Question écrite n° 2214 :
Disparition des tombes des anciens combattants et avec de la mémoire collective

17e Législature

Question de : M. Sébastien Chenu
Nord (19e circonscription) - Rassemblement National

M. Sébastien Chenu attire l'attention de M. le ministre des armées et des anciens combattants sur l'état préoccupant des milliers de tombes de soldats morts pour la France, aujourd'hui en ruines, emportant avec elles une part précieuse de notre mémoire collective. Chaque 11 novembre, la Nation rend hommage aux soldats tombés pour la France lors de la Première Guerre mondiale. Pourtant, de nombreuses sépultures de ces combattants sont de plus en plus menacées d'abandon et de destruction, faute de descendants pour en assurer l'entretien. L'association Le Souvenir Français joue un rôle essentiel dans la préservation de ces sépultures, souvent proches de l'oubli. Malgré son engagement remarquable, ses moyens restent insuffisants face à l'ampleur de la tâche. Chaque jour, des tombes de soldats de 1914-1918 tombent en déshérence ou, lorsque les concessions arrivent à échéance, risquent d'être supprimées, reléguant ces sacrifices au silence des ossuaires. Cette situation alarmante pourrait également se reproduire pour les combattants de la Seconde Guerre mondiale. Avec le passage du temps, les sépultures de ces héros deviennent elles aussi vulnérables, menaçant d'effacer la mémoire de ceux qui ont combattu pour la liberté du pays. Dans ce contexte, M. le député souhaite connaître les mesures envisagées pour prévenir et éviter que les sépultures des combattants de la Seconde Guerre mondiale ne subissent le même sort que celles de leurs prédécesseurs. Il souhaiterait notamment savoir : combien de tombes pourraient être concernées dans les années à venir ? Quels moyens financiers et humains pourraient être mobilisés pour assurer la préservation et l'entretien de ces sépultures ? Quelles actions le Gouvernement envisage-t-il pour garantir que la mémoire de ces soldats morts pour la France ne soit pas condamnée à l'oubli dans les cimetières communaux ? Il lui demande quelles sont les perspectives à ce sujet.

Réponse publiée le 11 mars 2025

Toute personne ayant reçu la mention « Mort pour la France » a droit, conformément à l'article L.522-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), à une sépulture perpétuelle entretenue par l'État. Dans ce cadre, en France métropolitaine, près de 900 000 personnes, militaires et civiles, reposent en sépultures perpétuelles dans les 275 nécropoles nationales et 2 170 carrés militaires communaux. Le ministère des Armées en assure la conservation et l'entretien.  L'État a cependant pris en compte le désir de certaines familles d'inhumer leurs proches dans des sépultures familiales. Il permet ainsi aux familles d'exercer un libre choix quant à la restitution du corps du défunt, dans les conditions fixées par la loi et le règlement (aujourd'hui codifiée aux articles L.521-1 et R.521-1 du CPMIVG). Cette faculté a été étendue par l'article L521-2 à d'autres personnes physiques ainsi qu'à des personnes morales. Conformément à l'article L.521-3 du CPMIVG, la restitution aux familles fait perdre le droit à la sépulture perpétuelle aux frais de l'État. En conséquence, toutes ces sépultures sont sorties du champ de compétence du ministère et, puisqu'elles ont acquis le statut de sépultures privées, sont régies par les dispositions des articles L.2223-1 et suivants et R.2223-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT). S'agissant de la Première Guerre mondiale, le ministère des armées évalue le nombre de corps identifiés et restitués aux familles à 300 000 (essentiellement des militaires). S'agissant de la Seconde Guerre mondiale, le ministère estime que 80 % des personnes identifiées (militaires, résistants, déportés, ou civils morts par faits de guerre) ont été restituées. En raison de leur spécificité historique et du manque de sources archivistiques fiables, les militaires et les civils décédés lors des conflits de décolonisation, notamment en Indochine et en Afrique du Nord, restitués à leurs familles est à ce jour difficilement estimable. Les sépultures des corps restitués aux familles ne relevant plus des compétences de l'État, le ministère des armées n'a pas non plus de responsabilité dans leur suivi ni dans l'évaluation de leur état. Les communes confrontées à l'abandon de concessions où reposent des personnes attributaires de la mention « Mort pour la France » disposent, en revanche, de compétences utiles pour prévenir ces situations. Certaines communes, en vertu de l'article R.521-9 du CPMIVG, ont pu, par une délibération du conseil municipal, accorder une concession perpétuelle et gratuite dans le cas d'une personne illustre, ou qui a rendu un service éminent à la commune, dont les personnes attributaires de la mention « Mort pour la France » peuvent faire partie, même si la concession demeure de nature privée. D'autres communes décident de prendre en charge l'entretien de sépultures, ce qui va dans le sens de la préservation des mémoires locales. Lorsque l'état des sépultures de personnes mortes pour la France restituées aux familles ne permet pas leur maintien, les communes peuvent mettre en œuvre les procédures de reprise de concessions, prévues par les dispositions des articles L.2223-15 et suivants et R.2223-12 et suivants du CGCT, et transférer les restes mortels dans un ossuaire. Le ministère encourage, dans ce cas, les communes à honorer et perpétuer la mémoire de ces hommes et femmes, par l'apposition de plaques commémoratives mentionnant le nom et la qualité de « Mort pour la France » des défunts. Les communes peuvent aussi se rapprocher des associations mémorielles œuvrant pour la conservation des sépultures de personnes attributaires de la mention « Mort pour la France » dont le corps a été restitué, afin d'anticiper les situations d'abandon des concessions et mettre en œuvre des mesures de conservation le plus tôt possible. Au-delà de la question de l'entretien des tombes des soldats tombés au champ d'honneur et dont les corps ont été restitués aux familles, la mémoire des morts pour la France est entretenue par le travail que conduit le ministère des armées avec le site internet "Mémoires des hommes". Ce dernier met à la disposition du public des documents numérisés et des informations issues des fonds d'archives conservées par le ministère des armées. Il permet de rendre hommage individuellement à la mémoire des morts pour la France comme à celle des morts pour le service de la Nation.

Données clés

Auteur : M. Sébastien Chenu

Type de question : Question écrite

Rubrique : Anciens combattants et victimes de guerre

Ministère interrogé : Armées et anciens combattants

Ministère répondant : Mémoire et anciens combattants

Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 11 mars 2025

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