Charte européenne des langues régionales
Question de :
Mme Colette Capdevielle
Pyrénées-Atlantiques (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 28 novembre 2024
CHARTE EUROPÉENNE DES LANGUES RÉGIONALES
Mme la présidente . La parole est à Mme Colette Capdevielle.
Mme Colette Capdevielle . J'associe à ma question, qui s’adresse à M. le premier ministre, mes collègues Peio Dufau et Inaki Echaniz. Devant l’Académie française, le président de la République a récemment déclaré que « les langues régionales sont un instrument de division de la nation ». Ces propos, qui m'ont meurtrie, ont blessé et mis en colère de très nombreux locuteurs de langues régionales – ceux de ma circonscription, où l'on parle deux langues régionales, le basque, qui est l'une des plus belles langues du monde, et le gascon, tout comme les locuteurs bretons, alsaciens, nissarts, créoles et corses. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LIOT.)
M. Fabien Di Filippo . Elle a oublié les Lorrains !
Mme Colette Capdevielle . Ce discours devant l'Académie montre tout le mépris d'une élite et traduit une conception intégriste de la République, où l'universel ne peut laisser aucune place à la reconnaissance des particularismes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LIOT.) Quand la France respectera-t-elle enfin ses engagements européens en ratifiant la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires – dont M. Retailleau ne veut pas –, pour protéger ces dernières grâce à un statut durable et adapté ?
M. Thibault Bazin . Il faut déjà maîtriser le Français !
Mme Colette Capdevielle . Comme le dit Mona Ozouf, la République a décidément du mal à « se défaire de son surmoi jacobin ». Malgré l’entreprise de destruction massive engagée sous la IIIe République, nos langues régionales ont résisté. Nous assistons même à leur renaissance avec le développement des premières écoles bilingues diwan, calendreta, ikastola. Le lien linguistique, partout où il existe, perdure envers et contre tout – et contre tous. Il persévère pour se pratiquer, se partager et se transmettre. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LIOT.) La France devrait être fière de cette mosaïque de langues qui sont les trésors de notre patrimoine vivant et constituent un facteur d’enrichissement et surtout de cohésion sociale dans nos territoires. Que comptez-vous faire pour sauver et développer nos langues régionales ? Milesker. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LIOT ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.)
Mme la présidente . La parole est à M. le ministre délégué chargé de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel.
M. Alexandre Portier, ministre délégué chargé de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel . Vous avez raison, les langues régionales font partie des trésors de notre pays – de notre nation – et sont partie intégrante de notre patrimoine culturel. Elles sont d'ailleurs consacrées dans notre Constitution – c'est sans doute le symbole le plus fort que l'on puisse trouver. Apprendre une langue régionale est toujours une richesse pour un enfant, un individu, un citoyen français, et c'est une preuve d'enracinement – d'attachement au sol de France. Cela fait partie de la richesse culturelle et linguistique de nos territoires, dont nous sommes fiers. C'est un facteur de cohésion mais aussi de fierté locale, auquel nous sommes attachés.
M. Inaki Echaniz . Prouvez-le !
M. Alexandre Portier, ministre délégué . Dans nos écoles, plus de 168 000 élèves apprennent des langues régionales : le basque, qui vous est cher, mais aussi le breton, le corse, le catalan, l'occitan Languedoc, les langues régionales d'Alsace et des pays mosellans.
M. Thibault Bazin . Ben oui !
M. Alexandre Portier, ministre délégué . Cet apprentissage s'opère évidemment en accord avec les principes de la République – tout cela est compatible, s'accorde et fait la richesse de notre nation. Cet enseignement peut être dispensé à parité entre les horaires d'enseignement en français et en langue régionale, ce qui est une force et fonctionne. Nous sommes là pour le développer et le promouvoir. S'agissant de l'enseignement du basque en particulier – sujet qui vous concerne au premier chef –, près de 17 000 élèves apprennent cette langue, soit un tiers des élèves du Pays basque.
M. Inaki Echaniz . Ce n'est pas la question ! Nous savons tout cela !
M. Alexandre Portier, ministre délégué . Depuis des années, le mouvement a été accompagné pour permettre ce développement. Près de 70 % des établissements le proposent dans le premier degré, contre 42 % il y a vingt ans. Si ce n'est pas un signe de bonne volonté, je ne sais pas ce que c'est.
M. Inaki Echaniz . Et la ratification ?
M. Alexandre Portier, ministre délégué . Du côté des services de l'État, le dialogue est nourri : les services académiques sont mobilisés pour accompagner la promotion et l'enracinement des langues régionales dans nos territoires. La ministre Anne Genetet recevra en décembre les représentants de l'office public de la langue basque pour poursuivre le travail en ce sens. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.) Du côté des services de l'éducation nationale, tout est sur la table pour avancer ensemble dans le renforcement de nos langues régionales.
Mme la présidente . La parole est à Mme Colette Capdevielle.
Mme Colette Capdevielle . Vous n'avez pas toujours répondu à ma question principale : quand vous mettrez-vous véritablement au travail pour ratifier la Charte européenne des langues régionales et minoritaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR. – M. Erwan Balanant fait de la main un signe signifiant que l'on tourne en rond.)
Auteur : Mme Colette Capdevielle
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Régions
Ministère interrogé : Réussite scolaire et enseignement professionnel
Ministère répondant : Réussite scolaire et enseignement professionnel
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 novembre 2024