Financement de la prise en charge de la dépendance
Question de :
M. Fabien Di Filippo
Moselle (4e circonscription) - Droite Républicaine
M. Fabien Di Filippo alerte M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes sur la situation particulièrement inquiétante du secteur du grand âge et sur le manque de moyens humains et financiers dans les établissements dédiés ainsi que dans les services d'autonomie à domicile. Au 1er janvier 2021, on dénombrait 18,1 millions de personnes de 60 ans ou plus en France, soit plus d'un quart de la population. Selon la Drees, ce sont 21 millions de seniors de 60 ans ou plus qui vivront en France en 2030 : les plus de 65 ans seront alors plus nombreux que les moins de 15 ans. Il y a actuellement près de 7 400 Ehpad en France, représentant environ 600 000 places. L'espérance de vie, qui est aujourd'hui de 78,4 ans pour les hommes et de 84,8 ans pour les femmes, ne cesse d'augmenter et devrait atteindre, selon une étude de l'Insee, respectivement 86 et 91,1 ans d'ici à 2060. Cet allongement de la durée de vie s'accompagne inévitablement d'un accroissement des situations de dépendance. Le nombre de personnes dépendantes est estimé à 1,4 millions aujourd'hui et devrait passer à près de 5 millions en 2060. Ces personnes rentrent aussi de plus en plus tard en Ehpad avec des degrés de dépendance accrus. Conserver les pratiques actuelles d'entrée en institution des personnes âgées en perte d'autonomie supposerait donc de doubler dans la durée le rythme d'ouverture de places observé depuis 2012, afin d'accueillir 108 000 résidents supplémentaires en Ehpad d'ici 2030, puis encore 211 000 entre 2030 et 2050. Or, à ce jour, selon une enquête réalisée par la Fédération hospitalière de France, 85 % des Ehpad publics avaient enregistré un déficit en 2023, soit quasiment le double de 2019. Dans le secteur privé solidaire, 1 100 Ehpad seraient en déficit pour un montant total de 216 millions d'euros. Il est essentiel et urgent de mettre en place une véritable politique publique en faveur des personnes âgées et des professionnels qui œuvrent à leur service. Le Gouvernement a annoncé en avril 2024 une hausse de 5 % du financement de l'État aux Ehpad publics et de 3 % pour le secteur privé. Or ces établissements enregistrent des déficits oscillant entre 5 et 10 % de leurs dépenses de fonctionnement. Les mesures prises ne permettent donc pas de répondre aux importantes difficultés financières du secteur. En 2022, 60,3 % des Ehpad étaient en situation de déficit (49,3 % en 2021), en raison notamment de la baisse de leur taux d'occupation, de la hausse de l'inflation, de la progression des charges du personnel (revalorisations salariales, recours à l'intérim...) ou encore de la hausse des coûts de l'énergie (électricité, chauffage...) et ce, malgré le bouclier fiscal mis en place et malgré une consommation vertueuse de la plupart des Ehpad qui ont réalisé des économies de consommation alors que les dépenses ont tout de même augmenté 32 % d'entre eux présentaient même un déficit supérieur à 5 % de leurs recettes. La situation était plus dégradée pour les Ehpad publics (64,5 % en déficit) que pour les Ehpad privés non lucratifs (54,3 % en déficit). Dans son rapport « Grand âge et autonomie » de 2019, le président du Haut Conseil du financement de la protection sociale évaluait le besoin de financement du grand âge a minima à « 9 à 10 milliards euros à l'horizon 2030 ». Le manque d'investissement dans les établissements dédiés est flagrant et se traduit par une insuffisance de personnels, qui doivent s'occuper des résidents à une cadence effrénée. Ce manque de personnel oblige 18,6 % des Ehpad et résidences autonomes à refuser de nouvelles entrées et impacte négativement la qualité d'accompagnement. Concernant les services à domicile, le nombre de services réduisant leur nombre d'heures de soin a doublé, passant de 33 % à 68 % entre 2022 et 2023. Il est donc aujourd'hui essentiel et urgent d'engager de vrais moyens pour répondre aux besoins toujours plus importants d'accompagnement des professionnels travaillant en Ehpad et en résidence autonomie, des salariés du secteur de l'aide et du soin à domicile ainsi que des personnes âgées et en situation de handicap. À l'heure où 80 % des Français déclarent vouloir favoriser avant tout le maintien à domicile en cas de perte d'autonomie liée à l'âge, à la maladie ou au handicap, il est indispensable de renforcer au plus vite l'attractivité des métiers au service du grand âge et le maintien dans l'emploi de ceux qui y sont déjà engagés, en mettant en place une revalorisation salariale et des financements pérennes pour ce secteur. Des mesures comme le renforcement des équipes ou une augmentation des moyens consacrés au financement de la dépendance apparaissent donc urgentes et indispensables, de même que la mise en œuvre d'une véritable loi « gand âge et autonomie », promise depuis 2018 et maintes fois reportée. Il s'agit d'offrir aux aînés la dignité qu'ils méritent, à leurs familles une aide pour que cet accueil ait un coût moins important et aux personnels les moyens de travailler sereinement ainsi que la reconnaissance de leur engagement. Face au vieillissement de la population française et aux défis majeurs qui touchent un grand nombre de citoyens, il lui demande quelles mesures fortes et concrètes il compte mettre en œuvre pour améliorer la prise en charge globale des personnes en situation de dépendance et pour assurer à long terme les besoins de financement de la prise en charge de la dépendance, phénomène amené à croître dans le contexte démographique du pays.
Auteur : M. Fabien Di Filippo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Dépendance
Ministère interrogé : Solidarités, autonomie et égalité entre femmes et hommes
Ministère répondant : Solidarités, autonomie et égalité entre femmes et hommes
Date :
Question publiée le 8 octobre 2024