Question orale n° 175 :
Réappropriation des ouvrages d'eau potable par les collectivités de l'Essonne

17e Législature

Question de : Mme Julie Ozenne
Essonne (9e circonscription) - Écologiste et Social

Mme Julie Ozenne alerte M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation sur les blocages rencontrés par les collectivités dans leur démarche de réappropriation de la maîtrise de l'eau potable. Pour des millions de Françaises et Français, l'accès à l'eau potable est menacé voire bafoué. D'après les inspections générales des ministères de la santé, de l'agriculture et de la transition écologique, la qualité de l'eau du robinet n'est plus garantie pour plus de 10 millions de Français du fait de la pollution aux pesticides. À l'été 2023, au cœur de la sécheresse, plus de 30 000 Français ont été privés d'eau potable. Pour les Mahorais, les coupures d'eau sont monnaie courante. Dans le même temps, le prix de l'eau ne cesse de croître et avec lui, la pression sur le pouvoir de vivre des plus précaires. Gestion des pollutions, coûts croissants de potabilisation, tensions liées à la disponibilité de l'eau, juste répartition du prix de l'eau entre acteurs : les enjeux en matière d'accès à l'eau potable sont tels que de nombreuses collectivités décident de se réapproprier la pleine maîtrise de ce commun naturel, déléguée pendant des décennies à des entreprises privées. Cette démarche répond à 2 objectifs principaux. Le premier : mieux maîtriser les coûts et empêcher que l'accès à l'eau soit une source de bénéfice au détriment des citoyens. Le second : préserver durablement la ressource en renforçant les actions sur tout le grand cycle de l'eau. C'est notamment dans cette perspective que la régie publique Eau de Paris a été le premier opérateur d'eau en France à mettre en place un dispositif d'aide pour accompagner financièrement les agriculteurs dans la réduction de l'usage de pesticides. Seulement, certaines collectivités désireuses de reprendre la maîtrise de l'eau potable se voient aujourd'hui refuser ce droit par des entreprises souhaitant conserver leur mainmise. C'est notamment le cas en Essonne d'où Mme la députée vient. Depuis un siècle, les communes du nord de l'Essonne dépendent pour leur alimentation en eau potable du réseau interconnecté du sud francilien, propriété privée de l'entreprise Suez. Quatre usines de potabilisation situées à Vigneux, Viry-Châtillon, Morsang-sur-Seine et Corbeil-Essonnes alimentent ce réseau. Cette configuration monopolistique quasi unique en France a permis à Suez d'imposer, dans une opacité quasi totale et depuis des décennies, des tarifs extrêmement différenciés selon les communes et très excessifs. Cette marge permettrait au groupe de tirer une rente d'environ 20 millions d'euros par an, au détriment du pouvoir de vivre des 1,4 million d'habitants de la zone. Pour mettre fin à cette situation scandaleuse, quatre grandes intercommunalités (Grand-Paris-Sud, Cœur d'Essonne, Val d'Yerres Val-de-Seine et Grand-Orly-Seine-Bièvres) réunies au sein du Syndicat mixte eau du sud francilien ont entrepris de se réapproprier l'intégralité des ouvrages d'eau potable du réseau pour assurer ainsi pleinement le service public d'eau potable, de la production à la distribution. Cette démarche, aussi légitime que nécessaire pour les Essonniens, se retrouve actuellement injustement bloquée par Suez, qui revendique la propriété des usines, tout en refusant aux collectivités le droit d'identifier précisément les ouvrages et canalisations qui composent le réseau. Ces arguments paraissent tout à fait contestables. Non seulement, dans la pratique, les collectivités ont déjà payé pour ces usines au travers de la rente tirée de la surfacturation de l'eau, mais surtout, pour ce qui est de l'usine de Morsang-sur-Seine, un arrêté préfectoral datant du 8 mars 1968 déclare que les travaux de construction de l'usine étaient d'utilité publique. De ce fait, l'usine serait un bien de retour et elle appartiendrait donc désormais à la collectivité. Elle lui demande s'il compte lever les blocages qui empêchent actuellement les collectivités de se réapproprier les ouvrages d'eau potable pour assurer pleinement le service public de la production à la distribution et comment il compte lutter contre les pratiques anti-concurrentielles pratiquées dans la gestion de l'eau.

Données clés

Auteur : Mme Julie Ozenne

Type de question : Question orale

Rubrique : Eau et assainissement

Ministère interrogé : Aménagement du territoire et décentralisation

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 février 2025

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