Question orale n° 242 :
Assujettissement à la THRS et à la CFE des meublés de tourisme

17e Législature

Question de : M. Nicolas Ray
Allier (3e circonscription) - Droite Républicaine

M. Nicolas Ray interroge Mme la ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics, sur l'assujettissement à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) de locaux qui font l'objet d'un usage strictement professionnel. À l'occasion de la récente campagne d'envoi de la taxe d'habitation pour 2024, de nombreux propriétaires de meublé de tourisme ont été assujettis de manière abusive à la fois à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) et à la cotisation foncière des entreprises (CFE), alors même qu'ils ne se sont jamais réservé la jouissance à titre privatif de ces locaux destinés exclusivement à de la location de courte durée. Si la jurisprudence du Conseil d'État considère en effet que les locaux proposés à la location de façon saisonnière et dont le propriétaire se réserve la disposition ou la jouissance durant une partie de l'année sont, en principe, imposables à la fois à la THRS et à la CFE, M. le député s'étonne que des logements jusque-là exonérés de THRS et dont l'usage est resté le même soient désormais assujettis à cette taxe. En l'absence d'évolution législative ou règlementaire sur ce point, il souhaite connaître les raisons de ce changement de pratique de la part de la direction générale des finances publiques et demande à Mme la ministre si une instruction fiscale ou une note de service permettant de justifier ces évolutions a récemment été transmise aux agents de cette direction. En effet, en application du deuxième alinéa du I de l'article 1407 du code général des impôts, ces locaux ne devraient pas être soumis à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS). La charge de la preuve de l'absence de jouissance personnelle incombe certes au propriétaire. Pourtant, dans la pratique, l'administration fiscale n'admet quasiment aucun autre justificatif permettant de prouver que le propriétaire ne se réserve pas le droit d'occuper son logement à titre personnel autre qu'un mandat confiant à un agent immobilier ou une conciergerie professionnelle le soin de trouver, de manière exclusive, des locataires durant toute l'année. Ainsi, quand bien même le propriétaire a sa résidence principale à proximité et que par définition il n'a aucun intérêt de résider lui-même dans ces locaux et qu'il fournit des relevés de consommation de gaz ou d'électricité qui témoignent d'une absence d'occupation en dehors des périodes locatives, la direction générale des finances publiques considère pourtant que la THRS doit être due. Cette situation crée une rupture d'égalité flagrante entre les propriétaires qui ont mis leurs biens en gérance et ceux qui gèrent eux-mêmes la mise en location. Cette différence de traitement n'est pas acceptable et contrevient au principe fondamental d'égalité des contribuables devant la loi fiscale qui découle des articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. C'est la raison pour laquelle il souhaite connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour corriger cette injustice et clarifier le traitement fiscal des meublés de tourisme afin que le propriétaire qui ne jouit pas personnellement de ce bien ne soit pas assujetti à la THRS.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

TAXE D'HABITATION
M. le président . La parole est à M. Nicolas Ray, pour exposer sa question, no 242, relative à la taxe d'habitation.

M. Nicolas Ray . Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2025, nous avons œuvré afin d'éviter aux Français des hausses d'impôt ; mon groupe – dont vous faisiez partie à l'époque, madame la ministre chargée du commerce – y a été très attentif. Néanmoins, lorsqu'elles ne peuvent entrer par la porte, les hausses de fiscalité semblent s'introduire par la fenêtre. En effet, de nombreux contribuables, notamment dans ma circonscription, ont été choqués de voir leurs biens loués comme meublés de tourisme doublement taxés, d'une part au titre de la cotisation foncière des entreprises (CFE), d'autre part au titre de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS).

Pourtant, l'article 1407 du code général des impôts est clair. Il dispose que les locaux qui font l'objet d'un usage strictement professionnel ne doivent pas être assujettis à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Le seul cas de double taxation justifiée concerne les meublés dont le propriétaire se réserve la disposition ou la jouissance pendant une partie de l'année. Jusqu'à la campagne d'envoi de la taxe d'habitation pour 2024, ce principe était respecté et la THRS n'était pas réclamée pour les meublés de tourisme destinés exclusivement à la location de courte durée.

Comment expliquez-vous cette évolution de traitement alors que le droit n'a pas varié en la matière ? Une instruction fiscale ou une note de service a-t-elle été transmise aux agents de la direction générale des finances publiques (DGFIP) pour leur demander de taxer davantage ce type de logements ?

Par ailleurs, je souligne qu'il existe peu de moyens pour les contribuables de prouver qu'ils ne font aucun usage personnel de ces meublés. Dans les faits, seul un mandat confiant à un agent immobilier ou à une conciergerie la location du bien toute l'année permet, aux yeux de l'administration fiscale, de prouver que le propriétaire ne se réserve pas le droit d'occuper son logement à titre personnel. De ce fait, tous les propriétaires qui gèrent eux-mêmes la mise en location de leur logement se trouvent dans une impasse administrative. Très peu de pièces leur permettent de justifier de leur bonne foi ; même les relevés de consommation de gaz ou d'électricité témoignant d'une absence d'occupation en dehors des périodes locatives ne suffisent pas aux yeux des services fiscaux pour prouver l'absence de disposition ou de jouissance personnelle du meublé. Cette application du droit place certains contribuables dans des situations ubuesques : ainsi, quand bien même le propriétaire a sa résidence principale à proximité et qu'il n'a donc aucun intérêt à résider lui-même dans son meublé, la THRS lui est réclamée.

Il s'agit d'une rupture d'égalité flagrante entre les propriétaires qui ont mis leurs biens en gérance et ceux qui gèrent eux-mêmes la location. Elle contrevient au principe fondamental, découlant de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, d'égalité des contribuables devant la loi fiscale.

Il est urgent de corriger cette injustice. Comment comptez-vous clarifier le traitement fiscal des meublés de tourisme afin qu'un propriétaire qui ne jouit pas personnellement de son bien ne soit pas assujetti injustement à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires ?

M. le président . La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire . Monsieur Ray, je connais votre engagement auprès des citoyens en matière de fiscalité. Vous m'interrogez sur les mesures que le gouvernement entend prendre pour clarifier le traitement fiscal des meublés de tourisme afin que le propriétaire qui ne jouit pas personnellement de son bien ne soit pas assujetti à la THRS.

La THRS est due pour tous les locaux meublés d'habitation autre qu'à titre principal, même s'ils sont par ailleurs imposables au titre de la CFE. Les locaux faisant l'objet d'un usage exclusivement professionnel n'y sont pas soumis. L'habitation personnelle s'entend comme tout local occupé par le contribuable ou dont il se réserve l'usage comme habitation principale ou secondaire.

Lorsqu'au cours de l'année, des locaux meublés sont mis en location pour de courtes durées et pour des périodes qu'il est au soin du propriétaire d'accepter ou de refuser, ce dernier est regardé, au 1er janvier de l'année d'imposition, comme entendant en conserver la jouissance. Dans ce cas, il est donc soumis à la THRS. Lorsque le propriétaire donne en location saisonnière un bien, il doit le déclarer en ligne. Si le propriétaire indique en conserver la jouissance, il est imposé de la THRS, selon les modalités d'imposition en vigueur depuis 2023.

Si un redevable demande à être dégrevé de la THRS, il doit établir qu'il a mis en location son bien pour l'année entière et n'a pas pu en disposer en dehors de ces périodes. Cette démarche est soumise à des critères exigeants, puisqu'elle est soumise à l'existence d'un engagement juridiquement contraignant empêchant le propriétaire de disposer du bien à quelque moment de l'année que ce soit.

Ainsi, il doit produire, pour chaque année et pour chaque bien loué : l'éventuelle déclaration de la mise en location meublée du bien auprès de la commune ; un décompte des jours de location effectués auprès de chacune des plateformes numériques utilisées et un récapitulatif des locations, ce qui permet souvent que la taxe de séjour correspondante soit collectée et reversée à la commune par la plateforme de réservation habilitée par le propriétaire à percevoir cette taxe ; le mandat de location ou la convention conclue avec chaque prestataire de services en ligne, signé avant le début de l'année d'imposition, pour déterminer l'intention du propriétaire au 1er janvier ; tout autre justificatif permettant d'établir que le propriétaire a entendu dédier son bien exclusivement à la location meublée de courte durée pour toute l'année.

Ces éléments seront rappelés aux services de la direction générale des finances publiques (DGFIP) qui seront amenés à traiter les réclamations contentieuses.

M. le président . La parole est à M. Nicolas Ray.

M. Nicolas Ray . Merci pour ces précisions. Je crois qu'il serait utile de redonner des instructions à ce sujet aux services de la DGFIP, car le traitement des contribuables semble différer selon le département. Il faut faciliter la vie de ces propriétaires qui sont généralement de bonne foi.

Données clés

Auteur : M. Nicolas Ray

Type de question : Question orale

Rubrique : Impôts locaux

Ministère interrogé : Comptes publics

Ministère répondant : Comptes publics

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 mars 2025

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