Tuberculose bovine
Question de :
M. Freddy Sertin
Calvados (6e circonscription) - Ensemble pour la République
M. Freddy Sertin interroge Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la tuberculose bovine. Il a été interpellé par de nombreux éleveurs bovins de sa circonscription au sujet de la complexité des tests et des protocoles de dépistage. Ces derniers lui ont aussi fait part de la fiscalisation, injuste, des indemnités qu'ils perçoivent suite à l'abatage préventif de leur cheptel. En conséquence, il souhaite savoir ce qu'elle compte entreprendre sur ces deux sujets.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
TUBERCULOSE BOVINE
M. le président . La parole est à M. Freddy Sertin, pour exposer sa question, no 213, relative à la tuberculose bovine.
M. Freddy Sertin . La tuberculose bovine représente un défi considérable pour les éleveurs et les autorités sanitaires dans de nombreux territoires, particulièrement dans le Calvados, département placé sous surveillance renforcée depuis 2015, qui nécessite chaque année des dépistages de troupeaux, parfois sur un périmètre large allant jusqu'à 231 communes. Les protocoles de dépistage actuels sont souvent perçus comme complexes, contraignants et dotés d'une fiabilité malheureusement limitée. Les éleveurs me font régulièrement part de leur frustration face à ces procédures qui entraînent des pertes financières importantes et perturbent le fonctionnement de leurs exploitations agricoles. Les animaux détectés positifs sont abattus pour des tests de confirmation qui, s’ils s'avèrent également positifs, entraînent l'abattage du troupeau dans sa totalité. De telles conséquences sont évidemment appréhendées par les éleveurs.
Pour avoir échangé avec bon nombre d'entre eux, mais également avec des élus qui partagent leur inquiétude, je constate à quel point les mesures d'abattage lors de la contamination d'un seul animal sont problématiques. La situation prend alors une tournure dramatique pour les éleveurs et le territoire car aux pertes financières s'ajoute l'impact émotionnel. La disparition de leurs bêtes plonge les éleveurs dans une détresse profonde : ils voient des années de travail anéanties, certains ressentent de la culpabilité voire des doutes sur la poursuite même de leur activité.
Bien que la France détienne le statut indemne de la maladie depuis 2001, des foyers persistent chaque année dans certaines régions. Afin de poursuivre sans obstacles la commercialisation des produits laitiers et de la viande, notre pays et sa filière d'élevage ont tout intérêt à conserver ce statut, mais l'obsolescence des tests utilisés et la radicalité des mesures d'abattage posent un problème.
La question de la fiscalisation des indemnités perçues à la suite de l'abattage préventif des animaux infectés constitue un autre sujet de préoccupation. Les éleveurs estiment que ces indemnités, destinées à compenser les pertes économiques liées à l'abattage contraint de leur cheptel, ne devraient pas être soumises à l'impôt si elles sont réintégrées dans leur outil de production. Ils considèrent cette fiscalisation comme une double peine, qui aggrave les pertes en trésorerie de leur exploitation agricole ; je partage avec eux ce sentiment d'injustice.
Face à ces problèmes, quelles mesures concrètes sont envisagées pour simplifier et moderniser les protocoles sanitaires, et pour exonérer d'impôt les indemnisations versées aux éleveurs ? À l'heure où nous faisons tout pour soutenir notre agriculture et notre souveraineté alimentaire, il est crucial de ne pas oublier ceux qui contribuent à nourrir notre population au quotidien.
M. le président . La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche . Mme Genevard, retenue, m'a demandé de vous répondre. Le ministère de l'agriculture est pleinement mobilisé face à la tuberculose bovine, maladie infectieuse qui affecte les bovins et se transmet également à l'homme. C'est une maladie d'évolution lente, qui provoque d'importants impacts économiques dans les élevages. La lutte contre cette maladie est un enjeu de santé publique.
En 2024, quatre-vingt-un foyers de tuberculose ont été gérés par l'État. Le dépistage de cette pathologie, particulièrement complexe, repose sur des tests allergiques et des abattages diagnostics. Actuellement, aucun autre test n'est disponible sur le marché. L'État met tout en œuvre à chaque suspicion pour tester au plus vite les élevages tout en accompagnant les éleveurs dans cette épreuve, qu'on sait terrible. En 2024, il a reconduit la feuille de route « tuberculose » pour la période 2024-2029 afin d'atteindre deux objectifs : améliorer les stratégies de surveillance et d'assainissement d'une part, et mieux accompagner les élevages touchés d'autre part.
Le travail est déjà bien entamé et se poursuivra tout au long de l'année. Une évolution des protocoles d'abattage sélectif sera notamment proposée en lien avec les experts scientifiques et en concertation avec les représentants des éleveurs. En Normandie, dans votre circonscription, une feuille de route locale a été déployée sous l'autorité du préfet pour décliner les mesures, et des engagements ont été pris pour limiter au maximum les mesures de blocage dans les exploitations.
Toujours dans le cadre de cette feuille de route, les équipes évalueront les évolutions fiscales demandées par les éleveurs. Les indemnisations étant un revenu, elles ne peuvent, en principe, échapper à un régime fiscal ; nous analyserons néanmoins les conséquences d'une défiscalisation.
La lutte contre la tuberculose bovine nécessite une collaboration entre les autorités sanitaires et les éleveurs pour maintenir le statut indemne de la France, essentiel pour la filière ; il s'agit de préserver les marchés à l'export et surtout de protéger la santé humaine et animale.
M. le président . La parole est à M. Freddy Sertin.
M. Freddy Sertin . Je m'interroge également sur la possibilité de renforcer la recherche et l'innovation dans le domaine de la santé animale, afin de développer des outils de diagnostic plus précis et des stratégies de contrôle mieux adaptées aux réalités du terrain. Cela permettrait d'épargner les animaux sains, et les éleveurs auraient moins de mal à s'en sortir. L'expérimentation d'un vaccin sur la faune sauvage, vecteur non négligeable de la tuberculose bovine, est aussi une piste à explorer. Je le redis : dans un contexte de mobilisation en faveur de l'agriculture, il est crucial de soutenir ces professionnels qui assurent la souveraineté alimentaire de notre pays.
Auteur : M. Freddy Sertin
Type de question : Question orale
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2025