Maintien des relations des enfants placés avec leurs grands-parents
Question de :
M. Thomas Ménagé
Loiret (4e circonscription) - Rassemblement National
M. Thomas Ménagé attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance, sur la prise en compte des souhaits des grands-parents dans le maintien des relations avec leurs petits-enfants placés dans une structure de protection de l'enfance. L'article 371-4 du code civil consacre le droit pour un enfant d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants, sauf si son intérêt s'y oppose. En parallèle, l'article 375 du même code confie au juge des enfants le soin de statuer sur les mesures nécessaires à la protection de l'enfant, ce qui inclut la régulation des contacts avec les membres de sa famille. Dans la pratique, les grands-parents rencontrent fréquemment des difficultés à voir leurs souhaits pris en considération par les tribunaux ou les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) dans les décisions concernant les modalités de placement ou les droits de visite. Selon l'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE), au 31 décembre 2020, plus de 174 000 enfants étaient confiés à l'ASE et nombre d'entre eux ont vu leurs relations familiales amoindries malgré la stabilité affective que des liens intergénérationnels pourraient offrir. Dans le département du Loiret, certaines familles ont rapporté des situations où les grands-parents, souhaitant maintenir un lien ou jouer un rôle actif dans la vie de leurs petits-enfants placés, se sont heurtés à une faible prise en compte ou même un manque de prise en compte de leurs souhaits par les autorités compétentes. Ces cas révèlent un manque d'écoute des souhaits exprimés par les grands-parents, que ce soit pour accueillir eux-mêmes l'enfant concerné ou pour préserver des contacts réguliers avec celui-ci, bien que ces initiatives soient souvent en faveur de son intérêt supérieur. Certains professionnels du droit et de la protection de l'enfance relèvent également que les procédures permettant aux grands-parents d'obtenir des droits de visite ou d'être associés au projet éducatif de l'enfant sont souvent longues, coûteuses et imprévisibles dans leurs résultats. Il lui demande donc si le Gouvernement envisage de renforcer la prise en compte des souhaits des grands-parents par les juridictions et les services compétents dans les situations de placement d'enfants, notamment en clarifiant les critères d'évaluation de ces demandes et en simplifiant les démarches administratives et judiciaires. Il souhaite également savoir si des mesures spécifiques pourraient être adoptées pour intégrer les grands-parents dans l'élaboration des projets de vie des enfants placés, dès lors que leur implication est jugée conforme à l'intérêt supérieur de ces derniers.
Réponse publiée le 8 avril 2025
En matière judiciaire, le cadre actuel de la loi permet d'ores et déjà au juge des enfants de prendre en compte les grands-parents en matière d'assistance éducative. En effet, l'article 375-3 du code civil, tel qu'issu de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, prévoit la recherche systématique de la possibilité de confier l'enfant en danger à un membre de la famille, dont potentiellement un grand-parent, ou à un tiers digne de confiance. Ainsi, l'enfant ne pourra être placé qu'après évaluation, par les services de l'aide sociale à l'enfance, des conditions d'éducation et de développement physique, affectif, intellectuel et social de l'enfant dans le cadre d'un accueil par un membre de la famille ou par un tiers digne de confiance, en cohérence avec le projet pour l'enfant et après audition de l'enfant lorsque ce dernier est capable de discernement. En outre, si cette évaluation obligatoire des conditions d'accueil de l'enfant chez un membre de la famille ou un tiers digne de confiance n'a pas permis d'éviter un placement institutionnel, elle pourra toutefois permettre l'organisation d'un droit de visite et d'hébergement dans l'intérêt de l'enfant pour le maintien des relations personnelles. S'agissant des prérogatives du juge des enfants dans le cadre du placement, si l'article 375-7 du code civil ne donne compétence au juge des enfants pour réglementer les droits de visite et d'hébergement qu'à l'égard des parents, la Cour de cassation, dans un arrêt du 9 juin 2010, a néanmoins énoncé que « si le juge aux affaires familiales est en principe compétent pour fixer, dans l'intérêt de l'enfant, les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, le juge des enfants est seul compétent, en cas de placement, pour statuer sur ces modalités » (Cass. Civ. 1ère, 9 juin 2010, 09-13.390). Cette décision permet au juge des enfants, dès lors que la situation de danger aura justifié de prononcer le placement de l'enfant, de réglementer les relations entre l'enfant et les tiers, dont les grands-parents, afin d'assurer la cohérence de la mesure éducative et d'éviter la dispersion des familles dans des contentieux multiples et complexes. Ainsi, le juge des enfants doit statuer en prenant en compte la situation de l'enfant dans son ensemble, et donc en prenant appui sur le projet pour l'enfant élaboré par le président du conseil départemental et créé par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance.
Auteur : M. Thomas Ménagé
Type de question : Question écrite
Rubrique : Famille
Ministère interrogé : Famille et petite enfance
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 8 avril 2025