Fraudes à la carte bancaire sur internet
Question de :
M. Ian Boucard
Territoire de Belfort (1re circonscription) - Droite Républicaine
M. Ian Boucard appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la recrudescence des fraudes à la carte bancaire sur internet. En effet, trois millions de Français sont victimes de telles fraudes chaque année, révélant ainsi d'importantes failles de sécurité liées à ce moyen de paiement. Les fraudes à la carte bancaire ont considérablement augmenté, avec une hausse moyenne de 7,3 % par an depuis 2016, soit près de 60 % de victimes supplémentaires en 2023 par rapport à 2016. La carte bancaire est d'ailleurs le moyen de paiement le plus sujet à la fraude en valeur, avec un montant atteignant 256,5 millions d'euros au premier semestre 2023. Sa part a augmenté pour atteindre environ 42 % des fraudes au premier semestre 2023 contre 35 % sur la même période en 2022 Selon l'article L. 133-18 du code monétaire et financier, en cas d'opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur dans les conditions prévues, la banque est tenue de procéder au remboursement immédiat des opérations non autorisées. Le remboursement peut toutefois être refusé si l'utilisateur du compte est soupçonné de comportement frauduleux ou de négligence grave. L'encadrement juridique en la matière est rappelé dans une réponse du ministre de l'économie du 22 juin 2023 à la question sénatoriale n° 04481 sur le remboursement des victimes de fraudes bancaires. Celle-ci précise la notion de négligence grave à partir d'exemples issus de textes européens et de la jurisprudence, à savoir la conservation des données utilisées pour autoriser une opération de paiement à côté de l'instrument de paiement et la transmission à un tiers des données personnelles. C'est pourquoi il demande comment les procédures de remboursement sont appliquées et quels moyens de contrôle sont mis en place pour assurer la défense des consommateurs.
Réponse publiée le 3 juin 2025
La fraude aux moyens de paiement est une préoccupation du Gouvernement en ce qu'elle touche l'ensemble des citoyens et en particulier les plus vulnérables. Selon le rapport annuel 2023 de l'Observatoire de la sécurité des moyens de paiement (OSMP), le taux de fraude sur la carte de paiement, qui constitue le principal moyen de paiement du quotidien, est à son plus bas niveau historique, à hauteur de 0,053 %, pour un montant de 496 millions d'euros. Ce taux de fraude historiquement bas s'explique par les effets bénéfiques de l'authentification forte, mise en place par la deuxième directive sur les services de paiement (DSP2), notamment dans le cadre de l'enrôlement des cartes de paiement dans des applications mobiles. Si le taux de fraude sur la carte de paiement est en baisse, le Gouvernement ne néglige pas pour autant le traitement des réclamations des usagers victimes de fraude. À ce titre, l'OSMP a publié en mai 2023 des recommandations de place visant à clarifier les modalités de remboursement des opérations de paiement frauduleuses au bénéfice d'une protection accrue des utilisateurs. Le Gouvernement a appelé l'ensemble des acteurs à s'approprier les recommandations de l'OSMP et à adopter les meilleurs pratiques et comportements à cet égard. Lors du traitement des contestations, les recommandations de l'OSMP éclairent les démarches de remboursement des victimes de fraude auprès de leurs prestataires de services de paiement tout en rappelant la responsabilité des utilisateurs dans la sécurité de leurs moyens de paiement. L'article L. 133-6 du code monétaire et financier prévoit que le consentement du payeur est nécessaire pour qu'une opération de paiement soit considérée comme autorisée. Dans le cas où un consommateur nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, les articles L. 133-18 et suivants s'appliquent s'agissant des modalités de traitement de la contestation et du potentiel remboursement. En pratique, si une transaction contestée par l'utilisateur a fait l'objet d'une authentification forte, alors il revient à l'établissement teneur de compte de déterminer si cette transaction peut être considérée comme autorisée par l'utilisateur. Cette analyse doit s'appuyer sur les différents paramètres associés à la transaction (origine de la transaction, paramètres de l'authentification forte, interactions avec le payeur, etc.), l'existence d'une authentification forte n'étant pas suffisante en soi pour considérer que la transaction a été autorisée. Après analyse du dossier et à défaut d'éléments suffisants pour justifier le caractère autorisé de la transaction ou démontrer une négligence grave de l'utilisateur, l'établissement est tenu de rembourser sans délai l'opération en cause. Par ailleurs, dès lors qu'une transaction contestée par le titulaire du compte n'a pas fait l'objet d'une authentification forte, l'établissement teneur de compte est tenu de la lui rembourser sans délai c'est-à-dire au plus tard à la fin du premier jour ouvré après réception de cette contestation. En cas de litige non résolu avec la banque et après avoir épuisé les deux premiers niveaux de dialogue entre le client et la banque (agence bancaire et le service relations clientèle de l'établissement), le payeur peut se rapprocher du service de médiation auprès de sa banque. Ce service ne se substitue pas aux dispositifs de traitement des réclamations des banques mais offre un ultime recours avant une éventuelle action en justice. L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), en lien avec la Banque de France, assure le suivi de la mise en œuvre des recommandations précitées de l'OSMP. Il ressort d'un premier bilan effectué fin 2024 que les pratiques des prestataires de services de paiement sont globalement satisfaisantes s'agissant des dispositifs de blocage et de contestation et que les recommandations ont eu un impact positif sur les processus de sensibilisation des utilisateurs. Cependant, à ce stade, le niveau général de remboursement des utilisateurs a peu évolué à ce jour. Une nouvelle phase d'évaluation de la mise en œuvre des recommandations par les prestataires de services de paiement français est toujours en cours. Le Gouvernement continuera d'être attentif à la prévention et la lutte contre la fraude ainsi qu'au traitement des contestations pour s'assurer que les recommandations de l'OSMP sont le plus justement appliquées. Le règlement sur les services de paiement, qui remplacera à terme l'actuelle directive sur les DSP2, comprendra une série de mesures visant à combattre plus efficacement la fraude aux paiements tout en renforçant le droit au remboursement des victimes en cas de fraude aux moyens de paiement.
Auteur : M. Ian Boucard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 3 juin 2025