Question orale n° 199 :
Devenir de l'aéroport Bordeaux-Mérignac

17e Législature

Question de : M. Sébastien Saint-Pasteur
Gironde (7e circonscription) - Socialistes et apparentés

M. Sébastien Saint-Pasteur interroge M. le ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports, sur l'avenir de l'aéroport de Bordeaux-Mérignac. Deux sujets sont particulièrement centraux : les vols de nuit et le devenir de la piste secondaire. Ce dernier point nécessite une attention particulière, en raison d'une préconisation du préfet de la Gironde qui suscite une vive incompréhension. Les rapports de la Cour des comptes et de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable, qui sont des organismes indépendants, plaident pour la suppression de la piste secondaire. Leurs éléments d'analyse sont éloquents, du point de vue économique et surtout sur l'impact pour les populations concernées. La suppression de la piste secondaire induirait en effet la réduction de 100 % des nuisances sonores pour plus de 15 000 personnes alors que son maintien augmenterait de 15 % les nuisances pour 6 000 personnes. L'évidence s'impose donc aux autorités décisionnaires, sans parler des près de 8 000 signatures de la pétition demandant la suppression de cette piste secondaire. Il souhaite donc savoir s'il entend faire triompher la raison et l'intérêt général sur ce dossier, pour les très nombreux habitants des communes concernées, qui représentent largement plus de 100 000 personnes.

Réponse en séance, et publiée le 5 mars 2025

AÉROPORT DE BORDEAUX-MÉRIGNAC
M. le président . La parole est à M. Sébastien Saint-Pasteur, pour exposer sa question, no 199, relative à l'aéroport de Bordeaux-Mérignac.

M. Sébastien Saint-Pasteur . Le devenir de l’aéroport de Bordeaux-Mérignac suscite de vives inquiétudes chez les populations environnantes. Sans évoquer l'évolution du trafic, deux sujets se distinguent tout particulièrement : les vols de nuit et l’avenir de la piste secondaire.

Ma question portera sur le second point, car une décision doit être prise rapidement. Nous sommes très nombreux à nous être fortement étonnés que M. le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine vous invite à maintenir cette piste secondaire. Dans la réponse qu’il m’a adressée, il s’appuie sur des avis qui ne sont ni hiérarchisés ni pondérés. Peut-on considérer que l’avis d’une ville de 2 000 habitants, distante de près de 20 kilomètres de l’aéroport, ait la même valeur que celui d’une commune située à proximité immédiate et comptant près de 70 000 habitants ?

Notre étonnement est d’autant plus fort que cet avis contrevient aux recommandations de la Cour des comptes, formulées fin 2023, qui sont claires comme de l’eau de roche : la piste secondaire doit être supprimée. Je cite la Cour : « La rationalité, tant économique qu'opérationnelle et capacitaire, apparaît inviter à la fermeture de cette piste secondaire. » Enfin, un rapport publié cet été par l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) va dans le même sens, si l’on prend la peine de le lire en détail. J’ai pris le soin de transmettre tous les éléments à votre cabinet, que j’ai rencontré il y a deux semaines.

Qu'il s'agisse de l'aspect économique ou de l'impact sur les populations, la suppression de la piste secondaire est largement préférable. Tout indique également que la suppression de la piste secondaire n'aura aucune conséquence sur la sécurité, élément décisif par essence.

Si je mesure le poids de la responsabilité d’une telle décision, je comprends également notre chance que l’intérêt général et la raison l'allègent considérablement, puisque tout plaide pour la suppression de cette piste secondaire. Les éléments sont sur la table, je les ai sommairement évoqués. Dès lors, pouvez-vous vous engager à agir en ce sens, en déclarant que vous êtes favorable à la suppression de la piste secondaire ?

M. le président . La parole est à M. le ministre chargé des transports.

M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports . Cette question n’a pas échappé à l’attention du gouvernement – ni à la mienne, puisque vous rappelez avoir été reçu, il y a quelques jours, par mon cabinet. Les services de l'État se sont pleinement mobilisés afin d'évaluer les conséquences soit du maintien, soit de la suppression de la piste secondaire. Le préfet de la Gironde a organisé une concertation locale ; l'Igedd et la Cour des comptes, vous l'avez indiqué, ont consacré chacune un rapport au sujet.

De celui de l'Igedd, qui constitue aujourd’hui l’analyse la plus complète de la situation, il ressort – peut-être n'en faisons-nous pas la même lecture – qu’aucune des deux options ne présenterait d'avantage financier, sécuritaire, capacitaire ou environnemental significatif. Quant à la concertation, elle a mis en évidence le fait qu'à l’exception des communes situées sous les cônes d’envol de la piste secondaire, les acteurs concernés soit – en majorité, semble-t-il – sont partisans de la conservation de cette piste, soit ne se prononcent pas. Je comprends en effet que sa suppression aggraverait les nuisances sonores pour les populations déjà les plus concernées.

Je rassure en tout cas ceux dont l'habitation se situe sous ces cônes d’envol : la piste n’accueille que 15 % du trafic et cette situation n’a pas vocation à évoluer. Par ailleurs, les mesures prises, sur le fondement des conclusions de l’étude d’impact, selon l’approche équilibrée auront vocation à améliorer la qualité de vie de l'ensemble des riverains.

S'agissant de la piste secondaire, je prendrai une décision – difficile – dans les semaines qui viennent en tenant compte des consultations engagées, des éléments disponibles dans le rapport de la Cour des comptes, dans celui de l’Igedd et dans le bilan de la concertation, mais aussi de ceux récemment fournis par l’aéroport au sujet de l'évolution à moyen terme de l'infrastructure, en cours d’expertise par les services de la direction générale de l'aviation civile.

M. le président . La parole est à M. Sébastien Saint-Pasteur.

M. Sébastien Saint-Pasteur . Monsieur le ministre, le temps que vous choisissez de consacrer à une étude détaillée de la situation vous permettra de transformer les évidences que j'ai énoncées en décision éclairée.

L'évidence, l'Igedd le souligne, c'est que le maintien de la piste secondaire coûterait des dizaines de millions d'euros. La décision éclairée consiste donc à supprimer la piste secondaire.

L'évidence c'est que la piste secondaire affecte un nombre de personnes toujours plus important et, depuis dix ans, en croissance exponentielle. La décision éclairée consiste donc à la supprimer.

L'évidence est que l'avenir de l'aéroport ne peut pas se fonder uniquement sur l'augmentation continue du trafic aérien, mais nécessite une offre complémentaire, que le foncier libéré par la suppression de la piste secondaire permettrait de développer. La décision éclairée consiste donc à la supprimer.

L'évidence consiste à s'appuyer sur des rapports indépendants dont les auteurs n'ont pas intérêt à privilégier une solution ou une autre. L'analyse précise du rapport de l'Igedd – même si nous pouvons avoir une légère divergence à ce sujet – démontre la plus-value de la suppression de la piste secondaire. Quant à la Cour des comptes – l'organisme auquel nous nous en remettons au sujet du système des retraites –, son analyse est sans équivoque. La décision éclairée consiste donc à supprimer la piste secondaire.

L'évidence consiste à planifier le développement d'un territoire dans la durée. Tous les documents d'urbanisme prévoyaient la fin de la piste secondaire – c'était aussi le cas du plan de prévention du bruit dans l'environnement. La décision éclairée consiste donc à supprimer cette piste.

J'espère, monsieur le ministre, que c'est bien une décision éclairée que vous prendrez sur ce sujet.

Données clés

Auteur : M. Sébastien Saint-Pasteur

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports aériens

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 février 2025

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