Question écrite n° 2163 :
Régulation insuffisante des contenus publicitaires illicites sur les plateformes

17e Législature

Question de : Mme Violette Spillebout
Nord (9e circonscription) - Ensemble pour la République

Mme Violette Spillebout appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'intelligence artificielle et du numérique, sur les défis persistants liés à la régulation des contenus publicitaires sur les plateformes numériques, en particulier ceux liés à l'utilisation frauduleuse de marques et d'images par des entités non autorisées. Le cas récent du groupe Barrière, qui a subi une usurpation extensive de sa marque par des casinos en ligne illégaux sur les plateformes de Meta, illustre de manière frappante cette problématique. Ces pratiques illicites reflètent une tendance alarmante affectant de nombreux groupes et sociétés françaises ainsi que des personnalités qui pâtissent du manque de régulation efficace par les plateformes. Le digital services act (DSA) européen impose aux sites la responsabilité de contrôler et modérer les contenus pour prévenir de telles escroqueries. Toutefois, le nombre de cas de non-conformité reste significatif dans les mécanismes de contrôle interne des plateformes. Par ailleurs, si la loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN), définitivement adoptée le 10 avril 2024 par l'Assemblée nationale, permet de transposer en droit interne les règlements européens DSA, le texte ne contient pas de mesures relatives à la publicité. Au regard de cette absence de régulation et face à la sophistication croissante des tactiques frauduleuses en ligne, elle lui demande ce qu'elle envisage de mettre en œuvre pour renforcer la surveillance et l'application des régulations comme le DSA.

Réponse publiée le 25 mars 2025

Le Gouvernement est pleinement conscient de la menace que la contrefaçon en ligne peut représenter, et ce à la fois pour la réputation de nos entreprises et pour la sécurité de nos concitoyens. Dans l'optique de limiter l'ampleur de ce phénomène et d'offrir une réponse rapide aux marques victimes de contrefaçon, le code de la propriété intellectuelle prévoit, en son article L. 716-6, la possibilité pour toute personne disposant de la qualité pour agir en contrefaçon d'agir de manière urgente auprès de la juridiction civile compétente – dans le cadre d'une procédure de référé – afin d'« ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. » Sur ce fondement, le groupe Barrière a assigné la société Meta Platforms Ireland (Meta) devant le tribunal judiciaire de Paris qui, par ordonnance du 11 janvier 2024, a ordonné à Meta de mettre en œuvre des mesures de filtrage afin de prévenir la diffusion de publicités illicites reproduisant les marques Barrière – dans le but de promouvoir des jeux de casino en ligne sur ses plateformes Facebook, Messenger et Instagram. Le juge d'exécution du tribunal judiciaire de Paris a, au surplus, assorti cette obligation d'une astreinte de 10 000 euros par jour de retard. Ces éléments montrent bien que le cadre judiciaire actuel offre des moyens de défense significatifs aux titulaires de marques. Au-delà du champ judiciaire, l'adoption du règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques (DSA) est venue renforcer le cadre juridique visant à responsabiliser les fournisseurs de contenus en ligne – et ce pour lutter contre les contenus illicites et introduire plus de transparence, par exemple dans le domaine de la publicité sur les plateformes. Pour rappel, un contenu publicitaire portant contrefaçon d'une marque est illicite et répond, à ce titre, du DSA. Ce nouveau cadre reconnaît à certaines autorités administratives un pouvoir d'intervention directe, et ce à travers les mécanismes d'injonction administrative d'agir contre les contenus illicites identifiés. Concernant les dispositions en matière de transparence de la publicité sur les plateformes en ligne, le règlement DSA dispose, en son article 26, que les fournisseurs de plateformes en ligne qui présentent de la publicité sur leurs interfaces sont tenus à ce que, pour chaque publicité spécifique présentée à un utilisateur, ce dernier puisse se rendre compte que les informations sont de la publicité (i), identifier la personne pour le compte de laquelle la publicité est présentée et celle ayant payé pour la publicité (si celle-ci est différente) (ii), et comprendre les principaux paramètres retenus par la plateforme dans le choix de la publicité soumise à l'utilisateur (iii). Concernant plus spécifiquement les obligations incombant à la catégorie des fournisseurs de « très grandes plateformes » dont fait partie Meta, les articles 34 et 35 du règlement DSA prévoient des obligations d'évaluation et de modération des « risques systémiques » susceptibles de découler de la conception ou du fonctionnement des services de ces plateformes – ou susceptibles de découler de l'utilisation faite de leurs services. Quoi qu'il en soit, la France est pleinement engagée dans la lutte contre ces pratiques préjudiciables aux consommateurs en ligne. En effet, les règles de coopération transfrontalière entre autorités nationales des États membres et la Commission européenne permettent aux autorités françaises compétentes de signaler toute situation de non-respect des dispositions du règlement DSA par les fournisseurs de plateformes établis hors de France. Le risque de « publicité frauduleuse » découlant de l'utilisation des services d'une très grande plateforme pourrait ainsi, le cas échéant, être signalé aux services de la Commission – dans le cadre de sa mission de surveillance des très grandes plateformes. Enfin, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes reste entièrement compétente dans la lutte contre les pratiques commerciales déloyales et dispose, à ce titre, de toute latitude dans le lancement d'enquêtes sur la base des dispositions du code de la consommation – et ce à l'égard de toute entreprise établie ou non en France.

Données clés

Auteur : Mme Violette Spillebout

Type de question : Question écrite

Rubrique : Publicité

Ministère interrogé : Intelligence artificielle et numérique

Ministère répondant : Intelligence artificielle et numérique

Dates :
Question publiée le 19 novembre 2024
Réponse publiée le 25 mars 2025

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