Retraites des agriculteurs
Question de :
M. Christophe Barthès
Aude (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Christophe Barthès alerte Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur le sujet si important que sont les retraites agricoles. Comme beaucoup de Français, les agriculteurs rencontrent de nombreuses difficultés au quotidien avec une retraite plus ou moins égale à 1 100 euros net pour une carrière complète. Certes, la revalorisation de 2021 pour les chefs d'exploitation et celle de 2022 pour les conjoints d'exploitants sont positives, mais elles sont largement insuffisantes. De plus, les agriculteurs retraités doivent toujours s'acquitter des prélèvements sociaux (CSG, CRDS, CASA) ce qui réduit le montant réellement perçu et les conjoints d'exploitants qui ont travaillé toute leur vie sans rémunération, sans rien coûter à la société, sont aujourd'hui oubliés. Deux fois par an, les retraites salariés et indépendants bénéficient de l'augmentation du Smic sur l'intégralité de leur retraite. Or pour les agriculteurs retraités, cette hausse ne porte que sur la retraite de base (qui est autour de 350 euros de mois pour les chefs d'exploitations). Le Gouvernement aurait promis une hausse de 50 euros par mois aux retraités salariés et indépendants ayant des faibles retraites. Mais, les anciens exploitants agricoles sont exclus de cette hausse forfaitaire de 50 euros. Mme la ministre, les retraites des agriculteurs doivent être augmentées voire indexées sur la moyenne des retraites nationales soit 1 430 euros net environ. Que compte faire le Gouvernement pour améliorer les retraites des agriculteurs ? Enfin, il lui demande si elle va prendre des mesures pour les conjointes d'exploitants.
Réponse publiée le 20 mai 2025
Le Gouvernement est particulièrement conscient des difficultés liées aux montants de pensions de retraite des agriculteurs et des agricultrices. Le niveau modeste des revenus agricoles, qui se répercute sur le niveau des pensions d'une part, ainsi que la mise en place encore relativement récente du régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO) d'autre part, sont autant de causes de cette situation. C'est pourquoi il est fait appel à la solidarité nationale pour assurer le financement des retraites agricoles, via le mécanisme de compensation démographique et l'affectation de diverses taxes. Ces ressources couvrent ainsi les trois quarts des dépenses des régimes d'assurance-vieillesse des non-salariés agricoles. Elles permettent de procéder à des revalorisations de pensions, comme ce fut le cas de la loi du 3 juillet 2020 qui a permis de porter de 75 % à 85 % du salaire minimum de croissance (SMIC) net, via le complément différentiel (CD) de points gratuits de RCO, le minimum brut de pension de retraite des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, à titre exclusif ou principal, ayant accompli une carrière complète en cette qualité. Seules les carrières complètes en tant que chef d'exploitation permettent donc d'atteindre une pension de retraite agricole équivalente à 85 % du SMIC net agricole. En cas de carrière incomplète, le CD de RCO est calculé au prorata de la durée d'assurance validée en cette qualité de chef. Les périodes d'assurance validées dans le régime des non-salariés agricoles en qualité de conjoint participant aux travaux, de collaborateur d'exploitation ou d'entreprise agricole ou d'aide familial ne sont pas revalorisées au titre du CD de RCO. En effet, l'effort contributif -c'est-à-dire les cotisations sociales acquittées au titre de la retraite- correspondant à ces périodes est beaucoup moins important que celui correspondant à des périodes cotisées en qualité de chef. Cependant l'amélioration de la protection sociale des conjointes de chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole a évolué progressivement avec, dès la création du régime de base, le statut présumé de « conjoint participant aux travaux » prévu par l'article L. 732-34 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), statut fermé en 1999 pour les nouveaux affiliés et supprimé en 2009, qui n'ouvrait droit qu'à la retraite forfaitaire, puis avec le statut choisi de « collaborateur d'exploitation ou d'entreprise agricole » prévu par les articles L. 321-5 et L. 732-35 du CRPM, créé en 1999 et limité à 5 ans depuis 2022, qui ouvre droit à la retraite forfaitaire et, sur la base d'une assiette forfaitaire de 400 SMIC, à la retraite proportionnelle, ainsi qu'à la RCO, depuis 2011, sur la base d'une assiette forfaitaire de 1 200 SMIC. Dans un souci de maintien du caractère contributif des régimes de retraite, les mesures de revalorisations des retraites agricoles ont privilégié, notamment en RCO, les catégories qui ont accompli le plus grand effort contributif dans le régime des non-salariés agricoles. Néanmoins, la loi n° 2021-1679 du 17 décembre 2021 visant à assurer la revalorisation des pensions de retraites agricoles les plus faibles a récemment constitué une nouvelle avancée en ciblant l'ensemble des statuts de non-salariés agricoles et notamment les anciens conjoints participant aux travaux, les collaborateurs d'exploitation ou d'entreprise agricole et les aides familiaux. Cette loi du 17 décembre 2021 prévoit ainsi l'alignement de la pension majorée de référence (PMR), mise en place en 2009, correspondant au minimum de retraite de base non-salarié agricole (pensions de droit propre et de réversion), des anciens conjoints participant aux travaux, des collaborateurs d'exploitation ou d'entreprise agricole et des aides familiaux sur celle des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole. Elle a prévu également la revalorisation du montant de la PMR, désormais identique, quel que soit le statut, à hauteur du minimum contributif (MiCo) majoré des salariés relevant du régime général ou du régime des salariés agricoles pour une carrière complète de non-salarié agricole. Enfin, le plafond d'écrêtement de la majoration de la retraite de base pouvant être accordée au titre de la PMR a été relevé au niveau du montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) prévu pour une personne seule. Ces mesures sont entrées en vigueur pour les pensions dues dès le 1er janvier 2022 et ont concerné en 2022 plus de 200 000 personnes, majoritairement des femmes, pour un montant moyen de plus de 50 euros (€) brut par mois (et 70 € pour les femmes). En outre, pour les pensions prenant effet à compter du 1er septembre 2023, la loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale (LFRSS) pour 2023, a relevé la PMR de 100 € par mois pour une carrière complète de non-salarié agricole et son plafond d'écrêtement a été également relevé de 100 €. Par ailleurs, dans le régime de RCO, sous certaines conditions de durées d'assurance et dans certaines limites, des points gratuits de RCO peuvent être attribués pour certaines périodes antérieures à l'obligation d'affiliation à ce régime. Ainsi, depuis 2014, peuvent être attribués 66 points gratuits annuels de RCO, dans la limite maximale de 17 annuités, pour des périodes d'ancien conjoint participant aux travaux, de collaborateur d'exploitation agricole et d'aide familial, ainsi que pour des périodes de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole lorsque l'assuré ne justifie pas d'au moins 17,5 années d'assurance en cette qualité de chef permettant, depuis 2003, l'attribution de 100 points gratuits de RCO pour des périodes de chef antérieures à 2003. De plus, pour les personnes dont la pensions de retraite a pris effet à compter de 1997, l'article 18 de la LFRSS pour 2023 prévoit, à compter du 1er septembre 2023, un assouplissement des conditions d'ouverture du droit à ce dispositif de points gratuits, en remplaçant la condition de justifier du nombre de trimestres requis pour l'obtention du taux plein par la condition de justifier d'une pension à taux plein quelle qu'en soit la raison, et cette mesure s'appliquera aux actuels comme aux futurs retraités. Ainsi, lorsqu'elles en remplissent les conditions d'ouverture de droit, les anciennes conjointes participant aux travaux ayant pris leur retraite avant 1999 ou les conjointes qui ont conservé ce statut jusqu'en 2009 sans avoir opté pour le statut de collaborateur d'exploitation ou d'entreprise agricole ou celui de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, bénéficient en retraite de base, à durée d'assurance identique, des mêmes droits qu'un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, alors même que leur effort contributif est moindre. Elles peuvent en outre bénéficier de droits gratuits en RCO sans avoir cotisé à ce régime. Ces revalorisations successives, financées par la solidarité nationale, sont une reconnaissance du travail accompli par plusieurs générations d'agriculteurs et d'agricultrices qui ont contribué à bâtir l'agriculture française. Par ailleurs, concernant les prélèvements sociaux, des exonérations totales ou partielles sont possibles selon la situation fiscale de l'assuré ou lorsque l'assuré bénéficie de certaines prestations. Pour les pensions de retraite, les exonérations et les taux de prélèvement de la contribution sociale généralisée (CSG - taux normal de 8,3 %, taux médian de 6,6 % et taux réduit de 3,8 %), de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS - 0,5 %) et de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa - 0,3 %) varient notamment en fonction du seuil de revenus déterminé à partir du revenu fiscal de référence de l'avant dernière et de l'antépénultième année, du nombre de parts fiscales et du lieu de résidence (métropole, départements d'outre-mer) de l'assuré. Les montants minimums de pensions prévus par les régimes de retraite, puis calculés en fonction des durées d'assurance de chaque assuré, sont donc toujours des montants bruts, avant tous prélèvements dépendants des revenus et de la situation fiscale et sociale de l'assuré. Les pensions de vieillesse de base, de droit direct ou de droit dérivé du régime des non-salariés agricoles sont revalorisées, comme les pensions de retraite de base du régime général et des régimes alignés, dans les conditions prévues à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale (CSS), soit au 1er janvier de chaque année, par application du coefficient mentionné à l'article L. 161-25 du CSS qui prévoit que la revalorisation annuelle est effectuée sur la base d'un coefficient égal à l'évolution moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, des douze derniers indices mensuels de ces prix. Les montants des retraites de base, des minima de pension et de certains minima sociaux seront revalorisés au 1er janvier 2025 d'un coefficient de 1,022, soit un taux de 2,2 %. Enfin, une réforme visant à faire converger le mode de calcul des pensions de base des non-salariés agricoles sur celui du régime général est inscrite à l'article 22 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. La mesure doit s'appliquer aux assurés partant en retraite à compter du 1er janvier 2026. Cette réforme consiste à calculer à terme la pension de base sur les vingt-cinq meilleures années de revenus, en prenant en compte l'ensemble des régimes d'affiliation. Dès le 1er janvier 2026, la mesure prévoit une amélioration concrète des pensions des non-salariés agricoles grâce à la prise en compte des meilleures années de points de retraite proportionnelle pour la partie de carrière antérieure à 2016, la mutualité sociale agricole (MSA) ne disposant de l'historique des revenus que depuis 2016. En outre, la réforme prévoit de relever le plafond d'écrêtement tous régimes de la PMR au niveau de celui du MiCo pour les pensions prenant effet à partir du 1er janvier 2026. Les mesures de revalorisation relatives à la PMR et au complément différentiel de RCO seront également étendues aux non-salariés agricoles exerçant cette activité à titre secondaire pour les pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2026 et pour les périodes secondaires postérieures à cette date. Cette réforme s'appliquera aux pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2026, mais sera pleinement opérationnelle en 2028, à la suite de travaux d'adaptation du système informatique de la MSA. Le Gouvernement s'engage régulièrement au côté du Parlement, et dans un esprit de consensus, pour soutenir et revaloriser les retraites agricoles qui constituent un élément de reconnaissance du travail des agriculteurs et des agricultrices.
Auteur : M. Christophe Barthès
Type de question : Question écrite
Rubrique : Retraites : régime agricole
Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, souveraineté alimentaire
Dates :
Question publiée le 26 novembre 2024
Réponse publiée le 20 mai 2025