Question écrite n° 1641 :
Inquiétude des entreprises adaptées relatives au projet de loi de finances 2025

17e Législature

Question de : M. Matthieu Bloch
Doubs (3e circonscription) - UDR

M. Matthieu Bloch attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée des personnes en situation de handicap, au sujet de l'inquiétude des entreprises adaptées relatives au projet de loi de finances pour 2025. Les entreprises adaptées salarient par an près de 57 000 personnes dont 40 500 en situation de handicap. Ces dernières permettent à des personnes en situation de handicap d'accéder ou de conserver un emploi dans des conditions adaptées et - lorsque cela est possible et souhaité par le collaborateur - leur ouvrent des possibilités d'accès à d'autres employeurs privés et publics. Les entreprises adaptées, actrices de l'économie sociale et solidaire, en accompagnant les personnes en situation de handicap dans l'expression et la réalisation de leur projet professionnel, s'inscrivent pleinement dans les objectifs fixés par le Gouvernement. Malgré tout, ces entreprises éprouvent bon nombre d'inquiétudes quant à la conjoncture actuelle et à d'éventuelles nouvelles coupes dans le PLF 2025. Leurs arguments sont clairs, il faut les écouter et les accompagner : il revient au Gouvernement de s'assurer du respect de l'indexation des aides aux postes sur le SMIC en application de l'article R. 5213-76 du code du travail tout en s'opposant à une baisse du nombre de postes financés. Il demeure primordial que le premier soit respecté sans que le second soit sacrifié. À plus long terme, M. le député compte sur le Gouvernement pour limiter la hausse des cotisations AT-MP pour les entreprises adaptées. À cette fin, M. le député demande à M. le ministre de mutualiser le taux AT-MP des BOETH à l'ensemble des employeurs ; les entreprises adaptées sont souvent les derniers recours de maintien dans l'emploi des salariés ayant connu des difficultés sociales, physiques ou mentales. Ceci a pour double effet de concentrer les personnes les plus vulnérables et d'augmenter les recrutements de seniors en situation de handicap : cette configuration entraîne une hausse des cotisations AT-MP pour les entreprises adaptées. En conséquence, plus de la moitié des aides de l'État est affectée aux surcoûts sociaux au lieu d'être affectée intégralement à la compensation du handicap. Enfin, M. le député sollicite le Gouvernement afin qu'il mette en place un fonds de compensation pour les salariés qui ont quitté l'entreprise et pour lesquels l'entreprise adaptée n'a plus la possibilité de bénéficier des aides au poste. Il paraît nécessaire d'adapter les nouvelles règles de congés payés aux spécificités des entreprises adaptées. Les nouvelles règles appliquées aux congés payés imposent que les demandes d'indemnisation revêtent un caractère rétroactif. Ainsi, cette rétroactivité, appliquée à des salariés sortis de l'effectif pour lesquels il sera payé des congés, va pénaliser les entreprises adaptées car elles ne pourront pas bénéficier des aides aux postes qui leur auraient été dues si la règle avait existé avant la sortie des effectifs. Il lui demande d'apporter des réponses à ces différents points afin de pouvoir rassurer les entreprises adaptées qui œuvrent pour l'insertion des personnes en situation de handicap.

Réponse publiée le 15 avril 2025

Les entreprises adaptées et les entreprises adaptées de travail temporaire, en tant qu'acteurs du développement économique de leur territoire, sont une solution de proximité aux besoins des travailleurs handicapés et des employeurs. Ainsi, depuis la loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023, ces structures agréées par l'Etat sont désormais susceptibles de proposer des parcours d'accompagnement sur un cycle long dont le support est le contrat à durée indéterminée et des solutions d'accompagnement de transitions professionnelles dans un cycle court à travers des supports comme le contrat à durée déterminée tremplin ou l'intérim avec l'entreprise adaptée de travail temporaire. Le soutien de l'Etat sur la période 2017-2024 est passé de 319 millions d'euros à 510 millions d'euros (+ 59%) pour le financement des entreprises adaptées. Depuis la réforme introduite en 2018, le montant des aides au poste est revalorisé pour tenir compte de l'évolution du Smic. Entre 2019 et 2024, les dix augmentations du Smic ont donné lieu systématiquement à une revalorisation en conséquence du montant des aides au poste. Le 1er novembre 2024, ces aides ont été revalorisées de 2%, conformément à la revalorisation du Smic. S'agissant de l'application de l'octroi de jours de congé durant les arrêts maladie, l'article 37 de la loi du 22 avril 2024 permet désormais à l'État français de s'inscrire dans le cadre de la législation interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne qui impose aux États membres de garantir aux salariés 4 semaines de congés payés garantis par la Directive de 2003 au titre d'une année de travail, même si cette année a été ponctuée par des périodes d'arrêts maladie. Ces règles sont codifiées aux articles L. 3141-5 et suivants du code du travail. La loi du 22 avril 2024, entrée en vigueur le 24 avril 2024, prévoit toutefois une application rétroactive de certaines de ses dispositions dont, principalement, celles mentionnées ci-dessus relatives à l'acquisition de droits à congés en cas d'accident ou de maladie non professionnels et celles relatives aux possibilités de report des congés payés de 15 mois en cas de maladie.  Nous ne pouvons pas faire de chiffrage sur ce point. L'approche est au cas par cas les données sont celles de l'employeur, notre système d'information à l'ASP ne comporte pas les données nécessaires. Un échange récent avec le DG de l'UNEA nous faisait comprendre que les demandes reçues par les adhérents sont peu nombreuses et très limitées. Pour mémoire la loi est très restrictive sur les conditions d'éligibilité à l'indemnisation des salariés sortis de l'EA depuis moins de 3 ans. Pour les salariés encore en poste cela se traduit par l'octroi aux salariés de droit à congés supplémentaires. Tous les employeurs sont placés dans une situation identique par la loi du 22 avril 2024. Les situations sont à examiner au cas par cas pour la période courant entre le 1er décembre 2009 (1) et le 23 avril minuit 2024. S'agissant en particulier du cas des salariés qui ont quitté la structure avant le 24 avril 2024 et depuis moins de 3 ans, il appartient au salarié de demander le recalcul à son employeur. En cas de refus de l'employeur, le litige individuel se règle devant le conseil des prud'hommes. Par conséquent, chaque entreprise adaptée doit établir une analyse de sa situation pour établir la réalité de son exposition à des demandes indemnitaires. En l'état, la nécessité d'un fonds de compensation pour les salariés qui ont quitté l'entreprise et pour lesquels l'entreprise adaptée n'a plus la possibilité de bénéficier des aides au poste n'est pas établie, ces nouvelles règles s'appliquant par ailleurs à tous les employeurs. Enfin, l'aide au poste accordée par l'Etat n'a pas vocation à compenser la totalité des coûts salariaux des entreprises adaptées ; elle vient compenser les conséquences de la moindre productivité des travailleurs handicapés et leur besoin d'accompagnement. Concernant plus particulièrement les coûts salariaux ayant trait aux taux de cotisation AT/MP, il apparaît difficilement envisageable, au regard de l'égalité de traitement devant les charges publiques, de créer un mécanisme de compensation spécifique pour les entreprises adaptées parmi tous les autres employeurs également soumis à cette même obligation. (1) Le 1er décembre 2009 correspond à la date d'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, qui a rendu d'application directe les règles posées par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, dont celle selon laquelle tout travailleur doit bénéficier d'au moins 4 semaines de repos. Depuis cette date, tout salarié peut invoquer ce droit à l'égard de son employeur.

Données clés

Auteur : M. Matthieu Bloch

Type de question : Question écrite

Rubrique : Économie sociale et solidaire

Ministère interrogé : Personnes en situation de handicap

Ministère répondant : Autonomie et handicap

Dates :
Question publiée le 5 novembre 2024
Réponse publiée le 15 avril 2025

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