Production française des moteurs de Formule 1
Question de :
M. Frank Giletti
Var (6e circonscription) - Rassemblement National
M. Frank Giletti appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie quant à la production française des moteurs de Formule 1. Alors que la production des moteurs de Formule 1 (F1) est historiquement réalisée par l'usine française de Viry-Châtillon - actrice centrale de l'innovation technologique depuis près de 50 ans - la direction du groupe Renault, propriétaire de l'écurie Alpine F1, envisage de confier, dès 2026, la motorisation hybride de ses véhicules monoplaces à la société Mercedes, basée en Angleterre. Or une telle décision entraînerait de multiples conséquences pour la France, à commencer par la perte d'un fleuron industriel national, lequel a permis au groupe Renault de remporter douze titres en championnat du monde, au point de pouvoir être légitimement comparé à des programmes nationaux d'excellence tels qu'Ariane, le train à grande vitesse ou encore au système nucléaire. De même, cela affecterait grandement le rayonnement technologique de la France sur la scène internationale, alors que la Formule 1 est une discipline qui comptabilise une audience annuelle de 1,5 milliard de téléspectateur. Mais cette décision s'étendrait également à l'écosystème industriel français puisque 334 emplois, 150 prestataires et de multiples partenaires du groupe Renault se trouvent concernés tandis que les fournisseurs français pourraient perdre près de 100 millions d'euros de retombées économiques habituelles (notamment Mecachrome, société aéronautique située à Aubigny-sur-Nère qui rencontrerait de fortes difficultés sociales). Plus encore, les risques pour la compétitivité technologique sont accrus tandis que cette décision constituerait une atteinte à la souveraineté industrielle. En effet, en pleine transition écologique, la France pourrait perdre ses meilleurs ingénieurs et affaiblir son indépendance technologique tandis que, concomitamment, l'engagement des jeunes talents dans ce secteur, attirés par les métiers de pointe, pourrait être fragilisé. Par exemple, des initiatives comme le concours d'excellence mécanique Alpine, formant les jeunes élèves de la filière mécanique au sein de l'écurie seraient fortement compromises. Enfin, il faut souligner que la filière sportive française représente 2,9 milliards d'euros tandis qu'elle est portée par d'éminentes figures et des évènements de renommée mondiale (tels que les 24 heures du Mans ou encore le Grand Prix de France). L'État français, actionnaire du groupe Renault à hauteur de 15 %, doit agir rapidement pour protéger l'intérêt national et préserver ce pilier stratégique de l'industrie automobile française. Dans cette perspective, il aimerait savoir quelles sont les mesures que compte adopter le Gouvernement sur cette question.
Réponse publiée le 18 mars 2025
Le site de Viry-Chatillon est un site historique et emblématique pour l'industrie et le sport automobile français, celui-ci ayant accompagné depuis 1977 les activités Formule 1 (F1) de Renault puis d'Alpine avec des innovations technologiques et l'obtention des 12 titres mondiaux de Renault (2 en tant qu'écurie et 10 en tant que constructeur). Le site emploie 350 ingénieurs dont 200 dédiés aux activités de F1. Il produit 10 à 15 moteurs F1 par an mais assure également d'autres activités, notamment l'endurance et d'autres développements technologiques axés sur la haute performance des moteurs. En ce qui concerne les activités F1, ce site de développement moteur est complémentaire du site d'Enstone (UK) qui produit les châssis. Le 23 juillet 2024, le groupe Renault a annoncé l'arrêt de la production des moteurs Alpine F1 sur le site de Viry-Chatillon. Cette décision intervient dans un contexte où la Fédération internationale de l'automobile (FIA) a annoncé qu'elle imposera à partir de 2026 une nouvelle réglementation contraignante et coûteuse pour les activités de F1 alors que la transition vers l'électrique nécessite des investissements importants du groupe. Après cette annonce, le groupe Renault a mis en place un plan d'avenir pour le site de Viry-Châtillon avec la création d'Hypertech Alpine, qui permettra de maintenir Viry-Châtillon en tant que centre de développement haute performance et de réemployer les salariés dévolus aux activités de F1 dans cette entité. Le site devrait ainsi être positionné sur des activités d'ingénierie ambitieuses dédiées aux moteurs électriques et hydrogène, aux batteries de haute performance, au développement de véhicules spécifiques. Le site sera amené à travailler notamment sur les projets suivants : - La future « Supercar » Alpine ; - Des activités de R&D sur les cellules et nouvelles chimies de batteries ; - La poursuite des programmes WEC en Endurance et le Dakar. La mise en place d'une cellule de veille F1, pour maîtriser les évolutions techniques dans ce milieu, est également prévue. La transformation du site est donc aujourd'hui engagée vers des activités d'ingénierie d'excellence et tournées vers des enjeux de transition écologique. Les services de l'État resteront attentifs à la mise en place de ce plan d'avenir pour le site de Viry-Châtillon. Depuis 2020 avec le plan de relance automobile, l'État s'est pleinement engagé pour soutenir la transition de la filière automobile française. L'État a prolongé ce soutien proactif dans le cadre du plan France 2030, doté d'un budget de 54 milliards d'euros, qui a permis de lancer plusieurs appels à projets pour soutenir les activités de recherche et développement et les activités d'industrialisation liées au véhicule électrique. En 2023, l'appel à projets « Soutien aux projets d'investissements » pour le véhicule de demain a été ouvert aux sous-traitants et aux constructeurs de la filière automobile pour maintenir et relocaliser en France les infrastructures de production. Il a permis de soutenir 120 projets pour 315 M€ d'aides et 1,5 Mds€ d'investissements, à la suite d'un premier appel à projets qui avait déjà permis de soutenir 82 projets de sous-traitants à hauteur de 90 M€ d'aides pour 380 M€ d'investissements. L'appel à projets « CORAM » reconduit en 2024 soutient les projets de recherche et développement des constructeurs et des sous-traitants dans la filière automobile. L'ensemble des instruments mis en place grâce à France 2030 a créé un cadre de soutien exceptionnel pour renforcer la compétitivité des sites français et créer de l'emploi. Cette ambition se matérialise dans l'objectif France 2030 visant à produire 2 millions de véhicules électriques et hybrides Made in France d'ici 2030. Depuis l'annonce de cet objectif, les groupes Renault et Stellantis ont mis en production dans leurs sites français plus de 20 modèles de véhicules électriques et engagé la transition de leurs sites secondaires vers la production de composants électriques.
Auteur : M. Frank Giletti
Type de question : Question écrite
Rubrique : Automobiles
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 18 mars 2025