Situation critique du système de santé nivernais
Question de :
M. Julien Guibert
Nièvre (2e circonscription) - Rassemblement National
M. Julien Guibert alerte M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins, sur la situation critique du système de santé nivernais. La Nièvre, vaste territoire rural de 6 800 km², est confrontée à une situation sanitaire alarmante, marquée par une désertification médicale croissante. Les urgences de Nevers, Decize et Clamecy subissent des fermetures fréquentes ou des restrictions et celles de Nevers sont actuellement sous régulation jusqu'au 29 mars. Le SMUR est régulièrement immobilisé faute de médecins. La médecine privée est en carence, avec certaines spécialités plus ou quasiment plus présentes. Cela aggrave une situation déjà critique, avec pour conséquence une espérance de vie parmi les plus basses de France. Face à l'épuisement du personnel soignant et à des patients non pris en charge à temps, il lui demande quelles sont les solutions immédiates qu'il compte mettre en place pour garantir un accès aux soins digne et équitable dans la Nièvre.
Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025
ACCÈS AUX SOINS DANS LA NIÈVRE
M. le président . La parole est à M. Julien Guibert, pour exposer sa question, no 227, relative à l'accès aux soins dans la Nièvre.
M. Julien Guibert . La Nièvre est en urgence vitale absolue. Elle est confrontée à une crise sanitaire majeure, symptomatique de l'abandon des territoires ruraux par les politiques publiques de santé. Notre département est devenu un véritable désert médical ; aussi la vie de nos concitoyens est-elle en péril.
Les urgences de Nevers, de Decize ou encore de Clamecy sont régulièrement soumises à des fermetures partielles ou à des restrictions de service. À l'heure où je vous parle, celles de Nevers sont encore placées sous régulation stricte jusqu'au 29 mars, ce qui oblige les patients à obtenir un accord préalable du Samu pour y être admis. Cette situation est indigne d'un pays développé et représente un danger immédiat pour les Nivernais. La structure mobile d'urgence et de réanimation, censée garantir une prise en charge d'urgence, notamment grâce à son hélicoptère, est souvent bloquée au sol faute de médecins. Le plateau technique du Samu de Nevers a été transféré à Dijon sans que les médecins aient été redéployés sur place, ce qui aggrave encore davantage la précarité de l'offre de soins.
La médecine privée souffre elle aussi de grandes carences, ce qui rend impossible un suivi médical correct. Une partie des habitants n'ont même pas accès à un médecin traitant. Certaines spécialités comme la dermatologie sont absentes ou quasiment absentes du département. La conséquence est dramatique : la Nièvre affiche l'une des espérances de vie les plus basses de France.
À cela s'ajoutent l'épuisement et la détresse des soignants hospitaliers qui, faute de conditions de travail dignes, démissionnent massivement, nous entraînant dans un cercle vicieux dont nous ne parvenons plus à sortir.
Des vies sont en jeu. Que compte faire le gouvernement pour assurer immédiatement un accès équitable aux soins dans la Nièvre ? Allez-vous rétablir les services d'urgence, garantir la présence de médecins et redonner aux Nivernais une offre de santé à la hauteur des besoins de notre territoire ? Nous ne pouvons plus attendre. Les Nivernais sont en PLS ; il est temps d'agir. Je vous invite à prendre des mesures et à vous rendre à leur chevet.
M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée chargée de l'autonomie et du handicap . La situation du système de santé dans la Nièvre est au cœur des préoccupations du ministre chargé de la santé, qui est en lien permanent avec l'agence régionale de santé (ARS) et avec les élus locaux.
Conscient des enjeux, l'État a engagé des mesures immédiates et structurelles pour améliorer l'offre de soins et garantir un accès équitable aux services de santé. Dans cette perspective, des dispositifs incitatifs visant à favoriser l'installation de jeunes médecins et de professionnels de santé sont déjà mis en œuvre. Des aides financières, telles que des allocations d'attractivité territoriale, sont par exemple proposées aux internes choisissant d'effectuer un stage dans la Nièvre.
En ce qui concerne la situation générale des urgences, le directeur général de l'ARS a demandé au directeur du centre hospitalier de l'agglomération de Nevers d'élaborer un plan d'action, à court, moyen et long termes, pour tous les établissements du groupement hospitalier de territoire, avec le soutien du centre hospitalier universitaire de Dijon-Bourgogne et de l'ARS. Ce plan d'action sera présenté dans les jours qui viennent et sera appliqué avec l'aide d'une mission d'appui opérationnelle. En attendant, il a été fait appel à la réserve sanitaire nationale et une bourse d'emploi local de renfort paramédical a été déployée.
À long terme, l'espoir réside dans l'idée de former plus et de former mieux. Grâce au campus connecté proposé par l'université de Dijon pour la première année de médecine, trente étudiants suivent ce cursus depuis Nevers, avec d'excellents résultats. Ces jeunes, formés dans leur ville d'origine, sont susceptibles d'y exercer à l'avenir.
Par ailleurs, l'agrandissement des urgences de Nevers est en cours d'élaboration, et les discussions relatives à son financement se poursuivent. L'ARS a ainsi ajouté 1 million d'euros au projet, après avoir déjà financé 6 millions sur les 17 millions que coûtent au total cette extension et cette modernisation. Ce chantier s'ajoute au projet du nouvel hôpital de Cosne-Cours-sur-Loire, qui prévoit la construction d'un établissement de 8 200 mètres carrés.
Plus généralement, afin d'apporter des réponses adaptées et spécifiques au département, le gouvernement soutient la mise en place d'un pacte santé pour la Nièvre. Celui-ci vise à valoriser et à fédérer les nombreuses initiatives locales autour d'un diagnostic partagé et d'un plan d'action concerté entre l'État, les élus du département et les acteurs de la santé. Les grands axes de ce plan seront présentés prochainement. Un comité de pilotage réunissant l'ensemble des parties prenantes sera organisé dans les prochaines semaines afin d'affiner ces orientations et d'en assurer le suivi.
Soyez assuré de notre mobilisation pour garantir aux habitants de la Nièvre un accès aux soins digne et pérenne.
M. le président . La parole est à M. Julien Guibert.
M. Julien Guibert . Votre réponse est empreinte de bonnes intentions mais, sur le terrain, nos concitoyens continuent de subir la double peine : l'abandon des services publics et l'inaction face au gaspillage de l'argent public.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée . Ce n'est pas de l'inaction !
M. Julien Guibert . Pendant que les hôpitaux ferment, que les urgences sont rationnées et que la Nièvre devient un désert médical mortifère, des milliards d'euros continuent de s'évaporer chaque année dans la fraude sociale et fiscale, dans une indifférence coupable. Le coût de ces fraudes est estimé à 64 milliards d'euros par an, soit plus de deux fois le budget des hôpitaux publics ! Pourquoi cet immobilisme ? Pourquoi laisser ces fraudes prospérer au lieu d'y mettre un terme et de réinvestir cet argent là où il est vital : dans les hôpitaux, dans le recrutement de médecins, dans le sauvetage des services d'urgences qui ferment un à un ? Quand il s'agit d'augmenter les taxes ou d'imposer de nouvelles normes, l'État sait être rapide et efficace.
Les mesures que vous avez citées ne fonctionnent pas puisque les urgences de Nevers sont toujours fermées et que le nouvel hôpital de Cosne-Cours-sur-Loire ne comportera pas de service d'urgences ni de maternité. Nous attendons avec impatience les nouvelles propositions que vous pourriez faire en la matière mais, en attendant, la situation est critique et les Nivernais en paient le prix. Il y a des morts dans la Nièvre.
Auteur : M. Julien Guibert
Type de question : Question orale
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Santé et accès aux soins
Ministère répondant : Santé et accès aux soins
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 4 mars 2025