Facilitation des départs anticipés à la retraite en cas de pénibilité
Question de :
M. Hubert Ott
Haut-Rhin (2e circonscription) - Les Démocrates
M. Hubert Ott attire l'attention de Mme la ministre du travail et de l'emploi sur les possibilités d'amélioration du compte professionnel de prévention (C2P), notamment en ce qui concerne l'utilisation des premiers points obtenus, pour faciliter les départs anticipés à la retraite. Le C2P, créé pour reconnaître et compenser la pénibilité de certains métiers, permet aux salariés exposés à des conditions de travail difficiles d'accumuler des points en fonction de son exposition à des facteurs de risques. Ces points peuvent être utilisés pour financer des actions de formation, passer à temps partiel sans perte de salaire, ou partir plus tôt en retraite. Cependant, les vingt premiers points accumulés sont aujourd'hui réservés exclusivement à la formation ou à la reconversion professionnelle, limitant les options pour les travailleurs qui préféreraient les utiliser pour valider des trimestres supplémentaires et ainsi partir en retraite de façon anticipée. Cette limitation peut être particulièrement problématique pour les travailleurs exerçant des métiers pénibles, qui souhaitent partir plus tôt en retraite sans forcément passer par une formation, en particulier lorsqu'ils sont proches de l'âge légal de départ ou qu'ils ne disposent plus des capacités physiques nécessaires pour exercer dans leur métier. M. le député rappelle également que quatre critères de pénibilité ont été supprimés en 2017 : le port de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et l'exposition à des agents chimiques dangereux. L'absence de prise en compte de ces critères dans la prise en compte de l'exposition à des facteurs de risque, alors que ces conditions sont toujours des sources reconnues d'usure physique, réduit la portée de ce dispositif pour de nombreux salariés. Dans un souci d'équité et de juste reconnaissance des parcours de travail pénibles, il demande lui donc si elle envisage d'élargir l'usage des vingt premiers points du C2P, afin de permettre à ceux qui le souhaitent de valider des trimestres supplémentaires pour un départ en retraite anticipé. Par ailleurs, il souhaite savoir si une réévaluation des critères de pénibilité pourrait être envisagée, pour garantir que la récente réforme des retraites reste juste et adaptée aux spécificités des métiers les plus éprouvants.
Réponse publiée le 25 février 2025
Le Compte professionnel de prévention (C2P), qui fait suite à la réforme par l'ordonnance du 22 septembre 2017 du Compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) créé par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, est un dispositif permettant aux salariés déclarés exposés à certains facteurs de risques professionnels (travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail en milieu hyperbare, bruit, travail répétitif et températures extrêmes) au-delà de seuils réglementaires d'acquérir des points ouvrant des droits pour se former, réduire son temps de travail, bénéficier d'un départ en retraite anticipé ou bénéficier d'un projet de reconversion professionnelle (article L. 4163-7 du code du travail). En application de l'article R. 4163-13 du code du travail, les vingt premiers points acquis sur le C2P sont réservés à la prise en charge de tout ou partie des frais d'une action de formation professionnelle continue (1° du I de l'article L. 4163-7 du code du travail) ou d'un projet de reconversion professionnelle (4° du I de l'article L. 4163-7 du code du travail). Cela s'explique par le fait qu'un des objectifs du C2P est de réduire l'exposition des salariés aux facteurs de risques au cours de leur vie professionnelle en leur permettant notamment de suivre une formation ou de réaliser un projet de reconversion professionnelle pour accéder à un poste moins ou non exposé. Cependant, s'agissant des salariés nés avant le 1er janvier 1960, il est à noter qu'aucun point n'est réservé à ces utilisations. Pour ces salariés, il est donc possible de prévoir une utilisation totale des points C2P pour un autre usage comme un départ anticipé en retraite. Pour les salariés nés entre le 1er janvier 1960 et le 31 décembre 1962 inclus, seuls les dix premiers points sont réservés à ces utilisations. Par ailleurs, la Loi de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) pour 2023 a prévu des mesures pour renforcer la prévention de l'usure professionnelle, en améliorant notamment le C2P. Ainsi, une quatrième utilisation du C2P, le projet de reconversion professionnelle, dans le cadre duquel le salarié peut bénéficier d'un congé de reconversion professionnelle, permet de lever les freins au recours à la formation dans le cadre du dispositif. En outre, le barème de conversion des points pour les utilisations relatives au temps partiel sans perte de rémunération et à la formation professionnelle a été amélioré. Par ailleurs, la loi a prévu la suppression du plafond, qui limitait l'acquisition de points au cours de la carrière à 100 points, et une meilleure prise en compte de la poly-exposition. En outre, la LFRSS a amélioré les droits à la retraite acquis au titre du C2P puisque désormais les trimestres de majoration de durée d'assurance acquis au titre du C2P sont pris en compte dans le calcul du coefficient de proratisation. Il est souligné le fait que quatre facteurs de risque (manutentions manuelles de charges, vibrations mécaniques, postures pénibles et agents chimiques dangereux) ne sont plus couverts par le C2P depuis 2017. Néanmoins, l'accès au dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente, pour les victimes de maladies professionnelles liées à l'un de ces quatre facteurs de risques, a été facilité (les conditions prévues pour l'accès au dispositif pour les assurés ayant une incapacité permanente comprise entre 10 % et 19 % ne s'appliquent pas dans ce cas précis). Par ailleurs, pour mieux prévenir les facteurs de risques ergonomiques, à l'origine de près de 90 % des maladies professionnelles, la LFRSS pour 2023 a créé le fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle qui permet de financer des actions de prévention spécifiques à destination des salariés exposés à ces facteurs de risques. Ce fonds sera doté d'un milliard d'euros d'ici 2027 pour financer les démarches des entreprises visant à la prévention de ces facteurs de risques (subventions prévention, actions de sensibilisation, aménagements de postes en vue de prévenir la désinsertion professionnelle des salariés exposés à ces facteurs de risques et frais de personnel dédiés à la prévention de ces risques), les actions d'organismes de prévention de branche visant les risques ergonomiques et des projets de transition professionnelle. Enfin, le Premier ministre a souhaité réunir une délégation paritaire permanente pour trouver un accord d'équilibre ou de meilleure justice sur notre système de retraites. Chaque organisation pourra faire inscrire à l'ordre du jour les questions qui la préoccupent. Notamment, les questions relatives à la meilleure prise en charge de l'usure professionnelle pourront être abordées dans ce cadre.
Auteur : M. Hubert Ott
Type de question : Question écrite
Rubrique : Retraites : généralités
Ministère interrogé : Travail et emploi
Ministère répondant : Travail et emploi
Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 25 février 2025