REP, danger sur la filière bois
Question de :
Mme Katiana Levavasseur
Eure (2e circonscription) - Rassemblement National
Mme Katiana Levavasseur attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques sur les inquiétudes croissantes des acteurs de l'industrie du bois face à l'application problématique de la responsabilité élargie des producteurs (REP), introduite par la loi « AGEC » de 2020. Ce dispositif, initialement conçu pour favoriser la collecte et la valorisation des déchets issus de la déconstruction, menace aujourd'hui la viabilité de la filière bois française. Contrairement à d'autres matériaux, le bois est un matériau exemplaire : renouvelable, biodégradable et largement valorisé, que ce soit dans l'industrie du panneau ou dans le secteur énergétique. Cependant, l'application de la REP PMCB (produits et matériaux de construction du bâtiment) place le bois dans une situation de distorsion de concurrence. Selon la Fédération nationale du bois (FNB), les éco-contributions imposées à la filière auraient déjà conduit 70 % des entreprises du secteur à quitter leur éco-organisme à titre préventif, au vu des projections annoncées pour 2025 et au-delà, en matière de contributions (plus de 50 % selon la FNB). Ces coûts affecteraient non seulement la compétitivité des entreprises françaises, mais aussi les consommateurs finaux, les collectivités forestières et les propriétaires privés. Il apparaît donc que les mesures mises en œuvre s'opposent complètement aux intentions initiales de la loi « AGEC », qui visait à encourager les produits écologiquement vertueux et à réduire leur coût pour les usagers. Et donc une fois encore, une norme franco-française risque de compromettre l'avenir d'une des filières d'excellence parmi les plus écologiques. Aucun autre pays ne flagelle ainsi son industrie nationale. À ce jour, les tentatives de rectification par voie réglementaire (notamment les arrêtés de mars et de juillet) restent insuffisantes pour corriger les déséquilibres induits. Dans ce contexte, la filière bois s'interroge sur les intentions du Gouvernement. Elle souhaiterait connaître sa position sur cette situation et savoir si des mesures concrètes seront prises avant le 1er janvier 2025 pour garantir une application équitable de la REP afin de préserver la compétitivité de la filière bois française.
Réponse publiée le 4 mars 2025
La filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) de produits et matériaux de construction du bâtiment, créée par la loi anti-gaspillage de février 2020, comporte de très nombreux acteurs. Le cahier des charges de la filière et l'agrément des 4 éco-organismes, qui à la fois collectent les contributions financières des entreprises metteurs en marché des produits et matériaux de construction, organisent la collecte et soutiennent les collectivités locales participant à la gestion de ces déchets pour les particuliers ou les professionnels, a été pleinement effective au début de l'année 2023. Les éco-organismes ont défini dès septembre 2022 le montant des contributions qu'ils appellent en tenant compte de la trajectoire de montée en puissance des soutiens à accorder aux nouvelles installations de collecte et de tri à mettre en œuvre. Les points de collecte à développer et les actions à mener en 2024 et en 2025 nécessitent ainsi des moyens supplémentaires, et les éco-organismes n'ont d'autre choix que d'augmenter le montant de la contribution. Toutefois, le précédent Gouvernement a fait évoluer le cadre réglementaire relatif à ces contributions afin notamment de rétablir l'équité entre les produits de construction en bois issus de scieries qui sont principalement fabriqués en France et les produits de construction en bois préfabriqués qui sont souvent importés. Un premier arrêté a effectivement été publié le 20 février 2024 afin de mettre sur un pied d'égalité les bois français et les bois d'importation grâce à l'introduction d'un taux d'abattement de 20 % applicable aux bois frais de sciage. Il permet également une réduction des coûts supportés par la filière par un report de certaines mesures ; les éco-organismes estimaient la réduction du montant des contributions financières perçues de l'ordre de 100 millions d'euros pour l'année 2024. Un second arrêté a été publié pour compléter ce dispositif le 3 juillet 2024. Il prévoit un nouvel abattement de contribution pour les produits générant des déchets qui sont mieux collectés et valorisés que ceux issus d'autres produits (par exemple les produits en bois versus ceux en plastique) ; le gain pour la filière bois est estimé à près de 45 M€. De plus, un décret permettant de mutualiser les obligations de reprise sans frais des distributeurs de produits et de matériaux de construction entre sites proches, qui permettra un gain pour l'ensemble de la filière REP d'au moins 180 M€, a été publié au Journal Officiel le 21 novembre 2024. Par ailleurs, par un avis publié au Journal Officiel le 5 décembre 2024, le point de prélèvement de la contribution financière a été déplacé plus en aval sur la chaîne de valeur ce qui libérera les entreprises de première transformation du bois du paiement de la contribution financière à compter du 1er janvier 2026. Enfin, les travaux réalisés par les éco-organismes, les services du ministère chargé de l'environnement ainsi que l'ADEME ont permis de diminuer de 40 % le gisement de déchets devant être pris en charge par la filière en 2024, ce qui permettra une diminution des besoins financiers liés au fonctionnement de la filière. Le Gouvernement reste attentif à la situation de la filière bois, et souhaite engager de nouvelles discussions sur la REP PMCB permettant de mieux prendre en compte les besoins des acteurs.
Auteur : Mme Katiana Levavasseur
Type de question : Question écrite
Rubrique : Bois et forêts
Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques
Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche
Dates :
Question publiée le 3 décembre 2024
Réponse publiée le 4 mars 2025