Non-compensation par l'État de la prime Ségur
Question de :
M. Fabrice Roussel
Loire-Atlantique (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Fabrice Roussel attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur la prime Ségur. Au cours de l'été 2024, le gouvernement démissionnaire a acté l'extension de la prime Ségur aux salariés du secteur sanitaire, social et médico-social privé, répondant de ce fait à une véritable injustice qui pénalisait jusqu'ici les plus bas salaires. Depuis l'arrêté du 6 août 2024, les salariés à temps plein du secteur sanitaire, social et médico-social privé bénéficient donc d'une prime mensuelle de 183 euros nets, représentant pour l'employeur un montant de 248 euros bruts par salarié, hors charges patronales. Toutefois, la mise en œuvre concrète de cette mesure se heurte à une difficulté majeure : aucune garantie n'a été donnée aux associations quant à la compensation financière de cette prime par l'État. Or ces structures ne disposent pas de fonds propres et doivent gérer des budgets déjà insuffisants pour remplir leurs missions de service public. Sans compensation, les associations risquent de devoir procéder à des licenciements économiques, geler les recrutements, voire fermer de nombreuses structures. L'application immédiate de la prime Ségur, avec effet rétroactif au 1er janvier 2024, met les associations dans une situation critique. Déjà tendu par un manque de moyens et des effectifs insuffisants, le secteur va voir ses missions et l'attractivité de ses métiers encore davantage mises à mal. Sur le long terme, cette fragilisation du secteur va entraîner l'émergence de véritables zones blanches en matière d'accès aux droits, touchant en premier lieu les femmes et les publics les plus vulnérables. Il souhaiterait savoir si l'État compte prendre ses responsabilités en finançant cette prime, afin d'éviter une crise majeure dans l'accompagnement des personnes en difficulté.
Réponse en séance, et publiée le 5 mars 2025
PRIME SÉGUR
M. le président . La parole est à M. Fabrice Roussel, pour exposer sa question, no 198, relative au financement de l'extension de la prime Ségur.
M. Fabrice Roussel . L’été dernier, le gouvernement démissionnaire a rendu effective l’extension de la prime Ségur aux salariés du secteur sanitaire, social et médico-social privé. C'est une réponse à l'injustice qui pénalisait jusqu'ici les plus bas salaires. Je tiens à saluer l'engagement de ces salariés et de leurs structures.
Depuis l’arrêté du 6 août 2024, les salariés à temps plein du secteur sanitaire, social et médico-social privé bénéficient donc d’une prime mensuelle de 183 euros net, qui représente pour l’employeur un montant de 248 euros brut par salarié, hors charges patronales.
Toutefois, la mise en œuvre concrète de cette mesure se heurte à une difficulté majeure : aucune garantie n’a été donnée aux associations quant à la compensation financière de cette prime par l’État. Or ces structures ne disposent pas de fonds propres et doivent gérer des budgets déjà insuffisants pour remplir leurs missions de service public. Sans compensation, ces associations risquent de devoir procéder à des licenciements économiques, de geler des recrutements, voire de fermer certaines structures.
L’application immédiate de la prime Ségur, avec effet rétroactif au 1er janvier 2024, place ainsi les associations dans une situation critique. Ce secteur, que des moyens et des effectifs insuffisants mettent déjà sous tension, va rencontrer davantage de difficultés à remplir ses missions et à préserver son attractivité. Sur le long terme, une telle fragilisation entraînera l’apparition de zones blanches en matière d’accès au droit, au détriment, d’abord, des femmes et des publics les plus vulnérables.
Quand l’État prendra-t-il enfin ses responsabilités et financera-t-il cette prime afin d’éviter une crise majeure dans l’accompagnement des personnes en difficulté ?
M. le président . La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.
M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins . Le paysage conventionnel de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale privée à but non lucratif se caractérise par ses nombreuses fédérations professionnelles et ses nombreuses conventions collectives, applicables à une multitude d’acteurs. Cette situation rend difficilement lisible l’harmonisation des conditions d’emploi et le renforcement de l’attractivité d’un secteur dans lequel, par ailleurs, un salarié sur cinq n’est pas couvert par une convention collective.
Les négociations engagées par les représentants de la branche à l’été 2022 ont cependant abouti, le 4 juin 2024, à la conclusion de deux accords. Le premier a permis d’étendre le Ségur aux professionnels qui n’en bénéficiaient pas encore, quand le second a donné un cadre et un calendrier à la négociation en vue de la future convention collective unique étendue. Ces accords, largement signés par les partenaires sociaux – je les salue ici –, contribuent pleinement à renforcer l’attractivité du secteur, objectif auquel le gouvernement reste associé. Agréés dans le respect des dispositions de l’article L.314-6 du code de l’action sociale et des familles, ils sont opposables au financement des établissements et des services sociaux et médico-sociaux relevant de la branche de l’action sanitaire, sociale et médico-sociale.
La branche autonomie, en tant que contributeur majoritaire, a déjà financé leur mise en œuvre, dès juillet 2024, à hauteur de 300 millions d’euros. Pour les associations relevant du financement de l’État, certaines compensations ont déjà été versées en 2024, dans le cadre de la loi de finances de fin de gestion. D’autres compensations seront versées au cours de l’année 2025 quand la loi de finances entrera en vigueur.
M. le président . La parole est à M. Fabrice Roussel.
M. Fabrice Roussel . De nombreuses structures nous ont interpellés au sujet de cette compensation. Il est regrettable que nous n’ayons pas adopté certains amendements qui auraient permis de mieux organiser le dispositif. Pour les associations, la prime Ségur représente un coût important – parfois plus de 10 % de leur budget. Celles qui travaillent sur la protection des majeurs, qui ont déjà avancé 32 millions en 2024, devront quant à elles débourser 64 millions en 2025 – ces sommes sont conséquentes. Nous devons être pleinement mobilisés pour que ces structures, en considération de l’importance de leurs missions, puissent continuer de fonctionner normalement.
M. le président . La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre . Je regrette, quant à moi, l’adoption tardive du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En ce début d'année 2025, chaque jour sans budget s’est traduit par une perte de 30 millions – 30 millions qui auraient été bien utiles aux branches que vous venez d’évoquer.
Auteur : M. Fabrice Roussel
Type de question : Question orale
Rubrique : Institutions sociales et médico sociales
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 février 2025