Danger des crédits immobiliers à taux variable
Question de :
M. Aurélien Saintoul
Hauts-de-Seine (11e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Aurélien Saintoul alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la volonté de la Banque centrale européenne (BCE) de pousser à l'adoption des taux variables en France pour les crédits bancaires. Les crédits à taux variable ont été mis en place par la BCE pour permettre à des ménages aux revenus faibles de prétendre à un crédit, en particulier à un crédit immobilier. En réalité, en cas d'une augmentation du taux d'intérêt au cours de la période du prêt, il s'agit d'un risque supplémentaire pesant sur les personnes les plus vulnérables. En effet, le taux est alors indexé sur le taux de crédit bancaire EURIBOR (taux d'intérêt moyen auquel les établissements financiers se prêtent de l'argent sur le marché interbancaire de la zone euro). Ces crédits à taux variable sont un leurre et ne font que protéger les banques au détriment des particuliers et des entreprises qui se retrouvent soumises aux caprices de la finance. Loin d'apprendre de ses erreurs, la BCE tente d'imposer ces mêmes taux d'intérêt variables qui, à l'étranger, ont entraîné l'effondrement des systèmes bancaires à la suite de la crise des subprimes en 2007. En effet, un rapport d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale, publié en 2008, établit un rapport direct entre la crise des subprimes et la crise de confiance et de liquidités que celle-ci a engendrée : la hausse des taux courts qui en a résulté s'est répercutée sur les emprunts immobiliers à taux variable, ce qui a entraîné pour les emprunteurs des difficultés face aux échéances. Actuellement, les banques françaises pratiquent majoritairement des prêts à taux d'intérêt fixes. Cette particularité du système bancaire français protège les ménages et les entreprises des aléas des marchés financiers. Il souhaiterait donc savoir s'il compte appuyer la demande d'extension du « régime transitoire » dont bénéficient aujourd'hui les banques françaises auprès de la BCE. Il lui demande également s'il a pour intention d'accepter que le système de crédits bancaires français passe d'un régime de taux fixes qui protège les ménages les plus vulnérables à celui de taux variables au service d'une finance débridée, en période de crise économique.
Réponse publiée le 3 décembre 2024
Le marché du crédit français – et en particulier du crédit immobilier – est caractérisé par une prédominance des taux fixes. Selon le suivi mensuel effectué par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), 99,3 % du montant de prêts immobiliers est accordé à taux fixe aux particuliers. Globalement, les prêts aux entreprises et aux ménages en France sont davantage accordés à taux fixes (38 % de taux variables en France contre 63 % en zone euro sur la production totale en août 2024 [i] ). La prédominance des taux fixes a contribué à la résilience des ménages déjà endettés sur le marché immobilier lors de la période récente de hausse des taux. La charge de remboursement n'a pas augmenté avec la hausse des taux pour tous ces ménages. Les établissements français intègrent le risque dans leur bilan et le risque de crédit demeure limité en France. Le taux de passage en défaut augmente légèrement entre 2021 et 2024 mais reste en dessous de 0,5 % en mars 2024 [ii]. Cette résilience face à un choc économique est renforcée par le cadre macroprudentiel, notamment par la mesure encadrant les conditions d'octroi de crédit mise en place par le Haut Conseil de Stabilité Financière [iii]. La BCE invite les banques à renforcer leur gestion de bilan mais aussi de risque de crédit, tout en couvrant leur risque de liquidité de taux [iv], mais ces recommandations ne s'opposent pas aux taux fixes propres au modèle français. Si les taux fixes exposent davantage les établissements prêteurs au risque de taux, ils protègent du risque de crédit en limitant le risque de défaut des ménages emprunteurs. Ainsi, le modèle d'octroi de crédit français garantit la résilience des ménages et ainsi du secteur financier dans son ensemble, tout en soulignant l'importance de garantir l'accès à la propriété aux ménages vulnérables dans des conditions saines d'octroi de crédit. ----------------------------- [i] Données BCE : RAI.M.U2.SVLHHFNC.EUR.MIR.E / ECB Data Portal (europa.eu) [ii] Graphique 48 du dossier le_financement_de_l'habitat_en_2023.pdf (banque-france.fr) [iii] Mesure relative à l'octroi de crédits immobiliers | Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et Ministère chargé du budget et des comptes publics (economie.gouv.fr) [iv] ECB Banking Supervision : SSM supervisory priorities for 2024-2026 (europa.eu)
Auteur : M. Aurélien Saintoul
Type de question : Question écrite
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 3 décembre 2024