Question de : M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Dominique Potier appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les pratiques peu scrupuleuses d'un certain nombre de concessionnaire de matériel agricole en matière de crédit-bail mobilier. Dans un contexte de crise agricole aiguë, de nombreux agriculteurs sont dans l'impossibilité de contracter des prêts bancaires. Un certain nombre d'opérateurs commerciaux dans le secteur du matériel agricole leur proposent alors de recourir au crédit-bail mobilier pour faire l'acquisition de matériels nécessaires à la poursuite de leur activité. Cette pratique est encadrée par les articles L. 313-7 à L. 313-11 du code monétaire et financier. Contrairement aux règles qui régissent la contraction d'un tel contrat ou d'un prêt bancaire par un particulier, aucune obligation n'est faite au bailleur d'évaluer la solvabilité du preneur. Par ailleurs, il semble que la loi comme la réglementation soient silencieuses sur les conditions de résiliation d'un contrat de crédit-bail laissant place à d'éventuels abus de la part des bailleurs. Alerté par différentes associations et organisations syndicales du monde agricole, M. le député a pu prendre connaissance de contrats fortement défavorables au preneur. En défaut de paiement, si celui-ci souhaite mettre fin au contrat, il ne doit pas seulement restituer les sommes dues et le matériel « en bon état d'entretien » mais il doit aussi payer des indemnités égales aux échéances restantes jusqu'à la fin du contrat pour un bien qu'il a pourtant restitué. Les taux d'intérêts que l'on a pu observer dans certains de ces contrats s'élèvent jusqu'à 42 % sur 4 ans. De telles pratiques qui s'abattent sur des exploitants déjà en difficulté les plongent définitivement dans une situation inextricable qui conduit invariablement à la faillite de leur entreprise. Par ailleurs, il existe également des contrats de location de matériel dont l'ambiguïté est de nature à altérer le discernement des contractants. Il apparaît que ces pratiques ne soient pas mieux encadrées car relevant d'une relation de professionnel à professionnel, dans un rapport équivalent. Toutefois, il semble pourtant à M. le député que la relation commerciale entre un organisme financier, un concessionnaire et un agriculteur est totalement dissymétrique et que ce dernier n'est pas mieux armé qu'un particulier face à un organisme bancaire. S'il a pu observer de telles pratiques délétères dans le secteur agricole, M. le député s'interroge sur leur possible existence dans le secteur de l'artisanat et du BTP notamment. Aussi, tout en étant soucieux de la liberté de contracter et d'entreprendre, il lui demande quelles sont les mesures réglementaires et législatives que le Gouvernement entend prendre, en s'inspirant des dispositions qui protègent les particuliers, pour mettre fin à de telles pratiques qui s'apparentent à de l'usure.

Réponse publiée le 1er avril 2025

Défini principalement par la loi n° 66-455 du 2 juillet 1966, le contrat bail mobilier concerne les opérations de location de biens d'équipement ou de matériel d'outillage. L'article L. 313-7 du code monétaire et financier précise que ces opérations sont des opérations de location de biens ou de matériel précités achetés en vue de cette location par des entreprises (crédit bailleur) qui en demeurent propriétaires, lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, donnent au locataire (crédit preneur) la possibilité d'acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers. Cette opération complexe comporte deux éléments liés l'un à l'autre : un achat par un établissement financier en vue de la location ; un contrat entre l'établissement financier crédit-bailleur et le preneur, qui constitue le contrat de crédit-bail à proprement parler. Le contrat de crédit-bail comporte, d'une part, une location, d'autre part, une promesse unilatérale de vente à l'issue du contrat. Le crédit-bail, bien que juridiquement qualifié de contrat de location avec option d'achat, a en réalité un caractère éminemment financier parce qu'il constitue un mode de financement des investissements à moyen ou long terme. Il est assimilé à une opération de crédit et ne peut être effectué, selon l'article L. 515-2 du code monétaire et financier, à titre habituel que par des entreprises commerciales agréées en qualité d'établissement de crédit. D'ailleurs, l'offre préalable ne prévoit pas de faire figurer un Taux Effectif Global (TEG) car il ne s'agit pas d'un crédit au sens juridique du terme. S'agissant de la solvabilité du preneur, il convient de préciser que contracter un crédit constitue un engagement dont les conséquences financières doivent être pleinement mesurées. Il est nécessaire que le contractant et l'établissement financier puissent évaluer et anticiper raisonnablement les capacités d'endettement et de remboursement du client. Le prêteur a l'obligation de vérifier que l'emprunteur sera en mesure de rembourser son crédit, puisque son obligation principale découlant du contrat de crédit est le paiement de ses échéances. Le prêteur doit donc rechercher si l'emprunteur pourra, au regard de ses revenus notamment, faire face à ses échéances. Les établissements financiers étant responsables des risques qu'ils acceptent de supporter sont, de ce fait, seules décisionnaires en matière d'octroi de prêts, en fonction de l'appréciation qu'ils portent sur la situation financière de leurs clients et sur les garanties offertes. Concernant le coût du crédit bail mobilier, si l'on tient compte du dépôt de garantie restituable en fin de contrat, du premier loyer majoré et de l'option d'achat finale, il est difficile de comparer le prix de revient d'un contrat de crédit bail avec un crédit d'investissement classique. Faire jouer la concurrence reste le moyen d'agir sur le niveau des prix pratiqués par les établissements lorsque ces prix ne sont pas réglementés.

Données clés

Auteur : M. Dominique Potier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Économie, finances et industrie

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 1er avril 2025

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