Lutte contre les mortalités anormales affectant les cheptels mytilicoles bretons
Question de :
M. Paul Molac
Morbihan (4e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Paul Molac alerte M. le ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé de la mer et de la pêche, sur la nécessité de mettre en place un dispositif afin de lutter activement contre les mortalités anormales qui affectent les cheptels mytilicoles bretons, tant adultes (implantées sur les pieux) que juvéniles. En effet, depuis trois ans, les professionnels observent une surmortalité des moules de bouchot due à des prédations extrêmement importantes, en particulier de la part des araignées de mer, dont le nombre prolifère. Selon les estimations de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer), au cours des dix dernières années, leur population aurait augmenté par trois, voire quatre, dans le golfe normano-breton. De fait, les éleveurs de moules subissent des préjudices économiques considérables. Pour ne prendre que l'exemple des 15 exploitations mytilicoles implantées sur le territoire de Dinan Agglomération, les pertes globales sont estimées à plus de quatre millions d'euros : - 50 % sur l'année 2024 et -75 % sur 2025 en comparaison à 2023. Si la région Bretagne, via le Fonds européen pour les affaires maritimes (FEAMPA), est mobilisée pour accompagner les professionnels sur la protection des pieux (mise en place de filets et d'écarteurs afin de protéger les moules et ne pas obérer leur croissance) et que certaines collectivités s'efforcent à mener des actions d'effarouchements, la situation réclame une action complémentaire et rapide de la part de l'État. Aussi, il demande au ministère, après des mois de discussions avec les acteurs de terrain, de faire évoluer la réglementation et permettre une lutte préventive plus efficace contre les araignées de mer. En outre, il sollicite la mise en place d'un plan d'aide exceptionnel destiné à accompagner les initiatives des collectivités locales et les entreprises en difficulté afin de leur permettre de passer cette crise.
Réponse publiée le 16 décembre 2025
La question des prédations dont sont victimes les mytiliculteurs depuis plusieurs années est suivie attentivement par le Gouvernement, compte tenu des répercussions économiques que représentent les pertes de cheptels pour des entreprises totalement dépendantes du milieu dans lequel elles pratiquent leur activité. La destruction des naissains comme celle des moules adultes sont effectivement susceptibles d'obérer la pérennité des entreprises, en fragilisant leur santé économique et en décourageant les exploitants. Un certain nombre d'outils économiques, notamment dans le cadre du fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (FEAMPA), sont d'ores et déjà mobilisables pour faire face à un tel phénomène. Le FEAMPA, via les guichets régionaux, finance en effet de l'équipement matériel contre les prédations. Il accompagne par ailleurs les projets d'acquisition de connaissances au niveau national, axe fondamental pour comprendre le comportement de ces espèces prédatrices et assurer la mise en place ou l'amélioration de mesures d'anticipation, de gestion et de protection. Dans ce cadre, les enseignements du projet SPIDER (pour Suivi des Populations d'araignées de mer dans le golfe normano-breton et Identification et Développement de solutions pour limiter l'Effet de la prédation en mytiliculture) porté par le Comité régional de la conchyliculture Bretagne Nord en partenariat avec l'Ifremer, seront particulièrement éclairants. Ce projet prévu sur trois ans, cofinancé par le FEAMPA et l'Etat pour un montant global d'1,4 million d'euros, a débuté en 2024 avec une campagne de marquage des araignées par les pêcheurs, visant à comprendre la dynamique de population de cette espèce. Ce n'est qu'en améliorant notre connaissance des ressorts de cette prédation que l'Etat, les collectivités et les professionnels pourront y répondre plus efficacement. Le FEAMPA peut par ailleurs constituer un levier important pour instaurer des mesures d'accompagnement des entreprises, en termes de gestion des conséquences de ces phénomènes : il prévoit en effet la possibilité de soutenir la mise en place d'un fonds de mutualisation aquacole et d'un dispositif de remboursement de prime ou de cotisation en cas de contractualisation avec une compagnie assurantielle privée. Ce fonds de mutualisation doit être constitué par les conchyliculteurs qui ont la main sur sa structuration et sur son fonctionnement, à commencer par la définition des risques à couvrir. L'Etat se tient prêt à apporter tout le soutien nécessaire à l'établissement de ce fonds. En revanche, le cadre juridique européen en matière d'aides d'Etat limite les possibilités d'indemnisation à la prédation des seules espèces protégées, ce qui n'est pas le cas de l'araignée de mer, qui est une espèce commerciale. Toutefois, afin de permettre aux entreprises de pouvoir faire face à de tels aléas, le Gouvernement a sensibilisé les services déconcentrés à l'activation de l'ensemble des mesures génériques de soutien économique aux entreprises en difficulté (mobilisation des comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises, dispositifs de chômage partiel, etc.). Il n'apparaît donc pas nécessaire de prendre de nouvelles mesures réglementaires nationales, le code rural et de la pêche maritime comprenant l'ensemble des dispositifs d'action permis dans le cadre de la réglementation européenne pour mener les opérations de lutte. Tout nouveau texte ne viendrait que répéter l'existant, à commencer par les actions de pêche expérimentale déjà à l'œuvre ou encore des actions de prévention dans le cadre de la compatibilité entre les différents usages en mer. Dans ce cadre, les préfets peuvent être amenés à prendre des mesures locales, concertées et proportionnées, permettant de lutter contre ce type de prédations. Enfin, le Gouvernement est plus largement attaché à ce que ces filières aquacoles puissent bénéficier d'une attention particulière dans le cadre du Plan national d'adaptation au changement climatique, à travers l'identification de nouvelles techniques de production aquacole et de solutions visant à faciliter la résilience des entreprises face à l'évolution des milieux d'élevage et de culture.
Auteur : M. Paul Molac
Type de question : Question écrite
Rubrique : Aquaculture et pêche professionnelle
Ministère interrogé : Mer et pêche
Ministère répondant : Mer et pêche
Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 16 décembre 2025