Nombre alarmant d'enfants qui se trouvent actuellement à la rue
Question de :
M. Emmanuel Fernandes
Bas-Rhin (2e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Emmanuel Fernandes appelle l'attention de Mme la ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement, sur le nombre alarmant d'enfants qui se trouvent actuellement à la rue. En 2022, son prédécesseur, M. Olivier Klein, affirmait : « aucun enfant ne doit dormir à la rue cet hiver ». Ce projet doit commencer par la mise à l'abri d'urgence de toutes les personnes et encore plus des enfants à la rue. Selon l'UNICEF, ce sont près de 2 000 enfants qui seraient aujourd'hui sans solution d'hébergement, soit une augmentation de 20 % en un an. Cette situation indigne a été pointée par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU. Selon l'article 28 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ratifiée par la France, chaque enfant a droit à l'éducation et à des possibilités d'apprentissage de qualité. Or quelles possibilités d'apprentissage un enfant a-t-il après avoir passé la nuit dehors ? Comment peut-il se reposer pour intégrer les savoirs ? Comment pourrait-il même étudier et faire ses devoirs alors qu'il a froid ? Partout en France, ce sont les citoyens et citoyennes qui se retrouvent à pallier les graves manquements de l'État sur le sujet. Dans la circonscription de M. le député à Strasbourg, les personnels du collège Lezay-Marnésia ont dû occuper le collège pendant plusieurs nuits et, notamment grâce au soutien des parents d'élèves et à une médiatisation exerçant une pression sur les pouvoir publics, ont pu obtenir un toit pour trois familles à la rue. Que dire de ce pays où des professeurs sont forcés de s'engager personnellement dans un rapport de force avec les pouvoirs publics pour simplement permettre d'atteindre l'assouvissement d'un besoin primaire pour leurs élèves, celui de se loger, besoin qui est un droit élémentaire en principe garanti par la loi ? Quelle image la France renvoie-t-elle aux élèves des établissements, à qui l'on enseigne notamment l'égalité, la fraternité, le respect de la loi et la responsabilité ? C'est parce que l'État faillit que les citoyens et citoyennes prennent le relais. M. le député tient ici à féliciter chaleureusement les personnels et parents du collège Lezay-Marnésia, mais aussi ceux de l'école Albert -le-Grand et de tous les établissements mobilisés, qui ont réussi à faire loger des enfants à la rue. D'après le journal Rue89 Strasbourg, depuis novembre 2024, au moins huit établissements scolaires de l'eurométropole de Strasbourg ont été le théâtre de mobilisations citoyennes qui, à mi-février, avaient permis l'hébergement en urgence de 27 familles. Pourtant, selon une enseignante membre du syndicat SNUipp : « La hiérarchie nous envoie des rappels au devoir de réserve. C'est une forme de pression [...] : on nous demande de signaler les enfants SDF, mais de ne pas manifester aux côtés des parents d'élèves. Et ça fonctionne, certains enseignants sont réticents à rejoindre la mobilisation». L'éducation nationale cherche donc à étouffer ces mobilisations, quelle honte ! Et parallèlement, le silence et l'inaction de la préfecture sur le sujet est glaçant. L'État est totalement défaillant, le Gouvernement est indigne ! À Strasbourg il a fait entre -5 et -10 degrés la nuit. Le préfet du Bas-Rhin a déclaré le plan « grand froid » niveau 1. À ce titre, 13 places d'hébergement ont été ouvertes, alors qu'au moins 75 enfants sans abris sont signalés dans la métropole (et environ 700 personnes en tout). Sur quels critères s'est-il fondé pour ces 13 places ? Pourquoi seulement 13 personnes auraient droit à une nuit au chaud ? Et comment sont-elles sélectionnées parmi les centaines de personnes à la rue ? La question de M. le député est donc simple. Qu'attend le Gouvernement pour agir ? Qu'attend-il pour mettre de réels moyens dans l'hébergement d'urgence, le logement social et l'accompagnement par des travailleurs sociaux des personnes à la rue ? Qu'attend-il pour donner la consigne aux préfets de réquisitionner tous les bâtiments qui sont à leur disposition pour que plus un enfant n'aille à l'école après avoir passé la nuit dehors ? Pour rappel, conformément à l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles, « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence ». Afin de garantir ce droit, l'article L. 641-1 du code de la construction et de l'habitat donne au préfet un pouvoir de réquisition afin de loger les personnes dépourvues de logement. Pourquoi les préfets ne se saisissent-ils pas de cet outil pour héberger les enfants qui dorment dans le froid ? M. le député parle ici uniquement de la situation des enfants et invite Mme la ministre à détailler les mesures d'urgence qu'elle prend lorsqu'il fait froid. Mais il s'agit de ne pas oublier que 350 000 personnes sont à la rue en France, dont 735 ont trouvé la mort l'an dernier. Que les hébergements d'urgence sont saturés parce que la production de logement social a reculé alors que 2,7 millions de personnes sont en attente. Et que pendant que des enfants grelottent la nuit faute de pouvoir être logés, le patrimoine des 500 personnes les plus riches du pays a plus que doublé depuis l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron. Liberté, égalité, fraternité : ces mots au fronton des écoles ne doivent pas être qu'un slogan creux. Il est temps que les pouvoirs publics mettent en œuvre tous les moyens dont ils disposent pour que tous les enfants aient dormi au chaud lorsqu'au matin, ils passent la porte de l'école, surmontée de cette devise républicaine. Il souhaite connaître ses intentions à ce sujet.
Auteur : M. Emmanuel Fernandes
Type de question : Question orale
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : Logement
Ministère répondant : Logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2025