Délai de rétractation pour les achats réalisés lors de foires commerciales
Question de :
Mme Constance de Pélichy
Loiret (3e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
Mme Constance de Pélichy interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargée de la consommation, sur le droit de rétractation pour les achats réalisés lors des foires commerciales. Par la loi « Hamon » de 2014, le délai de rétractation pour une vente réalisée en ligne ou par démarchage téléphonique a été porté à 14 jours par l'article L. 221-18 du code de la consommation, dans un souci de protection du consommateur, victime parfois de techniques de ventes agressives. Cette loi a transposé dans le droit français les dispositions prévues par la directive 2011/83 de l'Union européenne. Toutefois, le périmètre du droit de rétractation de cette directive est plus large que celui de la loi « Hamon ». En effet, le droit de rétractation de 14 jours est ouvert par la directive à toutes les ventes réalisées « hors établissement ». Les foires commerciales, étant des évènements ponctuels et éphémères ayant cours dans des halls d'exposition, paraissent répondre à cette définition. C'est d'ailleurs l'interprétation qu'en ont faite la plupart des pays européens, à l'instar de la Lituanie, la Suède ou la Bulgarie. Étendre ce délai de rétractation aux ventes réalisées dans les foires commerciales est nécessaire, au regard de l'offensivité des techniques de vente et de la pression acheteuse qui règne dans ces foires, lesquelles pouvant faire perdre leurs repères financiers aux visiteurs. En plus du vice de consentement occasionné par ces techniques, certains exposants parviennent à vendre des services bien au-delà de leur prix réel. Cela est d'autant plus préoccupant que, dans de nombreux cas, les ventes correspondent à budgets conséquents, de plusieurs milliers d'euros, pour des personnes avec des revenus modestes. Cela peut être le cas pour des installations de panneaux photovoltaïques, ou la construction de vérandas par exemple. Mme la députée demande donc à la Mme la secrétaire d'État quelles mesures elle entend prendre pour mieux protéger les consommateurs dans les situations décrites ci-dessus. À l'heure où l'inflation obère le pouvoir d'achat des ménages, la France ne peut pas se féliciter d'être moins-disante que ses voisins européens en matière de protection des droits du consommateur. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.
Réponse publiée le 10 décembre 2024
L'obligation qui impose aux professionnels de faire bénéficier les consommateurs d'un droit de rétractation, prévue à l'article L. 221-18 et suivants du code de la consommation, concerne les contrats à distance (notamment les contrats conclus sur internet) et les contrats hors établissement. Cette réglementation est issue de la transposition de la directive européenne 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs qui est d'harmonisation maximale. En dehors de ces contrats, par exemple pour un contrat conclu dans un établissement commercial, le choix revient au professionnel de proposer ou non aux consommateurs la possibilité de revenir sur son achat, ceci n'étant pas une obligation légale. Les contrats conclus sur les foires et salons n'entrent pas dans la catégorie des contrats conclus à distance, ni dans celle des contrats conclus hors établissement, et ne sont donc pas soumis aux dispositions précitées du code de la consommation. Il convient, cependant, d'indiquer que les contrats hors établissements s'entendent de ceux conclus en dehors d'un établissement commercial, mais également de ceux conclus dans un établissement commercial ou à distance immédiatement après que le consommateur a été sollicité « personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes » (article L. 221-1 du code de la consommation). La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a été amenée à préciser la notion « d'établissement commercial » défini dans la directive 2011/83 comme le lieu où le professionnel exerce son activité « de manière permanente ou habituelle ». À cet égard, dans un arrêt CJUE, 7 août 2018 Verbraucherzentrale Berlin eV C-485/17, la Cour a précisé que le lieu où le professionnel exerce son activité « de manière habituelle » ne devait pas être compris selon une acception temporelle mais doit être compris « comme renvoyant au caractère normal que revêt, sur le site concerné, l'exercice de l'activé en cause » (point 39). En conséquence, le stand d'une foire ou d'un salon constitue bien un établissement commercial puisque l'exercice de l'activité de vente sur ce lieu revêt un caractère normal ou courant. Cette interprétation de la CJUE est confortée par le considérant 22 de la directive 2011/83/UE précitée qui souligne : « Il convient de considérer comme établissement commercial tout établissement, de quelque type que ce soit (qu'il s'agisse par exemple d'un magasin, d'un étal ou d'un camion), servant de siège d'activité permanent ou habituel au professionnel. Les étals dans les marchés et les stands dans les foires devraient être considérés comme des établissements commerciaux s'ils satisfont à cette condition. ». Toutefois, un consommateur qui conclut un contrat sur un stand de foire ou de salon peut néanmoins se rétracter de ce contrat s'il a été conclu immédiatement après avoir été personnellement et individuellement sollicité alors qu'ils se trouvaient dans un lieu qui n'est pas un établissement commercial, par exemple dans le hall ou l'allée d'exposition de la foire (cf. ordonnance CJUE, 17 décembre 2019 B&L Elektrogeräte GmbH C-465/19). Afin d'alerter les consommateurs sur l'absence de droit de rétractation dans le cadre des contrats conclus sur les stands de foires et salons, le législateur a imposé au professionnel d'afficher sur le stand qu'il occupe, un panneau informant les consommateurs sur l'absence de droit de rétractation pour les contrats conclus sur ces lieux. Cette information doit être reprise dans un encadré apparent, rédigée en des termes clairs et lisibles, dans les offres de contrat faites dans les foires et les salons (articles L. 224-59 à L. 224-62 du code de la consommation et arrêté du 2 décembre 2014 relatif aux modalités d'information sur l'absence de délai de rétractation au bénéfice du consommateur dans les foires et salons). Par ailleurs, lorsque le contrat conclu sur un stand de foire ou de salon est assorti d'un crédit affecté, ce qui est souvent le cas pour des biens d'un certain montant, le consommateur bénéficie d'un droit de rétractation pour le crédit servant à financer son achat. S'il l'exerce, le contrat de vente financé par le crédit est alors résolu de plein droit (article L. 224-62 du code de la consommation). En outre, les pratiques commerciales trompeuses dont peuvent être victimes, le cas échéant, les consommateurs dans les foires et les salons sont sanctionnées de deux ans d'emprisonnement, voire, désormais, de trois ans d'emprisonnement lorsqu'elles sont suivies de la conclusion d'un contrat et d'une amende de 300 000 euros, pouvant être portée à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel. Les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) font preuve d'une grande vigilance et restent fortement mobilisés sur ces sujets. Des enquêtes portant sur le respect des réglementations précitées par les professionnels dans les foires et salons sont régulièrement réalisées.
Auteur : Mme Constance de Pélichy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Consommation
Ministère interrogé : Consommation
Ministère répondant : Consommation
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 10 décembre 2024