Unédic et travailleurs frontaliers
Question de :
Mme Sophie Blanc
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Rassemblement National
Mme Sophie Blanc attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la question pressante du déséquilibre financier lié à l'indemnisation des travailleurs frontaliers au sein du régime d'assurance chômage français, géré par l'Unédic. Ce déséquilibre, non seulement croissant mais structurel, repose sur un cadre européen qui montre ses limites en laissant la charge d'indemnisation principalement à la France, alors que les cotisations chômage sont perçues dans les pays d'emploi. Selon la réglementation européenne en vigueur, les cotisations d'assurance chômage doivent être versées dans le pays où les travailleurs frontaliers exercent leur activité professionnelle. Ainsi, un travailleur frontalier français employé en Suisse ou au Luxembourg paie ses cotisations chômage dans le pays de son emploi. Cependant, lorsqu'il devient chômeur, c'est la France, son pays de résidence, qui prend en charge son indemnisation. Or le montant des compensations versées à la France par les pays voisins, destinées à équilibrer les coûts d'indemnisation, s'avère bien en deçà des dépenses réelles engagées par l'Unédic. Cette situation entraîne un déséquilibre significatif et croissant entre les cotisations perçues par les pays d'emploi et les dépenses assumées par la France pour l'indemnisation de ces travailleurs, plaçant le régime d'assurance chômage français dans une situation de précarité financière. En 2023, ce déséquilibre a atteint un niveau critique : les dépenses d'indemnisation des travailleurs frontaliers se sont élevées à 1 milliard d'euros, tandis que les remboursements en provenance des pays voisins n'ont totalisé que 200 millions d'euros, soit un différentiel de 800 millions d'euros. Sur le long terme, cet écart a généré un déséquilibre budgétaire préoccupant. Depuis 2011, les dépenses d'indemnisation des travailleurs frontaliers s'élèvent, en cumulé, à 11,2 milliards d'euros, alors que les compensations reçues des pays frontaliers s'établissent à seulement 2,2 milliards d'euros. En d'autres termes, ce sont 9 milliards d'euros de déficit qui pèsent sur le régime d'assurance chômage français, un fardeau qui, dans un contexte de dette publique déjà alarmante, compromet sérieusement la viabilité de l'Unédic et alourdit la dette publique nationale, au détriment des cotisants français qui, eux, subissent cette charge indirectement. Cette situation s'aggrave chaque année et crée est non seulement un déséquilibre économique mais aussi une injustice pour les contribuables et cotisants français. Ce désavantage financier structurel non seulement alourdit considérablement la dette de l'Unédic, qui atteignait déjà 59,3 milliards d'euros à la fin de l'année 2023, mais il pourrait également, à terme, nuire à la capacité du régime d'assurance chômage à garantir un niveau d'indemnisation adéquat pour tous les chômeurs résidents en France, frontaliers ou non. Les autres pays européens appliquent des règles différentes pour mieux équilibrer leurs finances. Par exemple, en Suisse, un travailleur frontalier cotise au régime d'assurance suisse et en cas de chômage, le pays d'emploi ne contribue que de manière symbolique aux indemnités chômage, récupérant ainsi un grand nombre d'emplois transfrontaliers en raison d'avantages salariaux attractifs. Le Luxembourg, également, est un pays où le nombre de travailleurs frontaliers a considérablement augmenté, représentant une part importante des dépenses d'indemnisation. Mais ce pays, comme d'autres, n'indemnise qu'une fraction du coût supporté par la France, creusant chaque année un fossé économique plus large. Cette situation place la France dans une position de désavantage économique évident et soulève des interrogations sur la justice du système en place pour les finances publiques françaises. M. le ministre va-t-il fournir un bilan complet et détaillé de l'impact financier de ce système déséquilibré sur les comptes de l'Unédic ? Quelles mesures concrètes M. le ministre envisage de mettre en place pour corriger cette situation et notamment le ministère a-t-il l'intention de revaloriser les montants compensatoires versés par les pays frontaliers, de manière à refléter les coûts réels d'indemnisation supportés par l'Unédic ? Envisage-t-il une révision des accords bilatéraux avec les pays voisins ? Cette démarche pourrait-elle être appuyée sur des données récentes concernant les coûts effectifs pour la France, afin de négocier des termes plus justes et proportionnés aux charges assumées ? Comment M. le ministre compte-t-il engager les instances européennes dans un dialogue visant à harmoniser les pratiques de prise en charge des travailleurs frontaliers et à faire évoluer la réglementation dans le sens d'une meilleure répartition des charges entre pays d'emploi et de résidence ? Enfin, quelle stratégie sera mise en place pour faire face aux besoins croissants de financement du régime d'assurance chômage, dans un contexte où la dette de l'Unédic atteint des niveaux critiques et pourrait impacter sa capacité à indemniser efficacement tous les chômeurs résidents en France ? Mme la députée insiste également sur la nécessité d'agir rapidement face à une situation qui, si elle n'est pas réformée, pourrait fragiliser durablement le régime d'assurance chômage français et indirectement impacter les droits des demandeurs d'emploi. Elle lui demande de se positionner clairement sur ces enjeux cruciaux pour l'avenir du régime d'assurance chômage et la justice financière entre pays européens.
Auteur : Mme Sophie Blanc
Type de question : Question écrite
Rubrique : Chômage
Ministère interrogé : Économie, finances et industrie
Ministère répondant : Économie, finances et industrie
Date :
Question publiée le 26 novembre 2024