Exigences illégales de certains propriétaires envers de potentiels locataires
Question de :
M. Bastien Lachaud
Seine-Saint-Denis (6e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Bastien Lachaud interroge Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine sur les exigences disproportionnées et illégales de certains propriétaires envers de potentiels locataires. D'après les récentes informations parues dans la presse, nombreux sont les propriétaires, notamment en Île-de-France, qui vont bien au-delà de ce que la loi autorise. Ils cherchent à imposer des contraintes illégales à leurs locataires. Certains exigent par exemple que le garant figure sur le bail comme colocataire, afin de se prémunir d'un éventuel défaut de paiement du loyer. Ce procédé est illégal. Mais ce n'est pas la seule absurdité relevée. Ainsi, il peut arriver que les propriétaires cherchent à interdire à de potentiels locataires de fumer ou de vivre avec un animal de compagnie dans leur logement. Ces exigences sont parfaitement illégales et contraires au droit à la vie privée. Certains propriétaires possèdent un double des clés sans informer le locataire, ce qui est illégal, ou s'en servent pour menacer le locataire de vérifier ce qu'il fait dans son logement, ce qui est également interdit par la loi. D'autres encore fournissent délibérément un lit simple dans un logement, afin d'entraver la capacité de leur locataire à vivre en couple au sein du logement. La liste des exigences et mesquineries illégales serait longue. Elles visent toutes à imposer des contraintes aux locataires, qui ne sont pas en situation de refuser au vu de l'extrême tension du marché locatif et des grandes difficultés à trouver un autre logement. Les candidats à la location n'ont d'autre choix que se soumettre à ces demandes, sous peine de se voir refuser le bail. Plus encore, l'article fait état de nombreuses autres pratiques discriminatoires, où les dossiers seraient sélectionnés ou refusés selon la religion, le métier ou l'origine de la personne. Enfin, les dépôts de garantie demandés atteignent parfois des sommes astronomiques, jusqu'à 2 ans de loyer. Cela excède de très loin le montant prévu par la loi, qui est fixé à un mois de loyer hors charges maximum pour une location nue et deux mois pour une location meublée. Ces pratiques compromettent le droit au logement, dans un secteur privé où règne l'arbitraire. En 2019, près de la moitié des annonces de location dans une ville comme Paris ne respectaient pas l'encadrement théorique des loyers prévu par la loi. Ces abus portent gravement atteinte au droit au logement. Ainsi souhaite-t-il savoir ce qu'elle compte faire pour réguler le marché de la location privée et protéger les locataires des pratiques illégales et abusives de certains propriétaires. La question avait déjà été posée le 2 avril 2024 et n'avait pas eu de réponse à la date de la dissolution de l'Assemblée nationale le 9 juin 2024.
Réponse publiée le 18 février 2025
Dans un objectif d'équilibre entre les droits et obligations de chacune des parties au contrat d'habitation, la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est l'un des principaux textes qui encadre les relations entre locataire et bailleur. Elle comporte des dispositions d'ordre public qui s'imposent au bailleur et au locataire. Son article 1er reconnaît le droit au logement comme un droit fondamental et prévoit qu'aucune personne ne peut se voir refuser la location d'un logement pour un motif discriminatoire défini à l'article 225-1 du code pénal. Son article 4 liste les clauses réputées non écrites, c'est-à-dire privées d'existence juridique, et permet au locataire d'ignorer ces clauses. Il en va ainsi de toute clause interdisant au locataire d'héberger des personnes ne vivant pas habituellement avec lui ou de toute clause imposant au locataire le versement, lors de l'entrée dans les lieux, de sommes d'argent en plus des honoraires de location et du montant du dépôt de garantie. La connaissance de leurs droits et obligations par le locataire et le bailleur est d'intérêt général. D'une part, l'Etat apporte un soutien financier au réseau des agences départementales d'information pour le logement (ADIL), qui participent à la diffusion de l'information et offrent des conseils juridiques gratuits. Les associations de défense des consommateurs spécialisées dans le droit au logement contribuent à cette mission d'intérêt général. Elles sont soutenues par l'État. D'autre part, les instances représentatives des bailleurs et des professionnels de l'immobilier contribuent à la diffusion de l'information et à la connaissance de la réglementation auprès de leurs adhérents. Les professionnels de l'immobilier doivent suivre une formation pour pouvoir exercer leur profession. Récemment, cette formation a été complétée par un module de sensibilisation aux risques de pratiques discriminatoires. Enfin, des instances de conciliations, telles que la commission départementale de conciliation et les conciliateurs de justice, peuvent aider à résoudre certains conflits locatifs, avant de porter, si nécessaire, le conflit devant le juge. Le recours à ces instances est gratuit. Le non-respect du cadre légal ci-avant est passible de sanctions. La loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement a par exemple renforcé les outils de sanction en prévoyant une peine d'un an d'emprisonnement et 20 000 euros d'amende pour le fait, pour un bailleur ou un intermédiaire, de refuser l'établissement d'un contrat de bail conforme à la loi, la délivrance d'un reçu ou d'une quittance, ou de dissimuler ces obligations. Le législateur a par ailleurs prévu des mesures pour garantir l'effectivité de l'encadrement des loyers sur les territoires des collectivités engagées dans cette expérimentation. Sur ces territoires, les annonces immobilières doivent contenir des informations relatives à l'encadrement des loyers, notamment le loyer de référence à ne pas dépasser pour le logement mis en location. Le préfet du département peut initier une procédure de sanction administrative lorsqu'il constate qu'un contrat de bail ne respecte pas le loyer de référence majoré applicable au logement.
Auteur : M. Bastien Lachaud
Type de question : Question écrite
Rubrique : Logement
Ministère interrogé : Logement et rénovation urbaine
Ministère répondant : Logement
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 18 février 2025