Question de : Mme Sylvie Ferrer
Hautes-Pyrénées (1re circonscription) - La France insoumise - Nouveau Front Populaire

Mme Sylvie Ferrer attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, sur l'opportunité d'installer des toilettes sèches et urinoirs secs partout sur le territoire pour répondre à la problématique de la raréfaction de l'eau. Les sécheresses actuelles et futures alertent le pays sur la gestion de la ressource hydrique. Il est alors essentiel de revenir à des questionnements qui peuvent paraître basiques, tels que la manière de gérer les déjections. En effet, les quantités d'eau potable, d'électricité et de ressources fossiles utilisées pour évacuer les toilettes, transporter et traiter les eaux usées ont des impacts négatifs sur l'environnement que l'on est en capacité d'amoindrir très facilement. La chasse d'eau d'une toilette conventionnelle utilise environ 6 litres d'eau à chaque usage et totalise près de 30 % de l'utilisation totale de l'eau dans une habitation. Par ailleurs, près de 20 % de l'eau potable est perdue avant même d'atteindre les habitations. « Le rendement moyen des réseaux de distribution évalué pour l'année 2021 est de 81,5 % (en 2020, 80,1 %) » note l'Office français de la biodiversité (OFB) dans son panorama 2021 sur les services publics d'eau et d'assainissement. Lorsqu'un robinet qui fuit peut gaspiller jusqu'à 120 litres d'eau par jour, c'est l'équivalent de 600 litres pour une chasse d'eau cassée. Il est alors possible et urgent de montrer l'exemple en changeant les infrastructures publiques. Ainsi, des collectifs de citoyens appellent à installer des toilettes et urinoirs secs dans toutes les communes françaises. Le principe initial des toilettes sèches est de mélanger des déchets végétaux secs (copeaux de bois, paille, terre...) aux matières organiques (selle et urine). La matière ainsi constituée entre dans un cercle de recyclage et est récupérée sous forme de compost. L'absence de produits chimiques permet par ailleurs d'alléger la pollution générée par les sanitaires. Les urines peuvent aussi être collectées séparément sans chasse d'eau pour produire des engrais. Des techniques existent aujourd'hui pour une application à échelle conséquente (bâtiment, quartier), telles que les toilettes à séparation. Des projets pilotes voient le jour en France. La gestion séparative des excrétas permettrait le retour au sol de quantités importantes de nutriments pour l'agriculture (gisement estimé à 200 kT azote au niveau national, alors qu'aujourd'hui la production d'engrais repose majoritairement sur des ressources fossiles et minières). La perturbation des cycles biochimiques de l'azote et du phosphore est l'une des neuf limites planétaires établies en 2009 par un collectif de chercheurs car elles remettent en cause la stabilité de la biosphère. La récupération des urines pourrait constituer une opportunité d'amortir le « risque élevé » que le seuil de dépassement du cycle de l'azote représente actuellement. Cette mesure servirait alors de modèle pour les particuliers et contribuerait à sensibiliser la population à cet enjeu écologique. Elle répondrait enfin à la persistance des inégalités territoriales et au manque de toilettes publiques dans de nombreuses villes, notamment en zone rurale. Elle lui demande donc si elle compte prendre en considération cette proposition dans les plus rapides délais.

Réponse publiée le 4 mars 2025

Dans un contexte de changement climatique marqué par des épisodes de sécheresse récurrents en France ces dernières années, la gestion quantitative de l'eau devient cruciale pour préserver cette ressource. Dans cette optique, la réduction de la consommation d'eau est un enjeu fort, porté par le Plan Eau. A ce titre, l'utilisation des toilettes sèches apparaît comme une solution permettant de réduire significativement la consommation d'eau. La réglementation européenne et nationale en matière de collecte et de traitement des eaux usées urbaines (incluant les eaux noires issues des toilettes) prévoit que celles-ci soient, dans toutes les agglomérations d'assainissement de 2000 équivalents habitants (EH) et plus, collectées puis traitées suivant des normes d'autant plus exigeantes que la taille des agglomérations et la sensibilité des milieux récepteurs aux pollutions est importante. Suite à la révision de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines (texte publié au Journal officiel de l'Union européenne le 12 décembre 2024), ces exigences vont être étendues aux agglomérations de taille comprise entre 1000 et 2000 EH et renforcées pour les plus grandes agglomérations. Le texte révisé prévoit également des obligations en termes d'accès à l'assainissement pour tous, en encourageant la mise en place, dans les espaces et bâtiments publics, d'un nombre suffisant d'installations sanitaires accessibles gratuitement. L'article 17 de l'arrêté du 7 septembre 2009 fixant les prescriptions techniques applicables aux installations d'assainissement non collectif recevant une charge brute inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 fixe les conditions à respecter avant l'installation de toilettes sèches qui est autorisée « à la condition qu'elles ne génèrent aucune nuisance pour le voisinage ni rejet liquide en dehors de la parcelle, ni pollution des eaux superficielles ou souterraines ». De plus, une attention particulière doit être portée lors du compostage des matières issues de ces toilettes sèches afin de diminuer le risque de contamination par les agents pathogènes contenus dans les selles. Les travaux à venir pour assurer la transposition, d'ici mi-2027, et la mise en œuvre au niveau national de cette directive révisée seront l'occasion d'examiner les possibilités et opportunités, pour répondre à ces différentes obligations, de recours à des toilettes sèches au niveau des infrastructures publiques voire au-delà. Par ailleurs, au-delà de ces exigences environnementales et sanitaires en matière d'assainissement, il convient également d'examiner le cadre réglementaire français et européen applicable à la valorisation de matières fertilisantes issues de ces procédés et, à cette fin, les possibilités de débouchés associés. Enfin, il s'agit de lever différents freins tels que l'adhésion de la population à ces procédés, d'examiner les contraintes sanitaires associées (notamment les risques associés au compostage des matières issues de ces toilettes sèches), d'étudier les nouveaux circuits à mettre en place pour la collecte et la valorisation de ces matières et le devenir du patrimoine existant destiné à la collecte et au traitement des eaux usées urbaines.

Données clés

Auteur : Mme Sylvie Ferrer

Type de question : Question écrite

Rubrique : Eau et assainissement

Ministère interrogé : Transition écologique, énergie, climat et prévention des risques

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 8 octobre 2024
Réponse publiée le 4 mars 2025

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