Responsabilité du mal-logement dans les intoxications au monoxyde de carbone
Publication de la réponse au Journal Officiel du 4 mars 2025, page 1400
Question de :
Mme Mathilde Panot
Val-de-Marne (10e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
Mme Mathilde Panot alerte Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins sur la persistance des intoxications au monoxyde de carbone et la politique de prévention et d'action du Gouvernement en la matière. Les intoxications au monoxyde de carbone continuent de tuer chaque année en France. Première cause de mort par intoxication accidentelle en France, on compte 1 300 intoxications par an impliquant plus de 3 000 personnes et une centaine de morts. En 24 heures, alors que l'hiver et donc l'utilisation du chauffage augmente, on compte déjà deux hommes intoxiqués dans les Côtes-d'Armor, cinq à Mâcon dans un même immeuble, une famille avec enfants dont une mère tuée à Paris, ou une dizaine de cas en Guadeloupe en octobre après le blackout de trois jours. Si celui-ci est un « tueur silencieux », le mal-logement et la pauvreté en sont des complices évidents. Les intoxications sont le plus souvent liées au mode de chauffage de l'appartement ou de la maison, quand 12 millions de Français subissent la précarité énergétique, parmi lesquels les 60 % les plus pauvres sont 2 fois plus touchés. 41 % des intoxications au monoxyde de carbone sont dues à un manque de ventilation, quand on compte en France 600 000 logements indignes et 2,8 millions de personnes vivant dans des conditions de logement très difficiles (privation grave de confort ou surpeuplement accentué), parmi lesquels l'absence de ventilation est un motif très récurrent. Avec l'explosion des prix de l'énergie (40 % d'augmentation des prix de l'énergie depuis août 2021), l'utilisation contrainte de chauffages de fortune est devenue un facteur de risque majeur. En Île-de-France, les intoxications liées aux appareils de fortune, braseros, barbecues, casseroles et même pot de fleurs remplis de charbon de bois, ont doublé depuis 2013 et concernent désormais 30 % des victimes. L'agence régionale de santé signale que « certains de ces épisodes sont en lien direct avec des conditions de précarité énergétique, le braséro ou barbecue est alors utilisé comme moyen de chauffage principal ». Enfin, l'inégalité d'accès à l'information est elle aussi un facteur essentiel. La situation est critique : 1 Français sur 3 n'a jamais ou mal entendu parler du monoxyde de carbone, chiffre qui monte à plus d'1 Français sur 2 chez ceux ayant subi une intoxication. L'enquête de l'Institut de veille sanitaire (Invs) de 2015 est à ce titre éloquente, car elle montre que les personnes les plus précaires sont privées d'information à ce sujet et mises à l'écart des politiques de prévention, alors même qu'elles sont mises au risque d'en être les premières victimes. Ainsi, 47 % des personnes peu qualifiées, 47 % des personnes au chômage, 29 % des locataires et même 40 % des ménages ayant subi une intoxication par barbecue ou brasero ne sont informés par personne sur le sujet. Le décret « habitat » applicable depuis le 1er octobre 2023 est à ce titre très inquiétant. La grande régression sociale et sanitaire qu'il opère met en danger des ménages par millions, permettant de déclarer habitables ou de louer un logement en sous-sol, un logement couloir de moins de 2 mètres de large, une pièce sans autre ventilation que la porte ouverte ou les fenêtres, un logement sans autres ouvertures sur l'extérieur que des vasistas ou une porte. Mme la députée souhaiterait savoir quelles politiques de prévention et d'information Mme la ministre compte mettre en œuvre de façon urgente afin de prévenir le nombre de morts dès l'hiver 2024. Elle lui demande d'organiser le contrôle obligatoire des chauffages collectifs et individuels afin que celui-ci ne repose pas exclusivement sur la responsabilité individuelle des victimes de ces intoxications. Elle insiste pour que soient pris les changements réglementaires nécessaires afin d'empêcher toute habitation ou mise en location de logement dont les conditions de ventilation seraient dangereuses et souhaite connaître les perspectives à ce sujet.
Réponse publiée le 4 mars 2025
Les appareils de chauffage et de production d'eau chaude mal entretenus ou mal installés constituent les principales sources des intoxications au monoxyde de carbone, en particulier s'ils sont associés à des conduits d'évacuation mal ou non entretenus. Le ministère chargé de la santé accorde une très grande importance à la prévention des intoxications au monoxyde de carbone. Ainsi, chaque année, sont menées par l'ensemble des acteurs concernés (Agence nationale de santé publique (SpF), Agences régionales de santé (ARS) et ministère chargé de la santé notamment) des actions de sensibilisation à ce risque. Au début de chaque saison de chauffe, les ARS et SpF diffusent des supports d'information grand public, dépliants et affiches, sur les bons gestes à adopter pour prévenir les intoxications, par le biais de relais locaux et de différents professionnels pouvant mener des actions de prévention. Un spot radiophonique est disponible sur le site internet du ministère chargé de la santé et peut être relayé localement. Ce spot concerne notamment le bon usage des groupes électrogènes et des chauffages d'appoint qui peuvent être utilisés de façon inadéquate en cas de coupure d'électricité. Les messages de prévention sont aussi rappelés lors des phénomènes météorologiques extrêmes (tempêtes, grand froid) qui voient le nombre d'intoxications augmenter en lien avec un usage inapproprié des groupes électrogènes et des chauffages d'appoint, notamment. Ce dispositif est complété à l'échelon national par des communiqués de presse. Le décret n° 2023-641 du 20 juillet 2023 relatif à l'entretien des foyers et appareils de chauffage, de cuisine et de production d'eau chaude à combustion et au ramonage des conduits de fumée a codifié dans le code de la santé publique des dispositions concernant l'entretien des foyers et appareils de chauffage, de cuisine et de production d'eau chaude à combustion et le ramonage des conduits de fumée. Elles imposent notamment un entretien des foyers et appareils de combustion et le ramonage des conduits de fumées et des tuyaux de raccordement au moins tous les douze mois (tous les six mois dans le cas du ramonage des conduits de fumée des appareils collectifs). Des arrêtés complémentaires du préfet de département ou du maire peuvent prévoir que le ramonage est effectué plusieurs fois par an, dont une fois pendant la période de chauffe. Le ramonage et l'entretien sont effectués par une personne qualifiée professionnellement, qui fournit aux utilisateurs des conseils concernant le fonctionnement de l'installation. La réalisation de chaque opération de ramonage ou d'entretien donne lieu à la remise d'une attestation. Ces obligations figurent dans les messages de prévention diffusés.
Auteur : Mme Mathilde Panot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 20 janvier 2025
Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 4 mars 2025