Mercure dans le thon, la France doit adopter une réglementation plus protectrice
Question de :
M. Benoît Biteau
Charente-Maritime (2e circonscription) - Écologiste et Social
M. Benoît Biteau attire l'attention de Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins sur la nécessité d'instaurer des normes suffisamment protectrices de la santé des citoyennes et citoyens limitant les quantités de mercure présentes dans le thon. La pêche du thon telle qu'elle est pratiquée en grande majorité aujourd'hui est à plusieurs égards dangereuse : surpêche, dégradation du climat, de la biodiversité, des écosystèmes et donc de la santé de l'océan Indien, amplification de la précarité des peuples des pays du Sud... les exemples ne manquent pas. Les effets néfastes de cette pêche ne s'arrêtent pas là : le thon est également au cœur d'un grave problème de santé publique. L'association Bloom a publié le mardi 29 octobre 2024 les résultats particulièrement alarmants de tests effectués sur 150 boîtes de thon commercialisées en France et en Europe. 100 % d'entre elles étaient contaminées au mercure. Une étude menée entre 2014 et 2016 avait déjà révélé la contamination de 100 % des enfants et 99,6 % à cette substance considérée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comme l'une des 10 plus préoccupantes pour la santé publique, au même titre que l'amiante ou l'arsenic. Or il est avéré qu'en Europe, la consommation de thon est la principale source de cette exposition toxique. Il s'agit pourtant d'un poisson consommé massivement, avec près de 64 000 tonnes écoulées chaque année en France. Près de 8 ans plus tard, ce véritable scandale sanitaire subsiste. Il est le fruit d'une faillite majeure du système français et européen sur la régulation des contaminants dans le thon. Alors que les scientifiques et l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) reconnaissent les dangers du mercure, le régime d'exception accordé au thon lors de la révision des normes européennes sur les contaminants en 2022 reste inchangé et inquiétant. Cette décision, prise sous l'influence des industriels de la pêche thonière, a échappé au contrôle du Parlement européen, incapable de remettre en question des règlements d'exécution édictés dans l'opacité par le Comité permanent sur les végétaux, les animaux, les denrées alimentaires et les aliments pour animaux (SCoPAFF), un organisme qui s'était déjà retrouvé au cœur des controverses sur le glyphosate, les néonicotinoïdes ou les « tests abeilles ». Ainsi, alors que le cabillaud, les sardines, les anchois, le maquereau ou le hareng doivent respecter une teneur maximale en mercure de 0,3 mg/kg et que les produits de la mer doivent, en général, respecter une teneur maximale de 0,5 mg/kg, la teneur maximale en mercure dans le thon peut aller jusqu'à 1 mg/kg. Or les révélations de Bloom indiquent que la norme actuelle n'a pas été fixée pour protéger la santé mais bien pour maximiser le volume de poissons sur le marché. L'argument du bénéfice-risque avancé par les industriels demeure quant à lui tout à fait mensonger, puisque ce sont précisément les poissons soumis à une restriction plus protectrice que le thon qui sont composés en plus grande quantité d'omégas 3. Il est inconcevable, alors que les alertes des scientifiques sont chaque jour plus pressantes, d'accepter un régime dans lequel une teneur en mercure neuf fois plus élevée pour le thon en boîte que pour des sardines ou du cabillaud est considérée acceptable. M. le député souhaite par conséquent savoir si, par principe de précaution et dans l'attente d'une révision du cadre européen en la matière, Mme la ministre compte, comme la France l'a fait pour le bisphénol A, comme on le fait aujourd'hui sur les polluants éternels, activer une clause de sauvegarde ou adopter une législation nationale spécifique pour que la norme qui s'applique en France sur la contamination au mercure du thon, frais ou en conserve, soit alignée sur la norme européenne la plus stricte pour les produits de la mer (0,3 mg/kg). Il en va du droit fondamental à la protection de la santé des citoyens et citoyennes, de la confiance placée dans les institutions. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.
Auteur : M. Benoît Biteau
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Date :
Question publiée le 12 novembre 2024