Question écrite n° 2351 :
Interdiction du flufénacet pour protéger la qualité de l'eau potable

17e Législature

Question de : M. Jean-Claude Raux
Loire-Atlantique (6e circonscription) - Écologiste et Social

M. Jean-Claude Raux alerte Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques sur la contamination de l'eau potable de la population française au TFA, un métabolite de pesticides PFAS, dont le flufénacet. Le 27 septembre 2024, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a publié - après onze années de retard - les conclusions de la revue par les pairs concernant le pesticide flufénacet. Ses conclusions sont alarmantes : le flufénacet est un perturbateur endocrinien dont l'usage conduit à de fortes concentrations d'acide trifluoroacétique (TFA) dans les eaux souterraines et in fine dans l'eau potable. Le risque de perturbation du fonctionnement thyroïdien et d'une affectation possible du développement du cerveau chez les enfants est ainsi bien établi par l'EFSA. Le flufénacet est un herbicide de la famille des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), autrement appelées pollutants éternels, dont 911 tonnes ont été acquises en France en 2022, quasiment le double depuis 2019. Autorisé sur le marché en 2004 pour dix ans, il est identifié en 2015 comme substance candidate à la substitution. Pourtant, il a bénéficié depuis le 31 décembre 2013 de neuf prolongations successives qui ont autorisé son utilisation pendant onze années supplémentaires et l'ont hissé à la neuvième place des herbicides les plus utilisés dans le pays. Le TFA, un des métabolites du flufénacet, est particulièrement préoccupant pour la santé publique de la population car il menace la qualité de l'eau potable et possède potentiellement des effets néfastes sur la santé. Selon la méthodologie de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), le flufénacet étant à présent classé comme perturbateur endocrinien, ses métabolites - dont en premier lieu le TFA - doivent être considérés comme pertinents pour le contrôle de la qualité de l'eau potable. Son usage engendre des concentrations supérieures à 10 µg/L dans les eaux souterraines selon une modélisation de l'ANSES de 2017 et de nombreuses études relatent la présence de TFA dans l'eau potable à des concentrations supérieures à la limite réglementaire de 0,1 µg/L. Dans le même temps, les techniques conventionnelles de traitement des eaux destinées à la consommation humaine sont inefficaces pour l'élimination du TFA et les technologies avancées très onéreuses ne garantissent pas non plus une efficience certaine. Pour garantir la sécurité sanitaire de la population française et l'approvisionnement d'une eau potable de qualité, il est urgent d'interdire immédiatement l'utilisation du flufénacet en France, qui concernerait 80 produits. À l'instar de Générations futures, M. le député demande à parvenir à un retrait du marché des pesticides PFAS pour lesquels il est démontré l'émission de TFA dans l'environnement, tel le fongicide fluopyram. Il l'interroge ainsi sur les actions menées par le Gouvernement auprès de l'Union européenne pour parvenir rapidement à une interdiction du flufénacet, à la suite des conclusions de l'EFSA et, dans l'attente d'une telle décision, sur le retrait de l'autorisation de mise sur le marché des produits à base de flufénacet en France, tel que l'a déjà initié l'Allemagne. Enfin, il demande à connaître les mesures entreprises pour le contrôle de la qualité de l'eau potable des Français vis-à-vis du TFA.

Réponse publiée le 11 février 2025

Le Gouvernement partage pleinement les préoccupations concernant les éventuels risques environnementaux et sanitaires liés à la présence dans l'eau potable de substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), dont l'acide trifluoroacétique (TFA) qui est notamment un métabolite du flufénacet. Suite à la publication des conclusions de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) sur le flufénacet, publiées le 27 septembre 2024, la Commission européenne devrait proposer dans les prochains mois un projet de décision ne renouvelant pas l'approbation de cette substance. Les autorités françaises établiront une position de vote en adéquation avec les conclusions de l'EFSA. A l'issue de la décision concernant le statut de cette substance active, la France mettra en œuvre les dispositions conséquentes pour les produits à base de flufénacet. Il est à rappeler que dès novembre 2022, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a été saisie au sujet des PFAS. Cette saisine avait notamment pour objectifs la détermination de valeurs toxicologiques de référence, ainsi que le bilan de la contamination des milieux, dont l'eau, par ces composés. La production de ces éléments par l'Anses fait partie intégrante du plan d'action interministériel sur les PFAS publié en avril 2024. Au-delà de la surveillance des milieux et de la caractérisation des risques associés aux PFAS, ce plan s'attache, dans un objectif de prévention, à réduire les émissions de PFAS, la contamination des milieux, et l'exposition des populations et des écosystèmes. En effet, la connaissance des risques sanitaires liés à la présence de TFA dans les eaux destinées à la consommation humaine reste encore parcellaire. L'expertise scientifique de l'Anses en cours intègre le TFA. La Commission européenne a également sollicité l'OMS fin 2023 pour conduire une évaluation des risques sanitaires liés aux PFAS, dont le TFA, dans l'eau potable. Les résultats sont attendus prochainement. A la demande du ministère chargé de la santé, la campagne exploratoire de mesure dans les eaux mise en œuvre par le laboratoire d'hydrologie de Nancy intègre les PFAS dont le TFA. Enfin, la Commission européenne a saisi l'EFSA en juillet 2024 pour qu'elle fixe les valeurs toxicologiques de référence pour le TFA. Les conclusions de ces travaux, attendues pour fin octobre 2025, contribueront à déterminer des valeurs de gestion dans les différents milieux, dont les eaux, fondées sur des données scientifiques validées par la communauté internationale. Les résultats de ces travaux alimenteront les mesures de gestion sur le territoire national.

Données clés

Auteur : M. Jean-Claude Raux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 11 février 2025

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