Attaque de loups en Saône-et-Loire, ce sont les éleveurs qu'il faut protéger
Question de :
M. Aurélien Dutremble
Saône-et-Loire (3e circonscription) - Rassemblement National
M. Aurélien Dutremble alerte Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la recrudescence des attaques de loups sur les troupeaux dans les régions de France et particulièrement en Saône-et-Loire. Alors qu'ils avaient disparu depuis 1937, les loups gris sont réapparus en novembre 1992 dans le parc national du Mercantour. Aujourd'hui, la croissance de la population lupine est devenue endémique sur la quasi-totalité du territoire français au point de menacer l'élevage et le pastoralisme. Face à cette situation hors de contrôle qui représente 1 104 loups et plus de 12 000 animaux prédatés par an dans 60 des départements, il est indispensable de prendre des mesures pour réguler efficacement la population lupine. Dans le département de Saône-et-Loire, le constat des dommages sur les troupeaux transmit régulièrement par la direction départementale des territoires, aux membres du comité loup fait apparaître une situation chaque mois plus dramatique. Depuis le mois de janvier 2024, ce sont ainsi plus d'une centaine d'attaques qui sont imputables au loup faisant plus de 200 animaux d'élevage tués (ovins, caprins et bovins) et plus de 70 blessés. À titre d'exemple, sur le territoire de la commune de Saint-Bérain-sur-Dheune, les éleveurs ont subi en juillet 2024 leur 19e attaque de loup. Les répercussions de ces attaques sont dévastatrices et affectent sévèrement l'économie locale et l'équilibre psychologique des exploitants. La fréquence et la violence de ces incidents mettent en péril la survie des exploitations. On ne peut abandonner plus longtemps la biodiversité et l'économie rurale aux loups qui prolifèrent sans limite. Il est primordial pour les éleveurs d'être autorisés à se prémunir des attaques sur leurs troupeaux en écartant préventivement ce prédateur. Pour cela, il doit être mis en œuvre une réelle politique de régulation respectueuse de l'activité économique des éleveurs et de leur travail. Le sauvetage du pastoralisme français se fera par la régulation du loup en limitant sa population à son seuil de viabilité démographique fixé par les scientifiques à 500 individus. Dans le strict respect de la convention de Berne qui dispose que « pour prévenir des dommages importants, les États ont la possibilité de prendre des mesures contre les loups problématiques, pour autant qu'elles ne nuisent pas à la survie de sa population », il importe de reprendre le contrôle face au développement exponentiel de la population de loups en France. Toutes les mesures permettant de limiter le nombre de loups sur le territoire français à 500 individus doivent pouvoir être en œuvre rapidement. Dans ce cadre, M. le député souhaiterait connaître les intentions de Mme la ministre et quels moyens elle entend mobiliser pour lutter contre les massacres provoqués par le loup. Des mesures concrètes, durables et efficaces doivent être instaurées comme la généralisation de l'intervention des brigades loups, les tirs territorialisés ou l'autorisation d'utiliser des armes équipées de dispositifs de visée nocturne (lunettes de tirs). Les éleveurs doivent pouvoir se protéger et défendre leurs cheptels. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.
Réponse publiée le 1er avril 2025
La détresse des éleveurs est réelle et compréhensible. L'État est à leurs côtés, conscient de l'impact de la présence du loup sur leur activité, notamment en termes économique, psychologique et d'adaptation des pratiques. L'augmentation de la population lupine et son expansion géographique se traduit par un nombre élevé de dommages aux troupeaux (10 882 victimes en 2023). Attentif à cette situation, l'État souhaite un accompagnement fort auprès d'éleveurs autant pour prévenir que pour indemniser. À cette fin, le ministère chargé de l'agriculture accompagne financièrement les éleveurs pour la mise en place de mesures de protection des troupeaux. Cette politique repose sur un triptyque de moyens de protection : gardiennage, mise en place de parcs électrifiés et recours aux chiens de protection des troupeaux. Ainsi, l'aide à la protection des troupeaux contre la prédation a été maintenue et renforcée dans la nouvelle programmation de la politique agricole commune. Cette aide permet le financement du gardiennage par les bergers, de l'achat de clôtures, de l'achat et de l'entretien de chiens de protection, ainsi que la réalisation d'étude de vulnérabilité et d'un accompagnement technique. Malgré les nombreux efforts des éleveurs pour protéger leur troupeau, des difficultés réelles de protection de certains troupeaux subsistent. En matière d'indemnisation des dommages, près de 4,7 millions d'euros ont été versés en 2023, par le ministère chargé de l'écologie, à la suite de 4 091 constats. Le nouveau plan national d'action (PNA) loups et activités d'élevage 2024-2029 prévoit un délai maximum de 125 jours afin de réduire le délai d'indemnisation. Pour indemniser au plus juste les pertes liées à la prédation, les barèmes d'indemnisation des dommages, fixés en fonction de l'espèce domestique, de ses caractéristiques et selon sa valorisation, ont été revalorisés, début 2024, à hauteur de + 33 % pour les ovins et + 25 % pour les caprins. De plus, des travaux pour une meilleure indemnisation indirecte (stress, baisse de lactation, génétique…) sont en cours. Début 2024, l'arrêté fixant les modalités de recours aux tirs a été modifié afin d'améliorer le protocole de tirs. Cet arrêté permet notamment l'usage des caméras d'observation nocturne, supprime l'obligation d'éclairage pour les louvetiers, et permet de passer à deux tireurs, voire trois (selon les circonstances locales), pour les tirs de défense simple. De plus, pour simplifier les procédures de délivrance des autorisations, une instruction aux préfets prévoit que les autorisations de tir soient accordées maximum 48 heures après une attaque et que le déploiement des louvetiers interviennent dans un délai maximum de 72 heures. Considérant l'absence de référentiel pour protéger les troupeaux de bovins, équins et asins, les préfets délivrent désormais, dès la première attaque, des autorisations de tirs de défense aux éleveurs victimes d'attaques lupines. Aussi, à noter que conformément à ce que prévoit le PNA loup et activités d'élevage pour la période 2024-2029, des expérimentations ont été validées pour les troupeaux de bovins pour lesquels il n'existe pas de référentiel de protection ayant fait ses preuves, notamment sur le territoire de la Petite Montagne du Jura et sur le Plateau supérieur du Jura. De manière générale, le Gouvernement a élaboré un projet d'arrêté modifiant l'arrêté encadrant les destructions de loups afin d'apporter une plus grande sécurité juridique aux éleveurs qui ont des autorisations de tirs pour défendre leur troupeau de bovins. Le Gouvernement souhaite reconnaître les efforts des éleveurs en matière de réduction de la vulnérabilité notamment pour les espèces n'ayant pas de référentiel de protection ayant fait leurs preuves comme c'est le cas pour les troupeaux d'ovins. Cet arrêté a fait l'objet d'une consultation publique et des mises à jour en vue de prendre en compte les attentes pertinentes sont actuellement en cours par le ministère chargé de l'écologie en collaboration avec le ministère chargé de l'agriculture. Enfin, si le loup est à l'heure actuelle une espèce « strictement protégée » au titre de la convention de Berne et de la directive européenne « habitats, faune, flore », le Gouvernement est conscient que son expansion, dans un contexte d'activités pastorales, remet en question la vitalité de certains territoires. Les États membres européens se sont ainsi accordés, fin septembre 2024, pour que la Commission européenne porte une proposition de révision du statut de protection du loup dans la convention de Berne et le classer en espèces « protégée ». Cette proposition a toujours été soutenue par la France et fait partie des objectifs du nouveau PNA. Le Gouvernement français suivra avec attention ce processus de reclassement ainsi que ses impacts à l'échelle nationale.
Auteur : M. Aurélien Dutremble
Type de question : Question écrite
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 1er avril 2025