Mesures concrètes pour les télévisions locales
Question de :
M. Stéphane Viry
Vosges (1re circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Stéphane Viry appelle l'attention de Mme la ministre de la culture sur le rôle des télévisions locale et sur le manque de mesures concrètes à leur égard à l'issue des États généraux de l'information. Ces médias, qui participent activement à la vitalité des territoires, sont au cœur de la démocratie locale. Ils relaient les préoccupations des citoyens, donnent la parole aux acteurs locaux et enrichissent la pluralité des voix. Par leur proximité, ils assurent aussi la circulation de l'information et le lien social, essentiels au dynamisme des territoires. Les États généraux de l'information sont une initiative bienvenue pour renforcer l'indépendance journalistique, lutter contre la désinformation et soutenir l'éducation aux médias. Cependant, comme tout processus de concertation, ce comité ne peut s'arrêter à un simple diagnostic. Les télévisions ont besoin de mesures concrètes, adaptées aux spécificités des différents acteurs du secteur. Sans actions ciblées, ces initiatives risquent de manquer d'impact réel. Les télévisions locales, comme Locale.tv, se disent préoccupés. Bien qu'ils saluent l'intention des États généraux, ils relèvent l'absence de mesures spécifiques aux réalités des télévisions de proximité. En effet, ces derniers ne partagent ni le même modèle économique ni les mêmes contraintes que les grands médias nationaux. Les besoins des médias locaux sont particuliers : ils doivent conjuguer une couverture éditoriale de terrain avec des modèles de financement fragiles. Ils subissent aussi des défis structurels d'accessibilité et de distribution dans les territoires. Pour répondre à ces besoins, des acteurs locaux proposent la création de conventions spécifiques entre les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), le Centre de liaison de l'enseignement et des médias d'information (CLEMI) et les télévisions de proximité. Ces conventions permettraient de renforcer l'éducation aux médias au plus près des territoires. En mettant en place des dispositifs régionaux ciblés, les télévisions locales pourraient mieux jouer leur rôle d'éducation et d'information auprès de la jeunesse, dans le cadre d'un partenariat officiel et structuré. Par ailleurs, les questions de distribution et d'accessibilité des publications locales sont essentielles. Occulter ce sujet serait une erreur, car ces éléments conditionnent l'accès à l'information de proximité pour les citoyens, surtout dans les zones rurales. Ces enjeux sont d'autant plus importants que l'affaiblissement de l'accès aux médias locaux risque d'aggraver les inégalités territoriales. M. le député s'interroge sur la position de Mme la ministre et sur les mesures envisagées pour soutenir les télévisions locales. Quels dispositifs concrets et pérennes pourraient être mis en place pour revaloriser ces médias et renforcer leur mission au service de la démocratie locale et de la cohésion des territoires ?
Réponse publiée le 11 mars 2025
Les médias locaux jouent un rôle essentiel en matière d'information, d'accès à la culture et de maintien du lien de proximité entre les citoyens. C'est à ce titre que les radios et les télévisions locales privées ont bénéficié d'un soutien exceptionnel au moment de la crise du covid-19. Au total, ce sont 200 radios et 30 télévisions locales qui ont été soutenues par le fonds de 30 millions d'euros, afin de leur permettre de faire face à la baisse massive de leurs recettes publicitaires. Compte-tenu de la reprise du marché publicitaire en 2021 et 2022, il n'a pas été envisagé de prolonger ces dispositifs exceptionnels. Si le marché publicitaire de la télévision a été marqué par une légère baisse en 2023, il est reparti à la hausse en 2024. Concernant le marché de la radio, il est en progression constante depuis la fin de la crise sanitaire et a retrouvé un niveau supérieur à celui d'avant crise. La préservation du modèle économique des médias, en particulier locaux, demeure néanmoins une priorité du Gouvernement. En effet, le financement des médias par la publicité, qui est la principale source de revenus des médias gratuits, est fragilisé par l'avènement du numérique, qui a permis à de nouveaux acteurs, dont le modèle repose sur la diffusion de contenus de tiers ou sur la fourniture de services numériques, de capter une partie des ressources publicitaires des médias, sans qu'ils ne contribuent au financement de l'information et de la création. L'étude publiée par le ministère de la culture et l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) en janvier 2024 sur l'avenir des médias estime que les médias qui participent au financement de l'information et de la création pourraient perdre 800 millions d'euros de recettes publicitaires d'ici 2030, principalement du fait de la concentration des investissements publicitaires sur les services des très grandes plateformes. Face à ce constat, le rapport des États généraux de l'information formule plusieurs propositions visant à lutter contre la captation de valeur des plateformes numériques. Il est ainsi proposé d'inciter les annonceurs à publier la part des investissements publicitaires qu'ils réalisent dans les médias d'information par rapport aux plateformes numériques, en complétant leur responsabilité sociale et économique par une responsabilité démocratique (proposition n°7). Au niveau européen, il s'agirait de rendre plus concurrentiel le marché de la publicité en ligne, qui est aujourd'hui largement dominé par quelques acteurs extra-européens, en imposant notamment l'interopérabilité des services publicitaires (proposition n° 12). Le ministère de la culture accorde une attention toute particulière à ces propositions, notamment dans le cadre du travail actuellement mené pour déterminer les suites à donner aux différentes préconisations formulées par les États généraux de l'information. L'objectif est en effet de donner une traduction concrète à ces travaux dans les prochains mois. Enfin, il convient de rappeler que l'État soutient massivement le développement de médias ancrés localement et le maintien du pluralisme au plan national et local, au travers de nombreux dispositifs d'aides : Dans le champ de la presse écrite, les aides au pluralisme, à la modernisation et à la diffusion de la presse ont représenté un soutien financier de près de 200 millions d'euros en 2024, avec un effort particulier en faveur de la presse locale. D'une part, l'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) est dotée de 1,4 million d'euros, répartis entre une douzaine de bénéficiaires. L'éligibilité à cette aide donne également droit à des aides à l'exemplaire bonifiées pour les titres de presse postés ou portés. D'autre part, l'aide au pluralisme de la presse périodique régionale et locale (PPR) est dotée de 1,5 million d'euros par an et bénéficie à 250 titres de presse environ. Par ailleurs, le soutien public s'effectue au travers de l'appui, sous la forme d'appels à projets annuels, de programmes d'incubation dédiés aux médias émergents ou fournisseurs de solutions consacrées aux médias, dont plusieurs sont établis en régions (Provence-Alpes-Côte d'Azur, Grand Est, Sud-Ouest, Île-de-France). Enfin, le fonds de soutien aux médias d'information sociale de proximité (FSMISP) permet d'accompagner financièrement le développement de médias ancrés localement, apportant une information de proximité, et favorisant la continuité du lien entre les habitants d'un quartier, d'une ville ou d'une région. Dans le domaine radiophonique, le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (35,7 millions d'euros en 2024) permet de soutenir les radios associatives, dont les ressources publicitaires sont limitées à 20 % de leur chiffre d'affaires. Enfin, un fonds dédié soutient depuis 2016 les médias d'information sociale de proximité ; sa dotation annuelle atteint 1,8 million d'euros depuis 2021 (contre les 1,5 million d'euros précédemment alloués). Le renforcement de l'offre de proximité constitue par ailleurs l'une des priorités portées par le gouvernement pour l'audiovisuel public, telle que déclinée notamment dans les dernières versions des contrats d'objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions et Radio France. Sous cette impulsion, des jalons importants ont ainsi été atteints depuis 2019, permettant de renforcer le lien entre les médias publics et les territoires : la régionalisation des éditions d'information du midi et du soir de France 3 (ICI 12/13 et ICI 19/20) depuis la rentrée 2023 en remplacement des éditions nationales, ce qui représente 48 éditions régionales quotidiennes ; le développement de coopérations renforcées entre les réseaux régionaux de France Télévisions et Radio France avec : le déploiement progressif des matinales communes entre France 3 et France Bleu, avec 38 matinales effectivement lancées fin 2024, et un objectif de couverture de l'ensemble du territoire en 2025 ; le lancement de l'application mobile « ICI » en mars 2022, média 360° dédié à la vie locale qui donne accès aux contenus radio et télévision des antennes France Bleu et France 3, ainsi qu'aux articles publiés par les deux rédactions. Il est également à noter que France Télévisions joue un rôle clé dans l'accès à l'information locale en Outre-mer, à travers le réseau des chaînes et des radios La 1ère.
Auteur : M. Stéphane Viry
Type de question : Question écrite
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : Culture
Ministère répondant : Culture
Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 11 mars 2025