Question orale n° 244 :
Manque d'effectifs et attractivité du métier de policier national

17e Législature

Question de : Mme Alexandra Martin
Alpes-Maritimes (8e circonscription) - Droite Républicaine

Mme Alexandra Martin attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les moyens et les effectifs dévolus aux enquêtes dans la police nationale des Alpes-Maritimes en particulier et l'attractivité du métier de policier d'une manière plus globale. Les policiers interpellent régulièrement Mme la députée sur le manque général de personnels, particulièrement en investigation. Concernant le département des Alpes-Maritimes dans lequel se trouve sa circonscription, selon le syndicat Alliance police nationale, il manquerait 240 fonctionnaires pour assurer le fonctionnement normal de protection de la population maralpine et ce sont d'ailleurs les enquêteurs qui font le plus défaut. Sur l'absence de 70 agents dédiés aux enquêtes judiciaires, environ 25 concernent la seule circonscription de sécurité publique de Cannes. Si des efforts ont été faits dès l'arrivée de M. le ministre au ministère de l'intérieur et notamment en matière de nouveaux effectifs, la police nationale, dont Mme la députée salue le grand professionnalisme en toutes circonstances, a besoin d'oxygène. Les agents doivent compenser la pénurie d'effectifs et alors que l'investigation était considérée auparavant comme la consécration d'une carrière, son attractivité peine aujourd'hui à convaincre du fait de conditions de travail détériorées. Là où un enquêteur devait traiter 120 dossiers d'atteintes aux personnes il y a une dizaine d'années, il doit dorénavant en gérer le double, voire le triple. Les enquêtes de terrain ont été remplacées par des procédures alourdies et cette situation se répète sur l'ensemble du territoire. Les départs sont nombreux (retraites, mutations) et les arrivées sont rares par défaut de reconnaissance du métier. À cela, il faut ajouter la disparité des indemnités de résidence, le coût élevé des logements, les problèmes de stationnement et les agressions dont les familles peuvent être les victimes. Alors que 87 % des Français placent la sécurité en tête des priorités, il est impératif que les forces de l'ordre soient entendues, soutenues et obtiennent les moyens qu'elles réclament. Le métier doit de nouveau attirer les jeunes, que ce soit dans la police ou dans la gendarmerie. Aussi, Mme la députée demande à M. le ministre, dont elle salue la grande détermination et l'ambition de remettre l'ordre et l'autorité au cœur des actions de l'État, quelles actions il envisage de mettre en œuvre pour combler le manque d'enquêteurs dans le département des Alpes-Maritimes notamment. Elle lui demande également s'il envisage de prendre des dispositions particulières pour redorer la profession de policier national et amener la jeunesse française à s'y engager, mais aussi pour faciliter l'accès au logement et à l'installation des agents, sans négliger la sécurité des familles.

Réponse en séance, et publiée le 12 mars 2025

ATTRACTIVITÉ DE LA POLICE NATIONALE
M. le président . La parole est à Mme Alexandra Martin, pour exposer sa question, no 244, relative à l'attractivité de la police nationale.

Mme Alexandra Martin . Je souhaite appeler l'attention du ministre de l'intérieur sur les moyens et les effectifs dévolus aux enquêtes dans la police nationale, en particulier dans les Alpes-Maritimes, et sur l’attractivité du métier de policier, d’une manière plus générale. Nos policiers nous interpellent régulièrement sur le manque de personnel, particulièrement en investigation.

Selon le syndicat Alliance Police nationale, il manquerait 240 fonctionnaires dans le département des Alpes-Maritimes pour assurer un fonctionnement normal de la police et garantir la protection de la population maralpine. Ce sont d’ailleurs les enquêteurs qui font le plus défaut. Il manquerait 70 agents dédiés aux enquêtes judiciaires, dont 25 environ dans la seule circonscription de sécurité publique de Cannes.

Même si des efforts ont été faits dès votre arrivée au ministère de l’intérieur, notamment sur le plan des effectifs, la police nationale, dont je salue le grand professionnalisme en toutes circonstances, a besoin d’oxygène. Alors que l’investigation était considérée auparavant comme la consécration d’une carrière, son attractivité peine aujourd’hui à convaincre du fait de conditions de travail plus compliquées.

Les enquêtes de terrain ont été remplacées par des procédures alourdies dans les bureaux. Les départs sont nombreux – retraite, mutations – et les arrivées sont rares. À cela, il faut ajouter la disparité des indemnités de résidence, le coût souvent élevé des logements et les agressions dont les familles peuvent être les victimes. Alors que 87 % des Français placent la sécurité en tête de leurs priorités, il est impératif que le métier attire de nouveaux jeunes.

Je salue votre grande détermination et l'ambition de Bruno Retailleau de remettre de l’ordre et de l’autorité au cœur de l'action de l’État. Pourriez-vous préciser les actions que vous envisagez de mener pour combler le manque d’enquêteurs, notamment dans le département des Alpes-Maritimes, et pour redorer le blason de la profession de policier national ?

M. le président . La parole est à M. le ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur . La question que vous soulevez est fondamentale. Beaucoup de choses ont évolué dans notre société et les conditions de travail, plus difficiles et exigeantes, peuvent rendre la filière de la police judiciaire moins attractive.

S'agissant de votre département, la direction interdépartementale de la police nationale des Alpes-Maritimes dispose à ce jour de 2 374 agents, auxquels s'ajoutent plus de 200 réservistes opérationnels. En son sein, la circonscription de police de Cannes dispose de 222 agents, qui peuvent, chaque fois que c'est nécessaire, être renforcés par les unités départementales de la direction interdépartementale de la police nationale (DIPN). Même si la vérité m'oblige à dire que ces effectifs ont légèrement diminué par rapport aux années précédentes, le volume des forces reste très important.

Quoi qu'il en soit, nous resterons très attentifs à la situation de votre territoire. L'augmentation du nombre de dossiers judiciaires traités par les services de la DIPN est un problème bien réel, même si cette hausse n'est pas aussi considérable qu'on pourrait l'imaginer – une hausse de 11 % depuis 2022. Les effectifs du service interdépartemental de police judiciaire ont également connu une baisse, mais relativement limitée elle aussi, puisqu'ils sont passés de 131 fin 2016 à 124 à ce jour.

Le problème de l'attractivité de la filière investigation n'en est pas moins réel : on le constate dans l'ensemble du pays, et il n'est pas nouveau. Avec le ministre Bruno Retailleau, nous en avons fait une priorité, et la réforme qui a eu lieu devrait rapidement faire l'objet d'une évaluation. Les services travaillent actuellement à un plan global qui devrait permettre de redynamiser enfin cette filière, qui est absolument essentielle. Ces efforts prendront un peu de temps, mais gageons qu'ils porteront leurs fruits dans votre département, comme partout ailleurs.

Je veux, en conclusion, dire un mot de la question de l'attractivité, qui concerne d'ailleurs une grande partie de la fonction publique. Et je voudrais d'abord vous rassurer : la police nationale reste attractive et remplit ses objectifs de recrutement. Plus de 30 000 personnes se sont par exemple présentées aux différents concours en 2024.

Beaucoup de progrès ont déjà été faits ces dernières années, par exemple sur le plan indemnitaire ou en matière de déroulement de carrière, mais nous allons continuer à œuvrer pour de meilleures conditions de travail, pour renforcer la conciliation entre vie privée et vie personnelle, et surtout pour améliorer la gestion des ressources humaines de proximité, si importante pour les agents.

La question que vous soulevez est fondamentale, je le répète, pour Cannes comme pour de nombreux autres territoires. Il faut que nous lui accordions la plus grande attention si nous voulons préserver l'efficacité de notre système judiciaire.

Données clés

Auteur : Mme Alexandra Martin

Type de question : Question orale

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 mars 2025

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