Question au Gouvernement n° 171 :
Exportation de munitions vers l’Iran

17e Législature

Question de : M. Laurent Mazaury
Yvelines (11e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

Question posée en séance, et publiée le 14 novembre 2024


EXPORTATION DE MUNITIONS VERS L'IRAN

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Mazaury.

M. Laurent Mazaury . Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, une enquête de France 24 a mis en lumière l'utilisation en Iran – à des fins de répression de manifestations par la force – de munitions pour fusil de chasse provenant de la société franco-italienne Cheddite. Or, vous le savez, l'Iran est sous embargo. L'enquête trouve ses sources dans des forums de chasseurs iraniens qui photographient eux-mêmes régulièrement leurs munitions, lesquelles sont également utilisées par les soldats et les forces de l'ordre iraniennes. Celles-ci en font usage sur les manifestants, provoquant de graves blessures, visibles sur de très nombreuses vidéos.

Pourtant, les législations française et européenne interdisent de vendre, de fournir, de transférer ou d’exporter, directement ou indirectement, à toute personne, entité ou organisme en Iran ou aux fins d'une utilisation dans ce pays, les équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne.

Des questions ont été posées directement à la société Cheddite, qui avait déjà été la cible de critiques identiques dans le dossier birman. Elle répond vendre ses produits en respectant l'embargo iranien et ne pas en être responsable après la vente. Les cartouches ont pourtant transité jusqu'en Iran, notamment par la Turquie.

M. Fabien Di Filippo. La réponse est dans la question !

M. Laurent Mazaury . Il apparaît que la société Cheddite vend ses cartouches à une société turque du nom de Yavascalar, qui est le plus gros fournisseur de cartouches à l'Iran. Or, parmi les actionnaires de la société Yavascalar, on trouve la société Cheddite, à hauteur de 50 % des parts. Par ailleurs, des membres de la direction de Cheddite, dont le PDG lui-même, sont aussi membres du conseil d'administration de Yavascalar.

Les ministères des affaires étrangères, de l'intérieur, de la défense et de l'économie ont été informés, afin que des investigations soient engagées. En décembre 2022, elles étaient en cours, sur un possible détournement de matériel exporté en violation des règles européennes. Pouvez-vous nous dire où en est cette enquête, nous en communiquer les résultats et nous indiquer quelles mesures ont été prises ou sont sur le point de l'être pour faire cesser ces agissements de la société Cheddite et restaurer ainsi un embargo efficace contre les ventes d'armes à l'Iran ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, SOC, EcoS et GDR. – Mme Constance Le Grip applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des affaires étrangères . La France a pris connaissance des allégations de France 24 relatives à l'utilisation, dans la répression des manifestations en Iran, de douilles de fusil de chasse et de tir sportif produites par le fabricant franco-italien Cheddite. Nous rappelons un principe simple : en stricte conformité avec les sanctions et embargo existants, notamment au niveau de l'Union européenne, la France n'autorise l'exportation vers l'Iran d'aucun produit explosif ou arme à feu, ni, plus généralement, d'aucun matériel de guerre. Tout porte à croire que ces cartouches se seraient retrouvées en Iran à la suite d'un détournement, très probablement depuis la Turquie. La France n'a en tout état de cause jamais autorisé ces exportations.

Nous avons mené avec les autorités italiennes une démarche conjointe pour déterminer si ces exportations vers la Turquie ont été réalisées par la partie italienne de l'entreprise Cheddite. Au cours de l'enquête, l'entreprise a indiqué qu'elle n'avait jamais exporté de matériel vers les entreprises turques mentionnées dans l'article de France 24. Elle a par ailleurs été auditionnée par la Chambre des députés italienne, ce qui aurait permis d'écarter sa responsabilité et d'accroître la rigueur de sa lutte contre le détournement des sanctions.

Données clés

Auteur : M. Laurent Mazaury

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 novembre 2024

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