Question au Gouvernement n° 198 :
Accord avec le Mercosur

17e Législature

Question de : M. Benoît Biteau
Charente-Maritime (2e circonscription) - Écologiste et Social

Question posée en séance, et publiée le 12 décembre 2024


ACCORD AVEC LE MERCOSUR

Mme la présidente . La parole est à M. Benoît Biteau.

M. Benoît Biteau . Ma question s’adresse à M. le premier ministre, habitué des sinistres manœuvres de la Commission européenne. Avec un indiscutable sens du timing, celle-ci cherche à accélérer la signature de l'accord avec le Mercosur au moment où le secteur agricole traverse une crise historique, sur fond d’événements climatiques extrêmes ayant des conséquences sévères pour les récoltes et d’une crise sanitaire sans précédent pour les éleveurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

M. Christophe Bex . Il a raison !

M. Benoît Biteau . Au-delà de l’importation de centaines de milliers de tonnes de viande bovine, de volaille, de miel ou de sucre ne respectant pas nos standards de production, faire entrer ces produits en Europe, c'est assumer l’amplification d’une crise sociale et économique pour les producteurs européens ; c'est cautionner le prolongement d’un désastre pour la santé des producteurs du Mercosur et celle des mangeurs de toute la planète, du fait de l’utilisation de pesticides. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)

Faire entrer ces produits en Europe, obtenus au prix de la déforestation du poumon de la planète et à grand renfort de pesticides réputés dangereux, c'est encourager un système agricole mortifère et renoncer à l’espoir de souveraineté alimentaire en assumant l’importation du dérèglement climatique et de l’effondrement de la biodiversité, principales menaces pour cette souveraineté. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

Faire entrer ces produits en Europe, c’est valider la stratégie de spécialisation de zones de la planète, qui a pourtant montré toutes ses limites lors de la crise du covid-19, lors d’accidents climatiques majeurs ou encore lors d’épisodes d'instabilité géopolitique, comme l’actuelle guerre en Ukraine, alors que nous devons au contraire diversifier nos productions afin de sortir des dépendances alimentaires, lesquelles, de surcroît, mettent en concurrence les paysans du monde entier. (Mêmes mouvements.)

N’est-il pas temps que la France agisse, qu'elle saisisse l’occasion de cette crise pour reprendre le leadership sur la question agricole, afin de refonder les politiques européennes et de permettre une rémunération digne des paysans, tout en visant l'objectif de restaurer notre souveraineté alimentaire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC, dont une partie des députés se lèvent, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP, M. Christophe Bex se levant aussi. – M. André Chassaigne applaudit également.)

Mme la présidente . La parole est à Mme la ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt.

Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt . Je vous remercie de votre question, posée avec la véhémence que justifie le sujet, à savoir l'accord avec le Mercosur. À votre véhémence, nous répondons par la plus grande des déterminations, celle que nous mettons à combattre ce traité que nous estimons inacceptable étant donné les conditions dans lesquelles il pourrait être conclu.

M. Christophe Bex . Vous ne faites rien !

Mme Annie Genevard, ministre . Il est inacceptable d'abord parce qu'il est très éloigné de l'ambition d'une relation forte et équilibrée que nous appellerions de nos vœux avec d'autres pays, ensuite parce qu'il prévoit des concessions tarifaires déséquilibrées, enfin parce qu'il n'est pas conforme aux objectifs sanitaires et climatiques européens. Vous avez évoqué la déforestation et les effets déstabilisants pour nos propres filières. Dans ces accords de libre-échange, on l'a beaucoup dit mais il faut le répéter, l'agriculture est souvent une variable d'ajustement, ce qui n'est pas supportable. Et, au sein de l'agriculture, ce sont toujours les mêmes filières qui sont concernées, spécialement les filières de viande : le bœuf, la volaille, parfois l'agneau. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.) Ce sont toujours les mêmes qui souffrent de ces accords de libre-échange ; nous ne pouvons pas l'accepter. (Mme Justine Gruet et M. Laurent Wauquiez applaudissent.)

M. le premier ministre, Mme la ministre déléguée chargée du commerce extérieur et moi-même travaillons d'arrache-pied pour amener d'autres États membres à rejoindre notre position ; nous conduisons à cette fin un intense travail diplomatique.

Mme Christine Arrighi . Vous avez voté en faveur de l'accord !

Mme Annie Genevard, ministre . Certains pays sont dans l'hésitation ; peut-être les avons-nous amenés à s'interroger sur les conséquences d'un tel accord. Soyez assuré de notre parfaite détermination à empêcher la conclusion de cet accord inacceptable et véritablement néfaste pour notre agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

Données clés

Auteur : M. Benoît Biteau

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 décembre 2024

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