Enquête sur le sabotage de Nord Stream 1 et 2
Question de :
M. Aurélien Saintoul
Hauts-de-Seine (11e circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire
M. Aurélien Saintoul interroge M. le ministre des armées et des anciens combattants sur l'absence de communication officielle des conclusions des enquêtes relatives au sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2. En effet, plus d'un an après ce sabotage, les enquêtes judiciaires internationales n'ont donné aucune réponse satisfaisante. Parmi les trois pays ayant lancé des investigations, la Suède et le Danemark ont clôturé les leurs en janvier et février 2024 sans donner d'éléments de réponse au grand public. Seule l'Allemagne poursuit ses recherches. Cependant, les différentes enquêtes de la presse internationale indiquent clairement que les agences de renseignement occidentales auraient rapidement déterminé un lien entre l'attaque et un commando ukrainien. Ainsi, dans une enquête de Maxim Tucker pour The Times parue le 8 mars 2023, on parle d'une « entreprise privée originaire d'Ukraine » (West kept quiet about Nord Stream attack to protect Ukrain). Adam Entous, Julian E. Barnes et Adam Goldman évoquent la responsabilité d'un groupe « pro-ukrainien » dans une enquête parue le 7 mars 2023 pour The New York Times (Intelligence Suggests Pro-Ukrainian Group Sabotaged Pipelines, U.S. Officials Say). Le 12 novembre 2023, dans une enquête pour le Washington Post, Shane Harris et Isabelle Khurshudyan accusent Roman Tchervinski, un officier ukrainien, d'être le coordinateur de l'attaque (Ukrainian military officer coordinated Nord Stream pipeline attack). D'autres sources, au contraire, semblent incriminer la Russie. Pour Andreas Umland, analyste au Centre d'études sur l'Europe de l'Est de Stockholm, la Russie serait le coupable le plus probable, l'Ukraine ayant trop à perdre vis-à-vis du soutien de ses alliés. L'armée danoise affirme quant à elle détenir des photos du navire scientifique russe SS-750, à proximité du lieu du sabotage quatre jours avant ce dernier. Alors qu'une attaque contre l'approvisionnement énergétique d'un partenaire majeur, membre de l'Union européenne, a été perpétrée, la représentation nationale devrait pouvoir accéder aux informations dont dispose l'exécutif. Rien ne semble justifier qu'elles soient protégées par le secret défense. Elles représentent au contraire un sujet d'intérêt. Marquant un tournant, cet évènement est un élément nécessaire à la bonne compréhension de la situation de l'Europe et des enjeux géopolitiques du conflit ukrainien. Il demande quelles sont les informations détenues par l'État relatives à ce sabotage.
Réponse publiée le 3 décembre 2024
Les gazoducs Nord Stream 1 et 2, situés en mer Baltique, ont subi quatre explosions dont trois le 26 septembre 2022 et une le 29 septembre 2022. Ces sabotages n'ont pas eu d'impact immédiat sur les approvisionnements en gaz, puisqu'ils sont intervenus alors que les deux gazoducs n'étaient pas en service. Le gazoduc Nord Stream 1 était à l'arrêt depuis début septembre 2022, et le Nord Stream 2 n'a jamais été mis en service à la suite des sanctions internationales mises en œuvre contre la Russie en réponse à l'invasion de l'Ukraine. Les deux gazoducs étaient néanmoins remplis de gaz, raison pour laquelle des fuites ont pu être observées en surface. Si les enquêtes engagées ont permis de déterminer que les deux gazoducs ont été endommagés par de « puissantes explosions », et donc qu'il s'agissait bien d'un sabotage, les autorités judiciaires suédoises et danoises ont décidé de clôturer leurs enquêtes en janvier et février 2024 au motif qu'elles ne disposaient pas de suffisamment d'éléments pour désigner un auteur et engager des poursuites. À ce stade, seule l'Allemagne poursuit son enquête. Elle n'a cependant pas fourni de détails supplémentaires. Outre le fait que les services de renseignement susceptibles de disposer d'informations soient étrangers, il relève de la nature même des organismes de renseignement de conserver à leur niveau toute information classée secrète. Enfin, étant admis que les infrastructures critiques sous-marines revêtent une importance de premier plan et qu'elles sont exposées, le Danemark s'est engagé à garder un haut niveau de vigilance pour assurer leur protection. Fin février, conjointement avec la Suède et l'Allemagne, une lettre en ce sens a été envoyée au Conseil de sécurité des Nations Unies. De son côté, au vu de ces enjeux, le ministère des armées et des anciens combattants poursuit ses travaux sur la sécurisation des infrastructures sous-marines critiques (énergie, cables…), compte tenu des diverses menaces auxquelles elles sont exposées.
Auteur : M. Aurélien Saintoul
Type de question : Question écrite
Rubrique : Défense
Ministère interrogé : Armées et anciens combattants
Ministère répondant : Armées et anciens combattants
Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 3 décembre 2024