de drones et une surveillance accrue des voies ferrées. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer les intentions du Gouvernement sur ce dossier et notamment quelles mesures il compte prendre pour endiguer ce phénomène de vols de métaux et garantir la sécurité des infrastructures pour les communications et les transports.

Réponse publiée le 29 avril 2025

Définie par la loi de l'offre et de la demande, l'évolution des prix du marché de certaines matières premières conditionne, pour les malfaiteurs, l'intérêt à agir. Ainsi, le cours des métaux explique la commission de certains vols, dont celui du cuivre et des vols de câbles de télécommunication qui en sont particulièrement riches. Si la majorité des faits ont lieu principalement en bordure de routes, l'éclairage public constitue également une des cibles des groupes criminels (notamment dans le cas de lotissements isolés ou en construction). La gendarmerie nationale, compétente sur 96% du territoire national (Hexagone et outre-mer), est particulièrement impliquée dans la lutte contre ces trafics et la protection des populations qui en sont victimes. Le nombre de vols de cuivre constatés en ZGN a connu une hausse de de 19% entre 2022 et 2023. En revanche, le nombre de faits a diminué de 33,2 % en 2024 (3216 faits en 2023 contre 2149 en 2024), entraînant une diminution de 27,5% du nombre de procédures ouvertes pour des faits de vols de câbles de cuivre sur la voirie en zone gendarmerie (passant de 2492 en 2023 à 1806 procédures en 2024). En parallèle, les vols de cuivre au préjudice de l'opérateur Orange continuent d'augmenter. Au sein de l'agglomération parisienne, le phénomène de vols de câbles est relativement stable avec 143 vols signalés en 2024, contre 151 en 2023 et 147 en 2022. Pour lutter contre ce phénomène, une approche globale est mise en œuvre, d'une part, sur la prévention et le partenariat avec les entreprises privées et, d'autre part, sur le démantèlement des groupes relevant de la criminalité organisée. Le ministre de l'intérieur a signé le 9 mars 2021 avec les grands opérateurs de télécommunications et d'infrastructures une convention nationale de lutte contre la malveillance visant les réseaux de télécommunications. Cette convention a été déclinée par les préfets de département aux fins de lutter efficacement contre les actes de malveillance et les vols commis au préjudice des opérateurs nationaux de télécommunications. Ces échanges permettent une connaissance plus fine des problématiques rencontrées par les opérateurs et un partage de ces informations en temps réel aux agents sur le terrain et aux services d'enquête. Il peut également être rappelé qu'en octobre 2008, un protocole d'accord a été signé par le ministre de l'intérieur et le président de la FEDération des Entreprises de RECyclage (FEDEREC) en vue de lutter contre le vol et le recel de métaux. Ce protocole prévoit, entre autres, la mise en place d'une politique rigoureuse de l'achat au détail, la mise en place d'un réseau d'alerte et la mise en place d'un partenariat en matière de prévention situationnelle. Ce protocole a été décliné localement au niveau départemental entre 2009 et 2014. Enfin, il doit être rappelé que le ministère de l'intérieur continue de déployer un partenariat avec, par exemple, Télévision de France, Orange, les opérateurs de transport et de distribution d'électricité. Les groupements de gendarmerie et les services territoriaux de la police nationale mettent donc en œuvre des plans d'action conjoints avec les partenaires pour sécuriser le matériel sur site, créer un réseau d'alerte et mieux comprendre les modes opératoires, renforcer les échanges pour mieux détecter, prévenir les vols et préserver les traces et indices utiles à l'enquête. La mise en place de dispositifs préventifs permet d'accompagner les victimes potentielles de ce type de vols. Les forces de sécurité intérieure entretiennent le contact avec les professionnels de la filière. Les sites sensibles font l'objet d'une présence renforcée et de surveillances dédiées, dès qu'une menace potentielle est identifiée. Les référents et correspondants sûreté de la police et de la gendarmerie nationales apportent, en complément, leur concours et leur expertise en matière de prévention technique de la malveillance au profit des entreprises et opérateurs, afin d'identifier les vulnérabilités des sites tout en proposant des sécurités passives et actives adaptées. Aussi, le développement d'une véritable « culture sûreté » au sein des sociétés est vivement encouragé. Les référents et correspondants sûreté peuvent être sollicités pour dispenser des conseils en prévention situationnelle de nature à prévenir les vols de métaux ou, à tout le moins, à en réduire les conséquences. Ces professionnels, spécialement formés, peuvent : - identifier localement les principales sociétés susceptibles d'être victimes ou ayant déjà été victimes de vols, puis vérifier in situ leurs éventuelles vulnérabilités ; à l'issue, des conseils de sûreté sont prodigués aux demandeurs pour qu'ils puissent renforcer la sécurité de leurs locaux et espaces ; - organiser, au profit des professionnels, des réunions d'information et de sensibilisation aux problématiques de sûreté. Ce travail considérable de prévention et de conseil est complété par un renforcement de la présence de voie publique des deux forces, répondant ainsi à l'objectif de dissuasion des actes de malveillance, y compris ceux liés aux métaux précieux et aux biens d'utilité publique. Au-delà des patrouilles, chaque vol fait l'objet d'un traitement judiciaire adapté : identification préalable des opérateurs dans les systèmes d'information des centres d'information et de commandement (CORG et CIC) et traitement spécifique des plaintes prenant en compte leurs particularités techniques par le biais de constatations scientifiques systématiques et adaptées, complétées par une analyse des manières d'opérer afin de faciliter les rapprochements entre affaires. Concernant plus particulièrement le cas des réseaux d'éclairage public - qui demeurent vulnérables et constituent pour les groupes criminels une cible d'opportunité idéale qui induit des montants de préjudices très élevés pour les collectivités - la police et la gendarmerie nationales activent tous les leviers de coproduction de sécurité tels que l'aide aux diagnostics dans le cadre des projets de vidéo-protection et la réalisation de campagnes de sensibilisation afin de mieux détecter les agissements suspects. En collaboration avec les entreprises, la gendarmerie nationale encourage l'utilisation de systèmes de marquage des métaux (ex. : ADN synthétique) pour faciliter leur identification en cas de vol, permettre de retrouver plus facilement le métal volé et d'identifier les filières criminelles. Le déploiement de dispositifs de participation citoyenne est également vivement encouragé. La préfecture de police est d'abord mobilisée en matière de prévention situationnelle et conseille les sociétés de transport et les opérateurs de réseaux de communication franciliens sur les mesures à mettre en place afin de se prémunir contre les actes malveillants. Par ailleurs, toute documentation utile à la répression du trafic de métaux (fiche réflexe sur les vols de pots catalytiques, guide des métaux SNCF, guide du matériel utilisé par Orange, notes d'information et d'analyse criminelle de la police judiciaire au sujet des réseaux organisés spécialisés dans les vols et recels de métaux, etc.) est envoyée régulièrement aux enquêteurs. Les forces de sécurité intérieure organisent régulièrement des opérations coordonnées nationales et locales pour contrôler les activités des professions réglementées, points de vente de métaux et les centres de recyclage. Ces contrôles permettent de s'assurer de la traçabilité des métaux et d'identifier des transactions suspectes. Des actions complémentaires incluent des contrôles ciblés sur les registres des ferrailleurs, en lien avec les comités départementaux de lutte anti-fraude (CODAF) et les plateformes de recel en ligne, des contrôles des marchandises aux abords des sites de recyclage pour vérifier l'origine des métaux transportés, et une surveillance accrue des zones de brûlage utilisées pour dénuder les câbles volés. Pour la gendarmerie nationale, ces opérations sont parfois mises en œuvre et cordonnées dans le cadre des « cellules anti-cambriolages » départementales. Il en est de même dans les services de police où des enquêtes sont diligentées par les services locaux avec l'appui le cas échéant de services nationaux. Parce que ces vols de matières premières sont souvent le fait de groupes organisés, un office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI) rattaché à la DGGN a été créé. Il s'agit d'une structure composée d'un échelon central à Arcueil (92) et de cinq détachements, à Nancy (54), Lyon (69), Toulouse (31), Rennes (35) et Senlis (60). L'OCLDI est chargé d'enquêter et de coordonner l'action des forces de sécurité intérieure dans ce domaine. Maillon essentiel de la lutte contre la délinquance itinérante, pour laquelle il assure également les échanges à l'international, l'OCLDI peut s'appuyer sur d'autres structures et compétences en matière de renseignement et d'enquête. Ainsi, le service central de renseignement criminel (SCRC) permet la détection de phénomènes émergents, mais également la compréhension des principaux mécanismes de ce type de délinquance, afin de mieux orienter le travail des unités. Cette lecture nationale est complétée par l'analyse des vulnérabilités identifiées sur chaque zone géographique. Les efforts combinés des forces tant au niveau central qu'au niveau local portent leurs fruits. Ainsi, entre janvier 2023 et octobre 2024, ce sont plus de 200 auteurs de vols de cuivre qui ont été interpellés par les unités de la gendarmerie sur l'ensemble du territoire national (Occitanie, Île-de-France, Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes). L'action des services de la préfecture de police de Paris a permis d'identifier et d'interpeller les auteurs d'une succession de vols de câbles d'alimentation en juillet et octobre 2023 sur les lignes T2, T6 et T7 du tramway à Paris, qui avait conduit à l'arrêt du trafic. En septembre 2024, 2 auteurs présumés du vol de plus de 3 tonnes de câbles ont été interpellés. En octobre 2024, l'interpellation de 2 individus pour le vol de 300 mètres de câble Orange ayant privé 47 foyers de l'accès à internet a conduit à une convocation en justice des auteurs. En décembre 2024, l'interpellation de 11 individus mis en cause pour 5 vols de cuivre, dont 2 avec séquestrations de personnes, commis sur les départements du Val de Marne (94), de l'Essonne (91) et d'Indre et Loire (37), fait suite à une enquête minutieuse ayant matérialisé un préjudice estimé à 3 millions d'euros.

Données clés

Auteur : M. Emeric Salmon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2024
Réponse publiée le 29 avril 2025

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