Question écrite n° 1901 :
Question sur les moyens de lutte contre la fraude à la résidence principale

17e Législature

Question de : M. Peio Dufau
Pyrénées-Atlantiques (6e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Peio Dufau interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les moyens de lutte contre la fraude à la résidence principale. Élu de la sixième circonscription des Pyrénées-Atlantiques, M. le député fait face à de nombreux témoignages de maires qui font état d'un phénomène massif de fraude à la résidence principale. Cette fraude est pratiquée par des propriétaires souhaitant échapper aux contributions obligatoires liées au statut de leur résidence, telles que la taxe sur les plus-values immobilières, la taxe d'habitation et la surtaxe sur la THRS permise dans les communes en zone tendue. Les remontées de terrain suggèrent que ce phénomène est insuffisamment contrôlé. Au-delà de l'alerte qu'il souhaite transmettre à M. le ministre, il aimerait mieux comprendre les moyens d'ores et déjà déployés pour faire face à cette fraude. Aussi il lui demande de lui transmettre les éléments suivants sur l'action de la DGFiP : le nombre d'opérations de contrôle fiscal en matière de taxe d'habitation sur les résidences secondaires et ses majorations, régies par les articles 1407, 1407 bis et 1407 ter du code général des impôts, ainsi qu'en matière de taxe sur la plus-value régie par l'article 150 U du code général des impôts (contrôles sur place et sur pièces) ; le nombre de cas de transmissions par l'autorité fiscale à l'autorité judiciaire aux fins de poursuites pénales en application du code de procédure pénale et du livre des procédures fiscales ; le nombre d'agents alloués pour la mise en œuvre du contrôle fiscal en la matière, au niveau national et départemental ; les moyens techniques déployés (outils informatiques, croisement des données de différents services, intelligence artificielle) ; le plan d'action spécifique de lutte contre la fraude à la résidence principale et stratégie de coopération avec les collectivités locales. À l'heure où les collectivités locales voient leurs dotations diminuer, le manque à gagner dû à la fraude peut être considérable. Pour référence, la majoration de la THRS rapporte 1,8 million d'euros par an à une commune comme Biarritz et la THRS représente une part significative des recettes de certaines communes (14,6 % des recettes à Menton, 15,8 % à Biarritz) selon l'OFGPL. De plus, les déclarations frauduleuses viennent gonfler artificiellement le nombre de résidences principales de certaines communes qui, voyant leur proportion de logements sociaux diminuer mécaniquement, sont exposées à des pénalités dans le cadre de la loi SRU. Ainsi, il est urgent d'identifier les potentielles failles dans la politique de contrôle pour proposer des solutions, dans un double objectif de justice fiscale et d'augmentation des recettes pour les collectivités.

Réponse publiée le 25 mars 2025

En précision liminaire, il est rappelé que les rappels effectués en matière de taxe d'habitation (TH) et de taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS, depuis 2021) relèvent majoritairement des services de gestion et notamment des services des impôts des particuliers (SIP). Cependant, les services du contrôle fiscal (Pôles de contrôle revenu/patrimoine, Brigades de vérifications) peuvent être amenés à contrôler cette taxe. Les données qui suivent sont issues de l'application ALPAGE et ne concernent que les résultats des services de contrôle et non des services de gestion. Par ailleurs, cette application ne permet pas de déterminer si les rehaussements en matière de TH ou de plus-value sont liés à une qualification de résidence secondaire. En 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023, le montant des rectifications effectuées au titre de la TH et THRS par les services de contrôle fiscal est de respectivement 6M€, 4,3M€, 2,9M€, 2,4M€, 2M€ et 1,7M € (ce montant ne tient pas compte des résultats des contrôles réalisés par les SIP) pour un nombre de contrôles de respectivement 212, 179, 85, 128, 51 et 41. La suppression de la taxe d'habitation en 2020 a engendré mécaniquement une diminution du nombre de contrôles, sans toutefois les réduire complètement, attestant de la présence du contrôle fiscal en matière de rappel sur la THRS. En matière de plus-values immobilières, le nombre de rehaussements effectués par les services de contrôle fiscal (Pôles de contrôle revenu/patrimoine, Brigades de vérifications) s'élève à 1271 pour 35M€ en droits en 2018, 1202 pour 33M€ en droits en 2019, 742 pour 19M€ en droits en 2020, 1079 pour 30 M€ en droits en 2021, 1325 pour 45M€ en droits en 2022 et 1178 pour 29 M€ en droits en 2023. Cependant, la corrélation avec une qualification de résidence secondaire ne peut pas être établie dans les données applicatives du contrôle fiscal. Ces taxes et plus-values immobilières sont donc bien contrôlées, mais il est rappelé qu'un contrôle ne conduit pas forcément à des rehaussements, et ce type de contrôle ne peut être restitué dans ALPAGE. En outre, le système d'information mobilisé pour le suivi de l'action pénale ne permet pas d'identifier les transmissions réalisées par la DGFIP à l'autorité judiciaire aux fins de poursuites pénales qui concernent spécifiquement la fraude en matière de taxe d'habitation sur les résidences secondaires et de taxe sur les plus-values immobilières. En 2023, au niveau national, un peu plus de 2400 équivalent temps plein (ETP) exercent une activité de contrôle, dont les missions incluent le contrôle de la THRS et de la taxe sur les plus-values immobilières, au sein de services tels que les pôles de contrôle revenu/patrimoine, les pôles nationaux de contrôle à distance et les SIP. La lutte contre la fraude à la résidence principale s'inscrit dans des stratégies de contrôle définies au niveau national et local. Dans ce cadre, à compter de 2023, afin de permettre à l'administration fiscale de bien identifier les logements concernés par la THRS, la taxe d'habitation sur les locaux vacants (THLV) et la taxe sur les locaux vacants (TLV), une nouvelle obligation déclarative a été mise en place pour les propriétaires via le service en ligne « Gérer mes biens immobiliers ». Les propriétaires doivent déclarer, pour chacun de leurs locaux d'habitation (y compris les parkings, caves, etc.), s'il s'agit de leur habitation principale/secondaire, d'un bien vacant, d'un bien occupé à titre gratuit ou d'un logement qu'ils louent et, dans le cas d'une location, l'identité des occupants au 1er janvier et leur date d'entrée dans le logement. Afin de faciliter cette déclaration, les données d'occupation connues des services de la DGFIP sont préremplies dans l'onglet « Biens immobiliers » de l'espace particulier du site impots.gouv.fr, mais les contribuables doivent vérifier ces informations afin de s'assurer qu'elles sont exactes et, le cas échéant, les corriger et /ou les compléter. Ainsi, tout changement d'occupation d'un local doit désormais faire l'objet d'un signalement spontané. Les règles de gestion relatives à la TH distinguent les mono-ocupants des multi-occupants. Une personne physique occupant un seul local « principal » (appartement, maison) au niveau national, qu'elle soit locataire ou propriétaire, connue ou non à l'impôt sur le revenu, est un « mono-occupant ». La règle de taxation d'un « mono-occupant » est la suivante : s'il ne relève pas du service des impôts des particuliers des non-résidents (SIP-NR), le logement qu'il occupe est considéré comme sa résidence principale. Il n'est donc pas taxé à la THRS. Cette règle comporte trois exceptions : - un local déclaré en « résidence secondaire » par son propriétaire reste taxé à la THRS (la déclaration du propriétaire n'est pas remise en cause) ; - si le mono-occupant relève du SIP des non résidents, le logement qu'il occupe est soumis à THRS ; - si le mono-occupant était taxé à la THRS en 2023, et qu'il n'a pas été dégrevé, il reste taxé en 2024 (cas notamment des non-résidents ne relevant pas du SIP des non résidents). Une personne physique occupant au moins deux logements (appartement, maison) à des adresses différentes, qu'elle soit locataire ou propriétaire, connue ou non à l'impôt sur le revenu, est un « multi-occupant ». Un multi-occupant est taxé à la THRS sur au moins un de ses logements. Le cas échéant, les services de la DGFIP pourront contrôler les déclarations du contribuable et s'assurer du caractère réellement principal de la résidence concernée. Il est en effet possible de remettre en cause ce caractère principal de la résidence grâce à un faisceau d'indices permettant de localiser le centre des intérêts familiaux (lieu de scolarisation des enfants, lieu indiqué sur l'attestation d'assurance habitation…) et des intérêts économiques ou professionnels (lieu de travail et en cas de télétravail attestation de l'employeur prouvant le lieu de TT). A titre d'illustration, la mise en location via Airbnb de la résidence principale peut constituer un indice quant à la durée réelle d'occupation du contribuable comparativement à la durée d'occupation de la résidence déclarée comme secondaire.

Données clés

Auteur : M. Peio Dufau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie, finances et industrie

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 25 mars 2025

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