Question au Gouvernement n° 241 :
AME

17e Législature

Question de : Mme Dominique Voynet
Doubs (2e circonscription) - Écologiste et Social

Question posée en séance, et publiée le 4 décembre 2024


AME

Mme la présidente . La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet . Monsieur le premier ministre, dans un entretien accordé au Figaro, vous avez annoncé votre intention de réduire notablement les soins pris en charge par l'aide médicale de l'État. Le panier de soins va être « sensiblement diminué », avez-vous précisé, annonçant une réforme de l'AME pour « éviter les abus et les détournements ».

Éviter les abus ? Pas besoin de loi pour ça, qu'il s'agisse de vérifier l'identité ou l'ancienneté du séjour d'un bénéficiaire. Je subodore donc qu'au fond, vous n'avez pas grand-chose à faire de l'AME. Il s'agit, alors que vous n'avez jamais cherché à échanger avec les députés de gauche (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR. – « C'est faux ! » sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR), de donner, au mépris de vos convictions, des gages à l'extrême droite.

M. Jean-Paul Lecoq . Eh oui, vous l'avez fait pour satisfaire le RN !

M. Philippe Vigier . À cause de qui ?

Mme Dominique Voynet . Cette concession piteuse et déshonorante ne vous sauvera sans doute pas demain (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC), mais là n'est pas mon sujet. Des milliers de médecins ont dénoncé votre position et huit anciens ministres de la santé vous ont alerté sur les conséquences sanitaires, humaines, sociales et économiques inacceptables qu'aurait une restriction ou une suppression de l'accès à l'AME. (M. François Cormier-Bouligeon s'exclame.) Roselyne Bachelot, Agnès Buzyn, Frédéric Valletoux, Aurélien Rousseau : ce ne sont pas des gauchistes ! (Plusieurs députés du groupe EPR s'exclament en désignant les bancs du groupe SOC, où siège M. Aurélien Rousseau.)

M. Laurent Jacobelli . Ah, des références !

Mme Dominique Voynet . Ils vous ont expliqué que le panier de soins était déjà restreint, que l'AME était l'un des instruments indispensables d'une politique de santé qui nous protège toutes et tous et qu'en restreindre l'accès conduirait à prendre en charge plus tardivement des pathologies plus graves et plus coûteuses. (Mme Mélanie Thomin applaudit.) Le coronavirus, le VIH ou le bacille de Koch…

Un député du groupe RN . La peste, le choléra !

Mme Dominique Voynet . …ne se préoccupent pas de savoir si leur cible a des papiers en règle. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et GDR).

M. Sébastien Chenu . C'est mauvais !

Mme Dominique Voynet . L'AME représente 0,5 % des dépenses de santé (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe RN) : c'est moins de deux jours des dépenses annuelles. Vous avez vous-même admis, monsieur le premier ministre, que son montant est stabilisé ou presque. Ma question est simple : au pied du mur, serez-vous du bon côté de l'histoire…

Plusieurs députés du groupe DR . Et vous ?

Mme Dominique Voynet . …en admettant le rôle essentiel de l'AME dans une politique de santé efficace et responsable ? (De nombreux députés des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR se lèvent et applaudissent.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes.

M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes . Permettez-moi d'excuser l'absence de la ministre de la santé, retenue à Bruxelles où elle représente la France au Conseil emploi, politique sociale, santé et consommateurs.

Vous l'avez dit, l'AME permet la prise en charge des frais de santé des personnes en situation irrégulière présentes depuis plus de trois mois sur le territoire français ou disposant de faibles ressources – moins de 47 euros par mois pour une personne seule en métropole. Comme le documente le rapport de MM. Évin et Stefanini, remis en 2023, d'autres États de l'Union européenne permettent aux migrants en situation irrégulière d'accéder, au-delà des soins d'urgence, à des soins courants. Je pense à l'Allemagne, à la Belgique, à l'Espagne, au Portugal ou encore à l'Italie. En France, l'octroi de l'AME est conditionné à un faible niveau de ressources et à une durée minimale de résidence. C'est bien légitime.

Le principe de ce dispositif n'est pas remis en cause, mais au regard de la situation financière des publics français et de la situation budgétaire de l'État, nous devons faire des efforts. En ce sens, il est légitime de s'interroger sur la portée de l'AME.

M. le premier ministre s'est engagé à réviser l'AME au début de l'année 2025, en s'appuyant sur des travaux documentés, notamment le rapport de MM. Evin et Stefanini. Vous le savez, des travaux sont en cours en ce sens, auxquels participent notamment le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, et la ministre de la santé, Geneviève Darrieussecq. Que les choses soient bien claires : l'AME est un dispositif fondamental, nous l'avons identifié comme tel ; il ne s'agit pas de le supprimer mais de le faire évoluer. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)

Données clés

Auteur : Mme Dominique Voynet

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Solidarités, autonomie et égalité entre femmes et hommes

Ministère répondant : Solidarités, autonomie et égalité entre femmes et hommes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 décembre 2024

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